samedi 24 mai 2008

La saison pwuoche




J'aime l'hiver. Je dirais meme que je l'adore.


Ces deux phrases font de moi une bebitte rare. Né en hiver, pratiquant mes sports préférés en hiver cette saison en est aussi une ou passer un samedi a lire ou a écouter un film n'est pas grotesque.
Nous sommes présentement dans la saison pwuoche. Pas la saison poche, la saison "pwuoche" comme si la bouche elle-meme avait abandonné par dépit et découragement la bonne prononciation. La saison ou chaque samedi amene son lot de négociations avec la douce qui laisse tomber des "faudrais changer les pneus de garage" ou "faudrais monter la chaise de patio" ou toute autre phrase avec le verbe "falloir" a l'imparfait. Phrases qui semblent toujours s'adresser a une personne qui n'est pas dans la piece mais qui s'adresse justement au plus imparfait des hommes de maison de la planete.

Faut savoir que dans la boule de crystal du Jones c'est un condo en ville a l'age adulte qui étais prévu. Si l'achat d'une maison il y a 5 ans a quelque peu modifié les plans, mes talents déplorables et inexistants en menus travaux sur la maison sont restés les memes. Les developper ne fait pas du tout parti de mon plan de carriere et chaque essai (toujours forcé) me donne le profond cafard.

Quand je vois une annonce de Canadian tire ou les gars bavent devant le garage du voisin je me dis que je dois etre du troisieme sexe. Dans mon coin les week-ends sont surpeuplés de gens qui passent des heures, voires des jours entiers assis dans leurs voitures ou sous celle-ci afin d'y gosser quelque chose. J'en ai developpé une phobie de la porte de voiture ouverte. Je ne garde jamais ma porte de voiture ouverte plus longtemps que 4 secondes.

Il y a deux week-ends c'étais ma piscine qu'il fallait bien ouvrir, torcher, passer l'aspirateur, backwasher, chlorifier, constater qu'il y a encore plein de sable apres le passage de l'aspirateur, sacrer tout en sachant que je travaillerai sur la piscine beaucoup plus souvent qu'on s'y baignera tout l'été sacrifiant au passage une paire de bermuda ou deux qui n'auraient jamais du recevoir de goutte de chlore.

Le dernier week-end c'étais la mise a mort d'un arbre dans la gadoue.

Aujourd'hui c'est une phrase anodine du voisin qui a assassiné mon écoute d'une série télé a la douzieme minute du deuxieme épisode.
"ouin je ne passe plus avec ma tondeuse chez nous parce que tes cedres penchent trop sur mon
bord, tu penses tu les tailler?"

Moi? mais jamais une telle pensée ne m'effleure l'esprit.

Le dernier film de Ken Loach, le dernier album de Death Cab For Cutie, le premier match de la finale ce soir, mon livre de Robert Fisk mais penser a tailler mes cedres? erreur sur la personne.

You talkin' to me?
Quand j'ai regardé l'état de l'envahisement je me suis rendu compte que cela faisait surement 5 ans que j'aurais du tailler la chose. L'évocation de comment le précédent propriétaire s'y prenait de la part du voisin n'a fait que souligner le fait que "LUI il s'occupait de sa merde".

Je me suis fait ch...mis a la tache tout l'apres-midi ce qui a eu l'effet sur moi du supplice de la goute chinoise. Ca m'a déprimé au dela de tout entendement. Car je sais que chaque week-end qui se présentera a moi pour les 5 prochains mois j'aurai a justifier pourquoi je ne profite pas du beau temps dehors alors que pour moi il n'y a pas de météo pour écouter un bon film, lire un bon livre ou me taper un bon disque.

Je suis un homme de condo 100% capable de vivre sans terrain a entretenir. Un homme de ville expatrié dans la banlieue mortelle d'ennui. Pour moi la quintessence de l'ennui c'est passer l'arrosoir dans son entrée. L'ai fait deux fois déja en trois semaines.

L'hiver est si adorablement blanc et romantiquement floconné, je n'ai aucun probleme a pelleter mon entrée (jamais au gout de madame mais bon...c'est sa voiture qui est trop large) Mais l'été
et ses pétarades de mufflers et de motos...Heureusement il y a les cuisses des filles qui se déshabillent...
Inutile de dire que mon samedi a été pénible.
Je sais je ne me ferai aucun ami parmi tous ceux (beaucoup plus nombreux que les intellos comme moi) qui revent d'une maison avec terrain et piscine mais j'ai quand meme l'impression d'avoir perdu mon samedi.

Moi qui voulais avancer mon livre, avancer ma série télé, réexplorer le dernier album du Francois Bourrassa Quartet, étudier cette bebitte qu'est Silvio Berlusconi, me documenter sur les problemes raciaux en Belgique et en France, fouiller pourquoi Hillary nous sort Robert Kennedy, fouiller le rapport Bouchard-Taylor...vivre quoi!

Me suis comporté comme un zombie de banlieue.

Vais aller faire du bruit avec ma tondeuse avant le match.
Ou pas.
Vais peut-etre m'enfarger dans les 15 dernieres minutes du deuxieme épisode de ma série télé qui me fait de l'oeil.
De l'oeil, de l'oreille, qui me fait ébulitionner tous les sens.
Qui-me-fait-vivre.
Vivement dimanche.


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