lundi 30 avril 2018

À La Recherche Du Temps Perdu******************Underworld de Don DeLillo

Tous les mois, dans les 10 derniers jours, je vous parle littérature, tout comme je le fais pour la musique (vers le milieu) et le cinoche (dans les 10 premiers jours). Trois passions personnelles.

Lire c'est penser, prier, communier, parler à un ami, l'écouter se confesser, vibrer à son rythme, que l'on découvre peut-être, c'est s'ouvrir les sens, lire c'est voir des idées s'exprimer, c'est se forger les siennes, c'est confronter ses préjugés, écouter une musique qui n'est pas nécessairement la sienne, explorer, apprendre, aimer, grandir, mépriser, vivre.

Lire c'est un peu beaucoup mon métier. Ce n'est pas un job pour moi, c'est un simple prolongement de la respiration.

UNDERWORLD de Don DeLillo

Mon premier contact avec l'auteur du Bronx a été White Noise qui dépeignait les naissants bruits de fonds des médias des années 80 dans nos sociétés américaines. Aujourd'hui, nous n'entendons bien souvent que ces bruits. Je vous en parle demain d'ailleurs.

Un ami, quelques années plus tard, me faisait le précieux cadeau d'Underworld.

Le roman, publié en 1997, ouvre sur le 3 octobre 1951, offrant l'histoire de la balle d'un des matchs les plus historiques du baseball majeur*. Celui entre les Dodgers de Brooklyn et les Giants de New York en série mondiale. Celui où Bobby Thomson avait frappé le coup de circuit entendu partout dans le monde. récit juxtaposé aux premières détonations atomiques soviétiques, DeLillo nous offre un voyage dans le subconscient Étatsunien. Une préoccupation certaine dans toute l'oeuvre de l'auteur.

Il nous transporte, dans une narration non séquentielle, dans la seconde moitié du vingtième siècle. On traverse la crise des missiles avec Cuba, la guerre du Vietnam, Nick Shay, travailleur dans la gestion de déchets (autre obsession de DeLillo), étant le trait d'union entre chaque segment narratif. DeLillo y parle d'infidélité, Lenny Bruce, J,Edgar Hoover, Frank Sinatra y ont des voix. Le personnage de Nick essaie de trouver la paix en rapport avec des erreurs du passé. Une erreur en particulier, à saveur Oedipienne.

DeLillo a écrit toute sa vie sur le côté sombre des États-Unis. Il traite du dysfonctionnel, du malade, du désaxé, du suicidaire, du cocu enseignant Hitler. On raconte qu'il a un fichier appelé "art" sur son bureau et un autre appelé "terreur". Underworld touche aux deux. Sa clairvoyance fait peur. La couverture du livre est 4 ans plus jeune que l'attaque des tours jumelles de New York. Mao II, raconte une guerre contre la terreur, qui ne sera vraie que 10 ans plus tard. White Noise (1985) rappelle beaucoup les futures attaques au Anthrax.

DeLillo a du flair.

Il a été baptisé le chef shaman de l'école paranoïaque des États-Unis, ce qui est un brin réducteur.

Moi je trouve qu'il est magicien de l'inconscient collectif.
Touchant parfois le sublime.

Comme dans ce livre.

Lire Underworld, c'est apprendre comment écouter. Mosaïque de mémorables moments de notre continent, intelligent traitement de thèmes d'Amérique, plusieurs y trouveront une difficulté à rester attentif à la non linéarité du roman. Qui propose davantage un collage qu'une histoire continue.
Le sachant avant de le lire, vous ne pouvez pas en souffrir. Vous ne devez que vous laisser flotter dans les vagues.

Toutes les histoires sont des collages.

De moments potentiellement universels.

Et celle-ci raconte l'Amérique de mes parents.

Qui a donné naissance à la mienne, maintenant.

*Ne JAMAIS lire un livre qui parle de baseball traduit de France, ils ne comprennent pas le sport et y traduise n'importe quoi, évitez donc Outremonde et choisissez Underworld.

dimanche 29 avril 2018

Bruits de Fond

Fox & Friends est une émission de télé matinale (qui a retiré tous ses liens sur ce que je vous raconte, depuis jeudi dernier) des États-Unis. Fox, c'est aussi le territoire "ami" de Donald Trump. Il les as appelé la semaine dernière.

Ce sera étudié dans le futur.

