mardi 11 août 2020

Tолпа

En décembre 1989, le mur de Berlin était tombé. 

À Dresden, tout juste dehors des bureaux de la Stasi, la firme d'espionnage allemande, des agents russes brûlent des documents. Parmi eux, Vladimir Poutine. Les communications, les listes de contacts, les réseaux des agents, leurs identités, fausses et réelles, ils brûlent tant de matériel que le four dans lequel ils font tout se brise.

Vers la fin de l'après-midi, un groupe de protestataires se détache de l'édifice de la Stasi et marche et rôde autour de la villa du KGB. Vlad panique. Il en sera suffisamment intimidé qu'il s'en fait un traumatisme. Il appellera les services militaires russes afin qu'ils viennent en renfort, mais aucun service ne viendra l'aider. La peur qu'il vit sera tatouée dans son coeur pour toujours. Il a l'impression que le pays où il se trouve n'existe plus. Qu'il avait disparu. Il lui semblait clair que le pays avait une maladie incurable (la démocratie occidentale). Le choc sera si total, il ne l'oubliera jamais. 

Pour des centaines de millions de gens dans le monde, la chute du mur de Berlin était un grand triomphe. Un symbole marquant la fin des restrictions gouvernementales et le début d'une nouvelle ère. Mais pour le agents du KGB de Dresden, la révolution politique de 1989 marquait la fin d'un empire et le début d'une ère d'humiliation. Poutine a souvent évoqué ce moment, quand les services militaires n'ont pas répondu à son appel, comme un point tournant dans sa vie. Scarlet O'Hara pointant son poing au ciel rageusement au ciel couleur sang. Dans sa tête s'est lourdement forgé l'idée qu'il fallait restaurer la "gloire" de son pays.

Dès 1988, des agents haut placés de Moscou arrivaient à Berlin Est fin de recruter des agents dormants allemands qui continuerait de travailler étroitement avec le KGB et ce que deviendrait le KGB après la réunification et la chute de l'empire soviétique lui-même. 

Le KGB installait, au même moment,des faux comptes, des fausses entreprises, cachait de "l'argent noir" à l'étranger, des fonds qui rendraient les amis de Vlad, et Vlad lui-même, très riches. De 1986 à 1988, la Stasi a transféré des millions de marks dans des réseaux suisse, du Liechtenstein et de Singapour. Martin Schlaff, "homme d'affaires" autrichien deviendrait un rouage capital dans la vie de Vladimir Poutine. Et dans son futur régime. 

La Stasi et le KGB étaient copain-copain. Quand, en novembre 1989, le directeur de la Banque Allemande Alfred Herrhausen explose avec sa voiture, tout porte la signature d'une collaboration entre les deux factions. Herrhausen était aussi, à l'époque conseilleur principal du gouvernement allemand par rapport à l'économie de la réunification. Pourquoi le liquider? Peut-être que le KGB avait sa propre vision de la réunification. Peut-être que la police secrète russe voulait évincer des rivalités potentielles. Probablement qu'on voulait que les successeurs, comme on le fait toujours aujourd'hui, baignent dans le chaos, le désordre et la confusion. 

Poutine avait beau brûler les documents à Dresden, il restait un agent du KGB totalement dévoué. Les méthodes du KGB lui servirait toute sa vie. Négociant du pétrole à l'étranger au nom de la ville prétendument afin d'acheter des denrées pour les plus démunis de St-Petersbourg. Les fond se rendaient plutôt dans l'obschak, c'est-à-dire le compte qui rendait Vlad et ses amis plus riche. Et qu finançait les opérations secrètes. 
Gagnant la confiance de Boris Yeltsin, il lui promet l'immunité si il démissionne, mais une fois au pouvoir, il les arrête un par un ou les chasse du pays. Le Deutsche Bank Mirror trading, le landromat russe, le scandale de la Danske Bank, les arnaques se cesseraient jamais pour faire passer de l'argent d'occident aux russes. 

