jeudi 25 février 2010

Viva Zapata!


La famille d'Emiliano Zapata avait atteint un certain niveau d'aisance au début du siècle au Mexique.

Sa famille était l'une des rares à posséder ses propres terres.

Bien que son attrait pour les beaux vêtements l'eût plutôt fait ressembler aux hacendados (eux aussi des indigènes ou des métis mais majoritairement d'origine européenne) qui contrôlaient la plupart des terres, bien que ceux-ci affectionnassent* une mode plus « européenne », il conserva toujours l'affection et l'admiration des habitants de son village, Anenecuilco, si bien qu'à l'âge de trente ans, Emiliano parvint à la tête du comité de défense, un poste qui fit de lui le porte-parole pour la défense des intérêts de son village.

Zapata se "maria" au moins 27 fois, son dernier mariage étant le seul qui prit des apparences de légalité possédait en outre une espèce de harem, composé de femmes blanches, métisses et indigènes et portait deux gros revolvers et une machette, outil agricole qui lui servait aussi bien à corriger ses enfants, qu'à battre ses femmes ou faire sauter une tête.

À l'époque, le Mexique était gouverné par le général Porfirio Díaz qui accéda au pouvoir en 1876.

Durant de nombreuses années, Zapata milita avec persévérance pour les droits des villageois, sévèrement bafoués par Diaz. Il commença par établir grâce à des actes datant de la colonie espagnole les droits des paysans sur des terrains objets de disputes. Puis, il essaya de convaincre le gouverneur de l'État de faire rendre les terres à leurs propriétaires légitimes, mais désolé par l'inertie dont faisaient preuve les autorités et par celle des tribunaux de la République qui, orgueilleusement, ne reconnaissaient pas les titres de propriété datant des rois d'Espagne, il s'arma pour prendre possession des terres disputées.

Zapata était surtout un pragmatique, tous ceux qui pouvaient l'aider à récupérer les propriétés des villageois étaient les bienvenus.

Díaz fut renversé par Madero en 1911 suite au mouvement de rébellion de la classe moyenne représentée par Madero, qui entraîna avec elle les paysans et une partie de la classe ouvrière. La classe moyenne fournit la plupart des cadres aux révolutionnaires et avec la bénédiction des États-Unis qui s'empressèrent de reconnaître son gouvernement, pour mieux le trahir plus tard.

Les politiques de Madero étaient bénignes pour les propriétaires et le manque de gestes encourageants en termes de politique foncière ont forcé Emiliano Zapata a remobiliser son armée de citoyens-propriétaires parralèlle. Madero, effrayé, demanda à Zapata de désarmer et démobiliser ses troupes. Zapata répondit que si les villageois de Morelos ne parvenaient pas à faire valoir leur droits par les armes, ils ne le pourraient pas non plus désarmés et sans aide. Madero envoya l'armée et plusieurs généraux très compétents afin d'essayer de neutraliser Zapata mais sans succès.

En 1914 il signa un contrat d'un montant colossal pour l'époque de 25 000 dollars américains (environ le double en pesos) avec la compagnie cinématographique américaine Mutual Film corp., lui donnant l'exclusivité de filmer ses actions militaires. Ces films montrent la dureté des combats et de nombreuses atrocités commises de part et d'autre. Pancho Villa, dont l'armée était composée principalement des partisans de Madero et encadrés par des anciens militaires de carrière de l'armée fédérale formés dans les meilleures écoles européennes, avait conclu un contrat similaire avec les studios Universal.

Commence alors une valse avec les États-Unis afin d'armer leur armées. Venustiano Carranza est à la tête d'une armée qui a vaincu les hommes de Pancho Villa, Les États-Unis tentent de marier les armées citoyennes de Zapata et celle de Carranza. La foire est littéralement pognée dans la révolution Mexicaine et les premières victime sont les villageois. Zapata est accusé d'être sanguinaire et d'avoir fait exécuter d'autres rebelles avec qui il eut des différents, ses ennemis et des militaires prisonniers, on lui reproche les victimes innocentes des attentats contre les trains. En réalité il le fut sans doute moins que Carranza ou Villa et que d'autres acteurs de la guerre civile. Il lui fut également difficile de contrôler tous les faits et gestes de ceux qui se réclamaient de lui.

En avril 1919, le colonel Guajardo complote une embuscade contre Zapata avec son supérieur le général Pablo González, un proche de Carranza. Pour gagner la confiance de Zapata, il simule de la sympathie pour lui et fait attaquer une colonne de soldats fédéraux (ses propres hommes), en tuant 57. Il obtient ainsi de lui parler de son ralliement, lui promettant des hommes et des armes. Ils prennent rendez vous, Zapata tomba dans le piège : des hommes armés l'y attendaient et il est abattu à bout portant.

Ses derniers mots sont : No me dejen morir así, digan que dije algo... (« Ne me laissez pas mourir ainsi, dîtes que j'ai dit quelque chose... »).

Le samedi suivant son assassinat, il est enterré très profondément pour que ses partisans n'emportent pas sa dépouille. Sa tombe porte le numéro 23. On peut y lire :

« Al hombre representativo de la revolución popular
al apóstol del agrarismo, al vidente que jamás abandonó la fé
al inmortal
EMILIANO ZAPATA
"
dedican este homenaje sus compañeros de lucha. »
(« À l'homme représentatif de la révolution populaire
À l'apôtre de l'agrarisme, au visionnaire qui jamais ne perdit la foi
À l'immortel EMILIANO ZAPATA
rendent cet hommage ses compagnons de lutte. »)

Viva Zapata!, film Étatsunien d'Elia Kazan mettant en vedette Marlon Brando dans le rôle de Zapata et scénarisé par l'écrivain John Steinbeck raconte tout ce que vous venez de lire.

Un autre Zapata, tout aussi anarchiste, vient de mourir à Cuba.

*Tant qu'à étudier ses foutus temps de verbes que l'on n'utilise jamais, voici le tour de piste du subjonctif plus-que-parfait.

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