Appelant de la Maison Blanche comme Mario, Serge ou Gaetan appellerait une ligne ouverte sportive, l'émission matinale Fox & Friends, et discutant avec autant de cohérence qu'un grand-papa sénile et saoûl. Celui qui devrait s'affairer à des choses beaucoup plus sérieuses, appelle un show télé pour disgresser sur tout et rien, mais surtout sur rien.

Dès la seconde minute, un premier co-animateur perd son sourire, la co-animatrice baisse le regard, gênée, et le troisième est momifié comme le smiling sitting guy, quand le président des États-Unis raconte des histoires de transferts d'argent de la part d'Obama qui sont extraordinairement de l'ordre du racontar et qui ont entre 0,1 et 0% de vrai. Cet appel était plus ou moins prévu, mais c'est le président...

Un animateur lui dit poliment qu'il voudra revenir là-dessus un peu plus tard, afin d'éviter de souligner au président qu'il délire et dérape, il introduit alors le personnage de Ronny Jackson, aussi appelé dans le milieu médical "Candyman", car le docteur a la réputation bien fondée de fournir des pilules à qui le veut bien, à qui le demande et à qui saura le mieux lui rendre service par la suite. Ronny Jackson est le médecin qui a examiné Donald Trump et qui a accepté une somme d'argent conclu qu'il était en superbe forme. Il avait fait cette annonce, complètement habillé en militaire, ce qu'il a été, et décoré de toutes les médailles qu'il s'était mérité. Ce qui a tout de suite soulevé des doutes sur la pertinence du choix.
Jackson devait obtenir un poste important au gouvernement pour avoir menti sur l'état de santé du président être nommé patron des Veterans Affairs par Goofy Trump. Mais sont sorties les nombreuses histoires de drogues prescrites tel un pusher, de cet accident de voiture, ivre au volant, de sa régulière consommation d'alcool au boulot et de ses relations fameusement toxiques avec ses collègues.
Pas un, ni deux de ses collègues se sont précipité afin d'aviser que ce choix allait être catastrophique pour tous.

23 l'ont fait.

23.

Jackson, face au tollé de taille tsunami, a finalement renoncé au poste.

23.

Ce n'est pas qu'un chiffre. C'est aussi celui tout juste avant le nombre de fois que quelqu'un de nommé par le président à un poste a été, ou bien refusé par le parti ou bien refusé par le congrès ou refusé par la personne à qui s'était offert.

24 fois Dong a suggéré quelqu'un, l'a nommé et on lui a dit "finalement, non".
Pour Jackson, on lui sa suggéré de "renoncer".

Un peu plus loin, Trump parle de Micheal Cohen. Son avocat, qui a lui-même besoin de bien des avocats en ce moment. Il a dit une phrase surréaliste qui vaut la peine d'être soulignée.

"Micheal is in business. He's really a business man. Fairly big businesses I understand. I don't know his business. Michel Cohen is a businessman, he's got a business probably the big thing is: his business. And they're looking for something that has to do with his business. I have nothing to do with his business"

Nonon, pas un autiste. Le président des États-Unis. Qui s'est aussi, sans trop le réaliser, compromis en confirmant qu'il en savait peut-être beaucoup sur Stormy Daniels, qu'il prétendait ne jamais avoir rencontré.

Il a ensuite dérapé dérivé sur James Comey en disant que celui-ci n'avait pas trouvé de collusion de la part de Donald envers les Russes. "Vous pouvez même demander à Poutine!" a-t-il dit sans rire.

Je n'ai pas volé cette banque, demandez à celui qui m'attendait dans la voiture pour que l'on fuit!

Il a aussi dit la très effrayante phrase:
"L'extrême corruption au sommet du FBI est si grande (Robert Mueller qui enquête à la place de Comey) ...je la tolère, mais à un certain moment, je ne la tolèrerai plus!" laissant une porte ouverte sur un possible renvoi de Robert Mueller.

Ce qui sonne toujours comme un pilote d'avion annonçant en plein vol "J'ai à mes côtés une bouteille de Jack Daniels que je ne compte pas vider en plein vol. Mais peut-être que je le ferai".

Et assurément comme une menace d'obstruction de la justice de sa part si il le renvoie.

