lundi 30 avril 2018

À La Recherche Du Temps Perdu******************Underworld de Don DeLillo

Tous les mois, dans les 10 derniers jours, je vous parle littérature, tout comme je le fais pour la musique (vers le milieu) et le cinoche (dans les 10 premiers jours). Trois passions personnelles.

Lire c'est penser, prier, communier, parler à un ami, l'écouter se confesser, vibrer à son rythme, que l'on découvre peut-être, c'est s'ouvrir les sens, lire c'est voir des idées s'exprimer, c'est se forger les siennes, c'est confronter ses préjugés, écouter une musique qui n'est pas nécessairement la sienne, explorer, apprendre, aimer, grandir, mépriser, vivre.

Lire c'est un peu beaucoup mon métier. Ce n'est pas un job pour moi, c'est un simple prolongement de la respiration.

UNDERWORLD de Don DeLillo

Mon premier contact avec l'auteur du Bronx a été White Noise qui dépeignait les naissants bruits de fonds des médias des années 80 dans nos sociétés américaines. Aujourd'hui, nous n'entendons bien souvent que ces bruits. Je vous en parle demain d'ailleurs.

Un ami, quelques années plus tard, me faisait le précieux cadeau d'Underworld.

Le roman, publié en 1997, ouvre sur le 3 octobre 1951, offrant l'histoire de la balle d'un des matchs les plus historiques du baseball majeur*. Celui entre les Dodgers de Brooklyn et les Giants de New York en série mondiale. Celui où Bobby Thomson avait frappé le coup de circuit entendu partout dans le monde. récit juxtaposé aux premières détonations atomiques soviétiques, DeLillo nous offre un voyage dans le subconscient Étatsunien. Une préoccupation certaine dans toute l'oeuvre de l'auteur.

Il nous transporte, dans une narration non séquentielle, dans la seconde moitié du vingtième siècle. On traverse la crise des missiles avec Cuba, la guerre du Vietnam, Nick Shay, travailleur dans la gestion de déchets (autre obsession de DeLillo), étant le trait d'union entre chaque segment narratif. DeLillo y parle d'infidélité, Lenny Bruce, J,Edgar Hoover, Frank Sinatra y ont des voix. Le personnage de Nick essaie de trouver la paix en rapport avec des erreurs du passé. Une erreur en particulier, à saveur Oedipienne.

DeLillo a écrit toute sa vie sur le côté sombre des États-Unis. Il traite du dysfonctionnel, du malade, du désaxé, du suicidaire, du cocu enseignant Hitler. On raconte qu'il a un fichier appelé "art" sur son bureau et un autre appelé "terreur". Underworld touche aux deux. Sa clairvoyance fait peur. La couverture du livre est 4 ans plus jeune que l'attaque des tours jumelles de New York. Mao II, raconte une guerre contre la terreur, qui ne sera vraie que 10 ans plus tard. White Noise (1985) rappelle beaucoup les futures attaques au Anthrax.

DeLillo a du flair.

Il a été baptisé le chef shaman de l'école paranoïaque des États-Unis, ce qui est un brin réducteur.

Moi je trouve qu'il est magicien de l'inconscient collectif.
Touchant parfois le sublime.

Comme dans ce livre.

Lire Underworld, c'est apprendre comment écouter. Mosaïque de mémorables moments de notre continent, intelligent traitement de thèmes d'Amérique, plusieurs y trouveront une difficulté à rester attentif à la non linéarité du roman. Qui propose davantage un collage qu'une histoire continue.
Le sachant avant de le lire, vous ne pouvez pas en souffrir. Vous ne devez que vous laisser flotter dans les vagues.

Toutes les histoires sont des collages.

De moments potentiellement universels.

Et celle-ci raconte l'Amérique de mes parents.

Qui a donné naissance à la mienne, maintenant.

*Ne JAMAIS lire un livre qui parle de baseball traduit de France, ils ne comprennent pas le sport et y traduise n'importe quoi, évitez donc Outremonde et choisissez Underworld.

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