vendredi 25 septembre 2009
Isabelle Fortier (1973-2009)
Je me rapelle un malaise. Plusieurs malaises.
La première fois je la croisais en magasin par hasard. Alors qu'un jury l'avait mise en nomination pour son oeuvre. C'était en fait une demie-heure après. Ou deux jours après. Elle était déjà ailleurs. Seule dans une allée de librairie à scruter les livres. Si je ne me trompe pas c'était bien dans la section érotique. Le hasard m'a fait faire un face à face avec elle. Un face à face devenu inconfortable de part et d'autre de par la rencontre de mes yeux noirs foncés aux siens bleu profond.
Profond de malaise.
Je lui avait souri, elle avait fait la même chose. Peut-être avec un brin de séduction pratiqué plus souvent de sa part. Je n'avais pas prévu la renconter je n'ai donc pas entamé de conversation. Je n'ai pas voulu m'imposer dans sa bulle. Je me serais trouvé déplacé. Qu'elle m'ai invité dans sa bulle ou non de son sourire. Car ça se passe dans la tête des fois ces choses-là.
Je ne me suis pas empêché toutefois d'acheter son premier roman. Le buzz était suffisament fort, l'édition de poche rapidement sur les tablettes, la curiosité suffisament intégrée dans mon être pour m'y plonger.
Nouveaux malaises.
D'abord dans le métro où j'y faisais un très long trajet pour me rendre au travail qui me permettait de lire de deux à trois livres par semaine. C'était un peu gênant d'afficher cette jaquette assez suggestive à tous dans les yeux du wagons. Je dois avouer même qu'au début je cachais la couverture avec un journal tellement je me sentais mal à l'aise. Après quelques jours j'ai assumé ma lecture en refusant de vivre dans la tête des autres. Le malaise s'était transféré ailleurs. J'étais dans sa bulle.
Son livre était si inconfortable, l'équilibre mental y tergiversait tant de paragraphes en paragraphes qu'on avait l'impression d'un séjour en institut psychiatrique. Un voyage dans les corridors du déséquilibre mental. J'étais passé au travers assez rapidment mais avec l'affreux feeling que j'avais violé le journal intime d'une fille mentalement fragile. D'une fille violée.
J'ai quand même osé son deuxième roman. Parce que lors du lancement du premier on avait insisté sur le "personnage", on avait bien tenté de dire que cette histoire n'était pas la sienne même si tout indiquait le contraire. La ligne entre fiction et réalité était si mince et le titre du second effort ("Folle")si adéquat par rapport aux scribes du premier que je m'y étais aussi plongé.
Ce roman m'étais toutefois tombé des mains. La deuxième incursion dans ses pertubations me semblaient beaucoup trop. Je sentais que celui-là elle l'écrivait de l'anti-chambre de la douleur. La noirceur et la saleté me déprimaient un peu. Ses conclusions sur la nature humaine étaient si désolantes. Je me disais que peut-être était-elle née les yeux noirs et les avaient rendus bleu ciel afin de tenter de toucher un brin d'étérnité moins malsaine que la vie qui était la sienne.
Sa tête n'allait déjà plus.
Tard hier soir les lumières se sont éteintes. De sa main.
C'était écrit dans tous ses livres. Même son dernier qui s'appellera avec beaucoup d'ironie et dont les évènements serviront assurément comme un grand coup de publicité pour les Édition Coup de Tête Paradis, Clef en Main.
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