Il a aussi avoué qu'il ne regarde ni NBC, ni CNN, deux stations qu'il aime mépriser publiquement TOUS les jours. Il alors lancé une autre phrase magnifique:

"I don't watch them because I don't have time, there's too much and I don't have time"

Fantastique absurdité involontaire.
"Mon amour, je n'ai pas sorti les vidanges pour deux raisons: parce qu'elles étaient dégueulasses et que parce que je n'ai pas sorti les vidanges"

Lorsqu'on lui a demandé quelle note (scolaire: A,B,.C.D, E) il se donnerait jusqu'à maintenant, il a eu son humilité légendaire en disant qu'il se donnerait un A+ même si il semblait avoir un "phony cloud" au-dessus de sa tête en tout temps.
Il se trompe, ce nuage artificiel se sont ses propres cheveux.

Il devenait aussi fascinant de voir que les animateurs parlent sur un ton adulte mais que le président des États-Unis parle continuellement sur le ton de l'enfant de 9 ans critiquant un jeu sportif sur lequel il se croit persécuté par une injustice. Il crie dans le téléphone.

Plus ça avance, plus il délire, plus les trois pauvres animateurs baissent les yeux et semblent eux-mêmes très inconfortables.

Après 30 minutes de parfaite incohérence infantile, c'est l'animateur qui doit couper le président pour lui dire " on vous parlerait toute la journée, mais vous devez avoir un million de choses à faire!" Traduction: "vous êtes de plus en plus incohérent et nous avons une émission à faire!"

Le président est au téléphone et on veut s'en débarrasser comme d'un parent sénile qui ne lâche plus la ligne au téléphone. Ou un enfant en plein monologue et hyperactivement non arrêtable.

Plus marrant encore, le smiling animateur dira, une fois qu'on sera débarrassé de l'embarrassant président:
"I....think he was awake...he had a lot to say" avant de rire en s'entend dire tout ça. Il le dit avec le visage du "what the fuck did just happenned?"

Le malaise était grand.

Comme il le reste chaque fois qu'on pense à leur président.

Dans la grande symphonie de l'Histoire des États-Unis,
le passage de Trump ne sera retenu que comme des bruits de fonds.

De la dissonance.

samedi 28 avril 2018

Cosby Enfin en Cage

Mon premier contact, sans complètement le réaliser, avec Bill Cosby, a été en dessins animés, Fat Albert & The Cosby Kids, entre 1972 et 1984. Mais je n'avais retenu que "Fat Albert" pas The Cosby Kids. Pas plus que je ne me rappelais des interventions de l'humoriste à l'écran.

Je ne me rappelais que du gros Albert, HeyHeyHey.

Toutefois, entre 1984 et 1992, j'étais tout à fait public du Cosby Show, mettant en vedette toute la famille Huxtable et son entourage. Une famille ordinaire, où madame était avocate, et monsieur, comble de l'ironie, gynécologue. Une famille formidable car elle ressemblait à la mienne. J'avais l'âge des enfants Huxtable et je grandissais avec eux. Avec les mêmes situations vécues chez nous, qui étions parfois famille d'accueil (Ma mère travaillant dans l'école la plus pauvre de Québec où certains cas de DPJ atterrissaient chez nous pendant de longues périodes). Claire, la femme du Docteur Huxtable, un chic nom loin de Jones, était une femme extraordinaire. Égale à l'homme. Sinon mieux. Il était là le leurre chez Bill Cosby, auteur et superstar de la série. Il nous faisait croire que sa vision de la femme était égalitaire. On a tous acheté.
La famille Huxtable était fantastique car elle offrait aux gens à la peau noire des États-Unis (ou d'ailleurs) la vision d'un couple ayant du succès dans la vie. Ne négligeant aucun aspect des réalités vécues par les noirs aux États-Unis dans d'autres réalités. Mais cette réalité là, celle d'un couple amoureux, noirs, avec une vie tout ce qu'il y a de plus normale, était un miroir possible pour toute une génération des États-Unis. Michelle Obama était Claire Huxtable. Le simple fait que tous ces gens étaient noirs devenait secondaire. On sortait des clichés du noir voleur de voiture, errant dans le rues de Harlem, dealer de drogues, gangsta rap brother.

Qui ont aussi leurs explications, mais ce sera le sujet d'un autre tantôt.

Cette famille de noir avait un père. Bill était le père de tout un pays.

J'ai cru en son personnage. J'ai aimé son personnage pour tout le bien qu'il faisait à notre continent et ailleurs. Ces émissions étaient saines. Mais c'était un personnage.

C'est le propre des tricheurs de toute sorte, ils manipulent dans un sens en trichant dans l'autre.

Quel leurre!

Bill, au privé. était guidé par le radar de ses pulsions sexuelles. Et, succès, aidant. il s'est tout permis. Même l'inqualifiable. Sans aucun respect pour la femme. Il n'était en rien le bon papa d'Amérique. Il était prédateur sexuel.

En 2005, Tina Fey et Amy Poehler, formidables actrices de Saturday Night Live, avaient fait une référence aux allégations qui commençaient à circuler autour de Bill Cosby. Mais l'homme était riche, décoré pour ses bienfaits sociétaires, intouchable. Il ne serait pas inquiété encore par les accusations qui rôdaient autour de lui.
Puis, 4 ans plus tard. le show 30 Rock (encore Tina Fey) y faisait une nouvelle référence. Mais Bill s'en sortait toujours. L'argent est parfois un bon bouclier.

Mais en 2014, ce qu'on essayait d'étouffer commence à déborder de tous les côtés. 

Hannibal Buress, un humoriste, monte sur scène au Philadelphia Theater. Quelqu'un dans la foule filme de son téléphone.  Il glisse dans son monologue très rapidement qu'il est entendu et compris que Bill Cosby viole les femmes.

Le clip devient viral. Cette fois (venu d'un homme...) la fin de Bill débute. Les 4 ans qui suivront ne serons qu'avocasseries et palais de justice. Une blague écrite pour quelques centaines de personnes rejoint un auditoire multimillionnaire. Et mondial. On choisit de porter enfin attention.

Barbara Bowman racontait le viol dont elle avait été victime depuis 2004. Pourquoi ne l'a t-on pas alors écouté? Des dizaines et des dizaines de femmes racontaient leur viol depuis longtemps, la plupart n'osait pas. Un intouchable reste intouché. Et plusieurs de ces femmes voulaient travailler. Attaquer un monument, on en survit?

Un premier procès à divisé le jury et rien n'a pu être conclu.

Un second procès, qui se terminait la semaine dernière, a trouvé coupable le prédateur de 80 ans. les murmures sont devenus des cris. Il risque 14 ans de prison. Le reste de ses jours.

Des portes se dévérouillent.
D'autres doivent au contraire, se barrer à jamais.

On entend enfin les cris.

En entend enfin certains cris.

vendredi 27 avril 2018

10 Chansons Mal Comprises Depuis Toujours

L'inspiration pour une chanson peut venir de millions d'endroits.

Mais parfois, l'ambiguïté des propos tenus dans la chanson est la partie la plus intéressante. Toute l'oeuvre écrite de Bob Dylan est un exercice d'interprétation extrêmement cool.  Dylan serait le premier à tout nier, par simple esprit d'indépendance. Il sera à l'honneur une seule fois pour le besoin de cet exercice où je vous présente 10 chansons qu'on a, pour la plupart, tous compris de travers plus souvent qu'autrement.

Ça ira plus loin que le "I'm Your Man" chanté par George Micheal, probablement alors pour un autre "man" où le "does she loves you, like the way I love you" chanté par Melissa Etheridge pour une autre femme.

Bohemian Rhapsody de Queen
Interprétation erronée: Freddie Mercury confesse son combat contre le SIDA.
Non.

Le terme SIDA n'est créé et compris qu'en 1981. Le morceau est écrit en 1975. De plus, Freddie Mercury n'apprendra sur sa propre condition qu'en 1986. Plusieurs ont aussi pensé que "mama, just killed a man, put a gun against his head, pull my trigger, now he's dead...."  était une référence à L'Étranger, d'Albert Camus. Ou encore le récit de Faust et son pacte avec le diable. Peut-être. Mercury a expliqué que tous les mots de la chansons avaient beaucoup moins d'importance que le mélange musical qu'il comptait faire entre musique classique, opéra et rock. Le titre du morceau a longtemps été "Fred's thing". Il a choisi "rhapsody" parce que c'est un style relativement fou de l'univers de la musique classique, et "bohemian" dans le but de donner au morceau un esprit vagabond. Mais en somme, Mercury a toujours dit que les paroles n'étaient que non sens qui riment afin de s'unifier à la musique partant dans toute les directions.

The One I Love de R.E.M.
Interprétation erronée: C'est une chanson d'amour.
 Non.

C'est même un crime. La formation de Georgie était si horrifiée par ce qu'avait écrit Micheal Stipe qu'ils sont passés à un cheveu de ne jamais l'enregistrer. C'était trop violent. Si on se penche sur le morceau, il ne s'agit que de 4 lignes et un mot. Répétés ad nauseam. Mais un mot qui laisse à deux interprétations possibles: Où bien Stipe mets le feu à celui qu'il aime, ou bien il lui tire dessus. Le groupe s'est toujours amusé d'entendre les gens dirent que c'était la chanson d'amour qui représentait leur couple. Ou de voir des couples s'embrasser pendant la chanson, pendant leurs spectacles, convaincus que ce qui était chanté était un souhait amoureux. Écoutez comme il faut. "un simple accessoire, pour occuper mes temps libres, ceci est dédié à celui/celle que j'aime: Feu!" Le band a cessé de tenter d'expliquer la chanson après toute ses années et a préféré laisser croire aux gens qu'il s'agissait d'une chanson d'amour. C'est plutôt un playdoyer rancunier assassin.

Every Breath You Take de The Police
Interprétation erronée: C'est aussi une chanson d'amour.
 Non.

Combien de fois a-t-on entendu cette chanson utilisée dans un mariage? Voilà une chanson plutôt hostile à l'amour. Sting y parle de son divorce en cours, de la perte de contrôle sur celle qu'il aimait alors, de son propre aveu l'inspiration était sinistre et laide. Tirée d'un sentiment d'amertume et d'un endroit sombre de son âme. Elle était plus près du voyeur, du control freak et du harceleur que de l'amour. Son envie de surveiller son ex était fort pendant les procédures de divorce et Sting négociait très mal avec tout ça.

American Girl de Tom Petty
Interprétation erronée: Tom y parle du suicide d'une étudiante floridienne.
Non.

Oui, une jeune femme s'est bien suicidée en sautant du balcon de son dortoir à l'Université de la Floride peu de temps avant. Oui, Petty parle d'une femme au passé, se tenant sur un balcon. Ou, il est originaire de Gainesville en Floride, où se trouve cette université, et le Highway 441, mentionné dans la chanson, passe bien près de l'école, mais Tom a toujours dit que tout ça n'était que pure coïncidence,  que la fille de sa chanson ne mourrait pas, rien dans sa chanson n'indiquait qu'elle était morte (sinon l'utilisation du passé), et qu'il ne faisait qu'évoquer les sons du Highway entendus de son balcon à lui, à Encino en Californie, avec un clin d'oeil nostalgique à l'endroit où il avait été élevé, en Floride. Mais tout était en place pour qu'on se trompe là-dessus.

Imagine de John Lennon
Interprétation erronée: 22 lignes de paix, d'espoir dans un monde uni.
Non.

Uni par quoi? Par le communisme? John lui-même lorsqu'il a lancé la chanson une première fois (en 1971) en parlait comme de son manifeste communiste. Voilà, entre autre, pourquoi le FBI l'a vite fiché et placé sous surveillance en permanence. Quand John a été assassiné, en 1980, la chanson a été remise sur le marché et il était alors beaucoup plus facile d'y lire un monde de paix. C'est ce que nous voulions tous face à l'injustice de sa disparition et la folie. Chaque ligne, avec le communisme en tête, s'appliquerait dans le fantasme d'un pays sous régime communiste. Jimmy Carter l'avait compris et l'avait souligné durant sa tenure présidentielle. Mais il était à peu près le seul. Lennon dira de sa chanson qu'avec un peu de miel et de sucre, on peut faire passer n'importe quel message dans une chanson.

Born In The USA de Bruce Springsteen
Interprétation erronée: C'est une chanson patriotique.
Non.

La chanson est plutôt une critique des États-Unis. Et de leur traitement des vétérans de retour de la guerre du Vietnam. La chanson est un hommage à des proches de Bruce, dont Bart Haynes, batteur de l'un de ses premiers groupes, jamais revenu du Vietnam, tué là-bas en 1967. Bruce ne s'était pas qualifié pour le front, victime d'un accident de moto à 19 ans, qui le garde légèrement boiteux depuis, mais plusieurs de ses amis y ont été. Et sont revenus désillusionnés. Marqués à jamais. Et avec le sentiment d'avoir été sacrifié inutilement par orgueil militaire. Ronald Reagan et George Bush père, deux républicains plus ou moins informés, ont détourné le sens de la chanson en utilisant le refrain pour leur campagne électorale des années 80. Bruce, un démocrate avoué, n'y avait jamais donné son accord.

