jeudi 22 septembre 2022

3ème Rien

C'est drôle l'envie. J'ai jamais complètement compris l'envie. Je l'ai toujours vue chez les autres comme on verrait un ours dans le bois, mais je peux pas dire qu'elle m'habite. Je trouve même que c'est quelque chose de tellement vil. C'est dans la construction de l'espèce que je suis. Je surprend l'amoureuse, de temps à autres, à pêcher par envie. Je tente de l'en écarter, poliment. 

Nous sommes tous deux originaires du 418. De la région de Québec. Enfin, mon arrivée sur terre s'est faite à Victoriaville, et le temps que ma première soeur fasse de même, 13 mois plus tard, à Hull, nous arrivions à Québec, moi, jusqu'en 1991. De 1973 à 1991. Vers mes 10-12 ans, je savais que je ne ferais pas ma vie, à Québec. Quand je regardais les nouvelles à la télévision, tout semblait se passer à Montréal. Le premier segment de 15 minutes nous venait des studios de Montréal et nous rapportaient des nouvelles importantes et souvent, de l'international, puis, après une pluie de publicités (mais tout de même moins qu'aujourd'hui) on recevait les nouvelles locales de nos studios de Québec, qui avaient beaucoup moins de moyens que les maisons-mères de Montréal.  Oulà,là, la disparité...

Studios éclairés de manière plus minimaliste, décors de carton, même les têtes, les talents d'orateur et les vestons faisaient plus "petit". Encore aujourd'hui quand on retourne à Québec, souvent, on reste surpris de la différence des stations de radios. On sait rapidement si on approche de Québec car la qualité des orateurs, des publicités deviennent franchement plus modestes. Que l'on aime ou non, la ville de Québec, même si il y siège l'appareil gouvernemental provincial, ce qui en fait une ville à 80% fonctionnaire (J'y inclus enseignants et travailleurs de la santé), est moins riche que la métropole Montréalaise. Québec a moins d'envergure et ce n'est aucunement grave. Aucunement grave. Donald Trump est plus grand  et plus riche qu'Angela Merkel et ça n'en fait pas un meilleur homme. Simple comme ça.

Il était si clair que je n'y resterais pas que lorsqu'est venu le temps de poser mes candidatures universitaires, jamais ne m'est passé par la tête de le faire à Québec. Je ne tenais pas à y être fonctionnaire d'emblée et le monde entier m'intéressait, pas simplement mon petit coin de Sillery/Ste-Foy/Cap-Rouge. Je savais que Montréal allait m'en offrir une bien meilleure vitrine. Les "étrangers" qui effraient tant les gens du 418 sont une richesse. Tout comme une seconde ou une troisième langue. Deux choses qui, étrangement, terrorisent mentalement encore beaucoup des gens du 418.  Dans un buffet, on ne s'intéresse pas qu'aux salades. On s'inspire, on se nourrit de tout. Je ne pouvais pas rester dans ma ville de Baby-Boomers qui n'avaient que 40 ans et ne me feraient pas de place sur le marché du travail à 24.  

J'ai quitté Québec à 17 ans pour Montréal et en suis tombé amoureux. Follement amoureux. Voilà une ville qu'on pouvait marcher. Composée principalement de gens qui ne sont pas du tout de Montréal. J'adore toujours. Le dernier week-end, j'ai marché Montréal vendredi, samedi ET dimanche. Y brûlant respectivement 602, 1150 et 828 calories. Et (re)tombant en amour partout avec les quartiers, les architectures, les gens. La passion ne ment jamais, elle s'installe. On y peut rien. 

J'aime aussi Québec, mais moins qu'avant. Je reste surpris parfois de cette petitesse mentale qui y est parfois restée. Du complexe permanent contre Montréal. Québec est parfois en guerre avec Montréal et Montréal ne le sait même pas. Le premier "rien" est cette rivalité unidimensionelle.  Une certaine radio franchement toxique avec assez peu d'éducation y joue un grand rôle d'engraissage de stéréotypes. Et les gens de Montréal ne détestent pas ceux de Québec, il ne s'en préoccupent que très peu. Comme un secondaire 5 ne s'intéresserait pas à un secondaire 2. Il arrive assez souvent que je parles de quelqu'un de Montréal que personne ne connaisse à Québec et vice-versa. Et ce n'est pas grave

Je découvre tout juste Dolly Parton qui est dans le paysage musical depuis toujours. 

Le 2ème rien, pour le Montréalais que je suis devenu, est cette radio de Québec que l'on ne connaît que comme Radio-Poubelle, par ici. Mais qui est assurément beaucoup plus.  Beaucoup de mes ami(e)s y sont encore, ma famille, et je suis convaincu (je sais, en fait) qu'ils trouvent mieux.

Le 3ème rien est le 3ème lien. 

On connaît très peu les détails du 3ème lien pensé pour Québec. En fait personne ne les connaît. Parce qu'aucune étude de projet n'a été rendue publique. On promet même de ne jamais le faire. Duh! Vous accepteriez n'importe quoi vous ? Sans qu'on en mesure les impacts ? De notre lorgnette, il est difficile de comprendre que le trafic, nouvellement souhaitée au Centre-Ville de Québec, ne soit au minimum étudié. Il l'est, très probablement. Mais on garde les résultats secrets. Il semble aussi étonnant qu'on ne veuille pas nous parler des impacts écologiques dans le St-Laurent, dans le secteur pensé. Ça aussi c'est assurément étudié, mais on garde le tout, encore secret. Et finalement, ne pas vouloir en dire les coûts, c'est tout simplement ouvrir le robinet de la poche des contribuables, et de quitter la cuisine.

Impensable.

Oui, Québec et sa Rive-Sud ont probablement besoin d'un 3ème lien. Mais la manière de s'y prendre et plus que rétrograde. Il y a parfum de fascisme. Mêlez-vous de vos affaires, on sait ce qu'on fait.

Non. Pas si vous nous dites pas ce que ça nous coûtera en trafic, en dommages environnementaux, en général. 

Sinon c'est rien. 

Legault ne s'est pas caché pour dire qu'il voulait faire de Québec, une métropole.

C'est une envie qui ressemble à souhaiter grandir quand on en a plus l'âge.  

Aucun commentaire: