jeudi 6 février 2014

Les Étincelles du Géant

"Vas y man, t'as juste une vie"

Alain Magloire est le fils d'un ancien procureur de la ville de Montréal-Nord et deux fois ancien ministre de la justice d'Haïti, René Magloire. On connait tous le tempérament haïtien, affable, lent, "posé" comme dirait mon fils, horriblement pondéré au point de nous faire perdre les pédales parce que nous remettant en plein visage notre propre rythme de vie trop accéléré. 

Intense n'est pas le mot qu'on colle généralement à un haïtien.

Bon vivant, ça oui.

Alain Magloire faisait 6 pieds 6. C'était un gentil géant. Moniteur dans un camp pour jeunes handicapés alors qu'il était ado, c'est là que Magloire trouvera la femme de sa vie, une animatrice elle aussi. Ils auront ensemble deux fillettes. Magloire était une bolle à l'école aussi. Il a été invité à faire sa médecine en Sorbonne, a fait une maîtrise en biochimie, a travaillé à l'institut national de recherche scientifique et chez PROCREA où il faisait des recherches sur la fertilité avec une amie à nous.

Alain Magloire avait plein d'étincelles dans sa tête, on le sentait animé par tout ce qu'il entreprenait. Avec son amoureuse, il se sont acheté un triplex. 

Puis au milieu des années 2000, quelqu'un, dans une soirée entre amis, lui refile une pilule "d'extasy" qui est probablement de la cochonnerie pure à 100%. Une sale, sale, sale, sale, pilule.

"Vas y man, t'as juste une vie"

Commence une vie qui n'aura rien à voir avec la première.
Une étincelle nouvelle se produit dans la tête de Magloire. Son cerveau réagit très mal et dès le lendemain matin, il appelle son père, convaincu que la police de la terre entière le recherche. En plein délire paranoïaque, le géant a un genou à terre. 

Il ne se relèvera jamais complètement.

Sa santé mentale n'a plus rien de sain. Le climat est si nocif que pour protéger son amoureuse et leurs deux fillettes, il choisit de quitter le triplex et de tenter de se reprendre en main ailleurs. En tâtant de l'itinérance entre autre, la mission Old Brewery et autres semblables. Ce sera un peu comme un retour au camp de vacances de son adolescence, un retour à la case départ, une remise à neuf. Peut-être pourra-t-il même aider, ceux qui en arrachent pour vrai. Lui, ce n'est probablement pas pour vrai. C'est une fêlure du cerveau qui se resoudra. Et c'est de la chambre d'un hôtel près du parc Émilie-Gamelin, là où traînent tant de déséquilibres, de résistants et de pockés de la vie, que Magloire tentera de se reconstruire mentalement.

Mais mardi matin, les étincelles se sont multipliées dans sa tête. Il a d'abord choisi de démolir sa chambre d'hôtel à coup de marteau. Un marteau qui ne quittera plus on poing tendu. Inquiétée, la direction de l'hôtel a alerté la police qui est aussitôt arrivée. 

"Tirez-moi dessus, tirez-moi dessus" criait Magloire, marteau au poing et avec un cache-oeil de pirate. Une policière a tenté de lui asperger du poivre de cayenne, elle a glissé sur une plaque de glace. une voiture avait frappé l'homme de 6 pieds 6, le forçant à verser sur la capot. Magloire s'est dirigé vers la policière au sol et nous tombons maintenant dans la brume FreddyVilanuevesque. 

Deux policiers ont été victimes de violents chocs nerveux.

On ne saura jamais trop si tout ça était nécessaire.
Trop d'étincelles de calibres différents en même temps.
 
Magloire a été touché au thorax à trois au quatre reprises.
Il en est mort, nouvelle qui a jeté la consternation chez ceux qui le connaissaient.

Intense n'était  pas un mot qu'on collait généralement à l'haïtien.

Bien mort, maintenant oui.

Son père revient d'Haïti enterrer ce fils qui lui parait étranger.
Mais qui sera toujours un géant dans le coeur du père.
 

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