Mr Tambourine Man de Bob Dylan
Interprétation erronée: C'est une allusion à un pusher de drogue.
Oui, mais non.

Bob s'amuse beaucoup de nous. On ne sait jamais clairement. Les Dieux ont tous les droits. La chanson, avec son côté abstrait et ses images surréalistes, laisse croire que le côté hallucinogène est sollicité par l'artiste. Toutefois, celui-ci dira que le morceau était plutôt inspiré de la recherche d'idée et d'inspiration. Que le joueur de tambourin était plutôt Bruce Langhorne qui jouait d'un large tambourin turc pendant que Dylan travaillait la chanson. Le LSD, le pot, et autres stimulants artificiels arriveront plus tard que 1964, année de composition du morceau, et à partir de là, Dylan rendra toujours le sens du morceau volontairement plus confus. Parce qu'il aime s'amuser de nous.

Hotel California des Eagles
Interprétation erronée: C'est une chanson plaidant pour le satanisme.
Non.

L'obscurantisme des paroles, l'énigmatique présence d'une personne dans une fenêtre, à l'intérieur de la pochette vinyle, que les conspirationnistes on vite associé à un maître de culte satanique, et les phrases "And in the master's chamber, they  gathered for the feast, they stab it with their steely knife, but they just can't kill the beast" pointent les têtes dans cette direction. Mais Don Henley, Glen Frey et Don Felder insistent pour dire qu'il n'en était rien et qu'ils ont toujours parlé de la vie éclatée du band en tournée, qui impliquait bien des demoiselles et surtout, des excès de toute sorte. Le satanisme n'en était pas un du tout pour le band, beaucoup plus terre-à-terre.

In the Air Tonight de Phil Collins
Interprétation erronée: Phil a été témoin d'un mort évitable.
Non.

La vérité, là-dessus est de plus en plus connue. Mais pendant longtemps, on a parfois pensé à autre chose. La rumeur voulait que Phil avait été témoin d'une mort par noyade, de trop loin pour intervenir, mais qu'il était du même coup témoin d'un homme ne venant jamais en aide au noyé, alors qu'il le voyait et était lui, en mesure d'intervenir. Phil aurait écrit cette chanson comme si Dieu pouvait se venger sur cet homme, pour sa lâcheté et son immoralité. Certaine version de ce mythe prétendait que Phil avait retrouvé cet homme, qu'il assistait à un de ses spectacles, et qu'il lui avait chanté directement le morceau en le dévisageant. N'importe quoi. Phil ne parle que du sentiment précédent le divorce de sa femme d'alors.

Summer of ' 69 de Bryan Adams.
Interprétation erronée: Chanson autobiographie sur ses premiers bands, ses premiers amours.
Oui, mais non.

En 1969, Bryan n'avait que 10 ans. Ça prendrait encore 6 ans avant qu'il ne touche à une guitare et fasse tout ce qu'il prétend faire dans la chanson. Adaptant certains passages au folklore de 1969 puisque les five-and-dime n'existent plus en 1975. Oui, il y parle de nostalgie, mais le 69 évoqué était plutôt sexuel. Qu'il n'a expérimenté qu'une seule fois. Un été. Et dont il s'ennuie. "faire l'amour l'été" dira Bryan de nos jours, avec un sourire, quand on lui demande de quoi il parlait dans sa chanson.

Sagement.
Adverbe anti-rock'n roll.

Mentions spéciales à She Bop de Cindy Lauper (chanson sur la masturbation féminine), Lucy in The Sky With Diamonds des Beatles (chanson de John sur le LSD) et Les Sucettes de Serge Gainsbourg (chanson sur le plaisir féminin de celle qui aime fellationner).

jeudi 26 avril 2018

Une Tonne de Bombes à La Seconde

"Je redeviens lourd, si lourd..."
A.D./M.G. 

Je ne voulais pas vous en parler. On en a parlé toute la semaine. Mais bon. J'y cède.

