mercredi 17 décembre 2008

Présences


Quand j'étais plus jeune, enfant, les monstres, les méchants, les bandits et les voleurs ne me faisaient pas tellement peur.

Jamais autant qu'un être ou un phénomène inexpliqué en tout cas.

Placez-moi un homme avec une tronçonneuse, une hache ou un revolver devant le visage et je vais rigoler un bon coup mais un simple individu, un homme ou une femme, voire un enfant qui reste droit devant une fenêtre à fixer à l'intérieur d'une maison, une simple présence muette qui offre trop à l'imagination pouvait me faire pisser dans ma culotte. Un regard qui fixe sans émotions avec peut-être tout ce qu'il y a de plus dérangé sous la calotte....brrr!...

Encore aujourd'hui je suis d'une frayeur amusée et curieuse quand des manifestations surnaturelle semblent se produire.

Ma seule expérience surnaturelle, celle qui a changée ma perspective à jamais fût la nuit du décès de la meilleure amie de mon amoureuse. La nuit de ce samedi-là, l'amoureuse et moi à 273 kilomètres de son amie atteinte du cancer en phase terminale étions couchés au lit quand soudainement l'amoureuse s'est mise à pleurer. Je lui ai naturellement demandé ce qui n'allait pas. Elle a aussitôt dit "Je sens que Julie vient de passer au travers de moi, je pense qu'il vient de lui arriver quelque chose..." Cela faisait plus de 6 jours que nous ne lui avions pas parlé. Je réussi à la convaincre de s'endormir à nouveau et que le lendemain matin nous lui donnerions un coup de fil.
Toutefois le lendemain matin c'étais son partenaire de vie qui nous devançait, vers les 6h00 du matin, pour nous annoncer que Julie étais passée de l'autre côté.

À l'heure exacte où ma douce avait pleuré la veille...

Quelque jours plus tard je cauchemardais que Julie nous fixait tous les deux en train de dormir dans notre lit.

Depuis ma curiosité sur les "présences" est restée sensiblement aiguisée.
Le hanté me guette.

Je viens de découvrir Les Ménines du peintre Diego Velasquez. Son style, tout en restant très personnel, s’inscrit résolument dans le courant baroque Espagnol. Cette oeuvre est ponctuée de "présences". Le roi et la reine, diffus, dans les miroirs et cet un homme tout au fond qui ouvre un rideau sur un mur incertain. Sur sa toile,le chef d'oeuvre de sa vie, il se représente lui-même en train de peindre ce que l'on croit être le roi et la reine puisque ces deux derniers apparaissent dans le miroir derrière lui. Comme il regarde lui-même droit devant lui, il semble dévisager celui qui regarde son oeuvre. c'est-à-dire nous. Il nous fixe. Ça me fait frissonner. J'aime.

Sur sa toile L'Infante Marguerite Thérèse (1651–73) on y voit la fille de Juan Del Mazo endeuillée de son père avec derrière elle, son jeune frère Charles II, une servante et la naine Maribarbola également représentée dans les Ménines. Derrière ce trio semble se trouver un fantôme.
Déjà sur les Ménines doña Marcela de Ulloa (#6), la chaperonne de la princesse, est habillée en deuil et semble discuter avec un mort non identifié à la transparence qui rappelle un esprit.
N'est-ce pas ce que Vélasquez veut évoquer en habillant en deuil la chaperonne?

Sur son seul nu, Vénus à son miroir le visage du sujet est visible, floutée dans le miroir au delà de tout réalisme. L'angle du miroir est tel que bien qu'elle soit souvent décrite comme se regardant dans le miroir elle est, de façon plus déconcertante, en train de nous regarder.

Nous fixer.

Dans Les Époux Arnolfini (1483), Jan van Eyck se sert d'une image réfléchie dans un miroir de façon similaire à Vélazquez dans Las Meninas. Cette toile a très probablement inspiré Velazquez pour la sienne. Dans le miroir du fond on y voit de dos le couple en question et probablement le peintre lui-même.


Pas de quoi sortir une planche de Ouija mais autant de présences qui intriguent et fascinent...

C'étais quoi ce craquement dans le mur?...

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