Mais le moment pivot de Vlad survient en 2005. Quand Viktor Yushenko, en Ukraine, arrive au pouvoir. Il arrive des révolutions de la rue, il est beau, il vole sur un vent de valeurs démocratiques, il est tout ce que Poutine n'est pas. Celui-ci flaire (à tort) une intervention de la CIA et de fonds des États-Unis. La paranoïa russe monte au plafond. Yushenko sera gravement empoisonné au point d'en être défiguré. Tout le monde sait que Vlad est derrière tout ça. Il était si outré de ce qui se passait en Ukraine qu'il avait évoqué quitter son poste de président. Mais finalement, il choisi d'au contraire se battre en utilisant les seuls moyens qu'il connaissait. Les traîtrises du KGB. 

L'électorat Étatsunien s'est mis au parfum de la réelle influence russe en 2016. Avec l'aide d'intermédiaires, de compagnies "amies", de fermes peuplée de trolls informatiques générant de vaste campagnes informatiques de désinformation, ils ont créé un réseau immense de faux experts et de penseurs de la désinformation et de la désorganisation. Ils se sont pratiqué sur le Front National en France. Et avec la Northern League en Italie. L'extrême-droite allemande aussi. Le plus important financier du Breixit n'avait que des Russes aux compétences inexpliquées autour de lui. Tout comme le cabinet des ministres polonais, prétendument "anti-russe". Et élu après une large campagne de désinformation en 2015.

Poutine méprise ouvertement l'Union Européènne, l'OTAN, tout concept occidental et bien souvent tout ce qui suggère la démocratie. Mouvements qui, ironiquement, seraient tous des réponses à son traumatisme de 1989.
Là où il y a démocratie, Vlad privilégie l'autocratie, là où il y a unité, Vlad préfère la division, là où il y a société ouverte, il choisit la xénophobie et l'homophobie, et étonnamment, des Étatsuniens conservateurs tombent en admiration devant lui...
Un groupe de cynique et corrompus agents du KGB, avec accès à de vaste quantités d'argent illégal, légitimisant la discrimination religieuse (contre les musulmans entre autre), est maintenant le meilleur promoteur des valeurs chrétiennes, contre le féminisme, la reconnaissance homosexuelle et très peu en faveur des lois contre la violence domestique.      

Cet ADN politique est présentement présenté afin de positionner la Russie dans le monde géopolitique. 

La couronnement de toute ses tactiques est l'élection du clown des États-Unis, Donald Trump. Depuis 30 ans, la Russie le sort du pétrin financièrement, lui achète des appartements, lui fait des "deals". Toujours sous le même éclairage sombre entre les services secrets russes, la franche corruption ou la simple fripouillerie. 

Cherchez qui est Shalva Chigirinsky et vous le trouverez bien impliqué avec Trump à Atlantic City, dès 1990.  Deux fripouilles. Felix Sater, un intermédiaire dans les affaires de Trump à Manhattan, Fort Lauderdale, Phoenix. Fripouille. Alex Shnaider, spécialiste du métal qui fait bâtir les hôtels Trump de Toronto, Dmitry Rybolovlev, oligarche qui a acheté la manoir de Trump pour 95 millions, à Palm Beach, en 2008, plus du double que ce que Trump avait payé 4 ans plus tôt, étangement au moment même où l'économie des États-Unis faisait beaucoup faiblir les entreprises de Trump, les Russes sont plus que des mouches autour du cheval. 

L'idée d'encourager un vil homme d'affaire occidental afin d'en faire le pion international du KGB n'est pas nouvelle. On jouait cette carte bien avant Trump et la plupart du temps, ça échouait. Mais avec l'élection de Trump, on a touché le gros lot. On misait sur le gars au toupet orange et BANG! ça rapporte enfin. 
Ils ont trouvé le parfait dadet pour systématiquement affaiblir l'influence mondiale des États-Unis, affaiblir toutes ses alliances internationales, éroder sa puissance, et dès le printemps 2020, rendre le gouvernement des États-Unis parfaitement dysfonctionnel, sabotant du même coup la réputation des États-Unis dans le monde et la la démocratie en soi. En misant juste sur le chaos naturel d'un homme-de-paille comme DJT. 

Un succès immense pour l'homme du KGB qu'est Vladimir Poutine. 

Mais répétant les erreurs des régimes passés qu'il admirait tant, Vlad favorise aussi l'autorité politique, la restriction morale, l'économie corrompue, la triche, dans une société qui reste pauvre, toujours plus pauvre, moins entrepreneuse, moins innovante, apathique, alors que les russes méritent tellement mieux. 

Mieux que des fripouilles. 


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