Avant, pour corriger le mal être, un suicidaire choisissait le pont, la corde et le tabouret, la lame de rasoir, le gaz dans le garage, l'absorption de pilules.

Maintenant, pour tromper la solitude du mal être, on veut mourir en faisant beaucoup de bruit.
Un bruit dont on a jamais été capable de son vivant.

Le terroriste de la mosquée de Québec l'a dit à son psy. Il ne voulait pas"se gaspiller", il voulait frapper fort en sortant. Et il ne s'est pas sorti. Il ne s'est pas tué.

Un autre désorienté a pris une fourgonnette et a visé des piétions à Toronto. Peut-être même précisément des piétonnes.

Le tueur de Toronto a fait peine à voir. La vidéo de son arrestation est fabuleuse. D'un côté, un agent de police qui le braque et le somme de se rendre. Sa voiture de patrouille tout près, bloquant partiellement la route et provoquant une certaine distance entre l'assassin et le futur héros. L'assassin prétend qu'il a un fusil. Mais il s'agit d'un téléphone. Et l'agent de police le voit tout de suite. L'assassin braque son téléphone à plusieurs reprises en direction de l'agent. Dans le but qu'il croit que ce soit une arme et qu'il l'abatte. L'assassin veut mourir. C'est le plus triste de toute l'affaire. Celui qui voulait mourir, qui tuera de pauvres innocents, surtout des innocentes, survivra. Il causera des ravins de tristesse chez une dizaine de famille et amis, mais il survivra.

L'agent, ferme sa sirène de voiture, voyant que ça pourrait alarmer davantage l'assassin et pour se faire entendre, lui. Il lui crie de se mettre au sol. Ce qu'il finira par faire. Voyant que l'agent n'est pas des États-Unis, et n'a aucunement l'intention de le tirer (L'assassin ordonnait à l'agent de l'assassiner, ce qu'il a refusé de faire) Tu vivra prisonnier de ta tête mon pauvre bougre.

C'est une belle leçon pour les policiers des États-Unis. Qui trouveront surement à redire que cet idiot serait mort si son téléphone avait effectivement été une arme. Mais ce qui est idiot et ce qui ne l'est pas, chez les cousins du sud, ne fait plus de sens avec la présidence actuelle.

L'agent, Ken Lam, a agit en véritable héros. Il a dû passer les derniers trois jours à se remettre de tout ça. Il est resté modeste et discret face aux médias. Il ne veut pas de l'héroïsme qu'on lui colle.

Depuis mardi soir, on a authentifié un message de Facebook de la part du tueur de Toronto où il se déclarait Incel et parlait de rébellion de leur part. Il disait qu'il allait renverser tous les Chads et toutes les Stacys. Bon...un peu de traduction:

Incel: involontaire célibataire. Mouvement masculiniste principalement frustré de ses insucès auprès des femmes.
Chads:  Les jeunes hommes qui ont du succès auprès des femmes.
Stacys: Les jeunes femmes actives en amour et qui ont aussi du succès auprès des hommes qu'elles se choisissent.

Elles ne choisissent jamais des perdants comme le tueur de Toronto. Il a voulu gagner. On ne gagne rien par la soustraction.  Dans son message, il fait référence au Sergent 4chan. Traduction:

Sergent: l'assassin avait été militaire en formation pendant un certain temps, mais pas longtemps.
4 Chan: site ressemblant à Reddit, où on y place des photos, mais en plus glauque. L'assassin voulait y mettre du sien.

Il a aussi fait l'éloge du "gentleman" Eliot Rodger". Eliot Rodger est la mascotte préférée du mouvement misogyne et masculiniste autour des Incel. Il a tué parce que des jeunes femmes ne s'intéressaient pas à lui.

La police ne veut pas confirmer que l'assassin de Toronto a fait ce qu'il a fait pour une cause précise.

Ça me semble pourtant assez précis.

Ce qui me plait c'est qu'il n'aura jamais ce qu'il voulait. Ni les filles, ni la mort.

Mais il sera désiré en prison, croyez-moi. Et il sera prisonnier de sa triste tête tout le reste de sa vie.

Faudra parler plus des victimes.
Et de Ken Lam.

Pas de celui qui voulait tant mourir. Et qui vivra avec ses démons.

Reste lourd, si lourd, une tonne de bombe à la seconde. Ta tête sera ta vraie tombe.