(For Nick Hay)
P. avait beaucoup bu.
Beaucoup beaucoup bu la veille. Au point d'en oublier les détails. Au point d'en oublier le nom de la jolie jeune femme dans le coin de la chambre. Soudainement elle lui paraissait si jeune avec ses sous-vêtements à motifs...avaient-ils passé la nuit ensemble? assurément, P. sortait du lit et elle était là, assise sur le tapis, à sembler se demander ce que la journée allait leur réserver.
Quelque chose que la nuit leur avait promise?
"Sa...salut...t'as bien dormi?..."
La jeune fille a souri. Bien entendu ils avaient tous deux très peu dormi.
P. est un ancien cycliste. Lance Armstrong, cet insecte, avait confessé ce que tout le monde savait depuis longtemps, il avait du même coup assassiné le sport de sa vie. Ça avait un peu démoralisé P. Il était allé prendre une bière avec des amis, et une bière en entrainant une autre avait aussi entrainé une fille. R. qu'elle s'appellait. Et maintenant qu'il avait dégrisé, il fallait bien communiquer. P. était un bien piètre communicateur. Voilà pourquoi il travaillait dans une librairie. Là où on n'était pas obligé de dire quoi que soit à quiconque. Pas même aux usagers.
Ce qui l'écoeurait le plus dans l'affaire Armstrong c'était qu'il soupçonnait que le microbe ait monnayé sa sortie. Et en effet, le manipulateur continuait de manipuler. Il allait voir Oprah pas, Mike Wallace ou Charlie Rose ou Diane Sawyer ou Katie Couric ou même Barbara Walters: OPRAH! C'était un peu comme si un politicien dans l'eau chaude faisait ses aveux sur la chaine Mademoiselle...Et oui, Paramount annonçait qu'ils feraient un film de sa vie dès le lendemain de la première partie de son "message contrôlé". La vie d'une vermine, d'un pourri. On en ferait surement une victime de son époque et on ne le dépeindrait surement pas comme le terroriste qu'il aura été.
Lance Armstrong est un zéro faudrait pas l'oublier.
Maudite vie.
Prétextant aller préparer à déjeuner, P. se rendit à la cuisine à l'étage en tentant de jauger mentalement l'âge de la jeune fille assise dans sa chambre. Était-elle majeure? Avait-il commis un crime? Puis, il arriva face à face avec...des fesses! une autre femme nue! Une inconnue pour P. mais qui avait de toute évidence passé la nuit chez lui aussi.
"Vous?...je...euh..."
Elle lui a souri elle aussi. Ils avaient peu dormi. C'était J. lui avait-elle dit. Une nouvelle amie?
"Bien dormi?" lui avait demandé P. quand même mais sans réèllement attendre de réponse. "comment ai-je pu me ramener deux filles hier soir?" pensa-t-il. "Avons-nous...à trois?...j'ai vraiment eu un tel blackout?" il regarda dehors le temps de se demander si il ne rêvait pas en ce moment. Il pris le journal afin de voir si les nouvelles étaient bien de réèlles nouvelles...Oui, Armstrong...la commission Charbonneau...un texte poche de Stéphane Laporte...Nous étions bien en janvier 2013.
Il se rendit au salon et entendit une voix de femmes lui demander:
"Un commentaire sur votre soirée, Monsieur P.?"
Non, ce n'est pas vrai...une troisième femme dans la tenue d'Ève?...dans son salon sur le divan qui jouait à la journaliste, elle rigolait et semblait avoir envie de s'amuser. Était-il sur la planète Flesh ou quoi? Dans quel cirque était-il tombé? Où ça le menait tout ça? Vrai, il n'avait pas baisé depuis longtemps, vrai il en avait envie mais à quoi bon si il ne pouvait s'en souvenir? Si il n'avait plus d'emprise sur les femmes qu'il invitait dans son appartement? Si il ne savourait plus rien, à quoi bon avoir envie de baiser? Et trois à la fois? What the fuck? En effet, quel genre de fuck avaient-il fait? Avait-il seulement baisé? et dans quel état? et avec qui? Et quand?
Le temps de se poser toutes ses questions, il se retournait dans la cuisine et découvrait que J. n'y était plus. En regardant dans le salon aussi, la pseudo-nudo-journaliste n'y était plus. Ça y est, il avait rêvé. Il montait à l'étage au pas de course et la jeune fille avec qui il avait échangé plus tôt n'existait pas non plus. Il les avait toutes imaginées. Il avait eu si envie de tout ça que son cerveau les avait inventées. Et pendant quelques instants, il s'était cru. Il avait pris ses rêves pour de la réalité.
Un menteur ayant cru ses menteries. Comme un cycliste minable convaincu qu'il avait encore droit à la lumière. Passant son temps à dire c'est terrible, c'est terrible, mais se roulant dans les dollars jusqu'à la maison. Sans trop de punitions
Prenant tout le monde pour des tout nu.
Qu'il ne suffit que de baiser.
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