Personne n’arrivait jamais à prononcer son nom.
« C’est quoi ? Roumain ? Ça sonne Roumain en tout cas »
Non c’est Polonais. Son prénom la vieillit de 50 ans dans notre pays (qui-ne-veut-pas-en-devenir-un) mais dans le pays d’origine de ses parents c’est un prénom courant pour une jeune fille. Si ce n’était de son nom personne ne devinerait que ce n’est pas une petite Côté ou une Tremblay. Elle s’habille comme toute les filles dans la vingtaine. Elle porte les mêmes accessoires que les jeunes filles célibataires aiment porter pour attirer les regards jaloux ou désireux. Elle a la peau blanche au maquillage discret. Le gros accent Québécois avec ses « en t’sour » et ses « Pis check ça ! »
Toutefois elle a peu d’atout pour que le bel éphèbe lui renvoie le regard doux/fauve qu’elle lui destinait souvent. Elle est très courte sur pattes, a souvent une sacoche trop grosse qui tombe lourdement sur ses fesses un peu lourdes aussi. Le type de fesses auquel les pantalons trop serrés ne rendent pas justice. Mais comme c’est la mode… et comme la lourde sacoche tombe à peu près là, il était facile d’y poser les yeux même sans chercher à le faire nécessairement.
Elle avait quitté son ancienne grosse compagnie pour une plus petite Pour celle que son ancienne compagnie venait d’acheter. Une simplicité volontaire professionnelle pensait-t-elle. C’étais si désorganisé là-bas. Et elle ne s’y était pas fait beaucoup d’amis. Elle surestimait par beaucoup le niveau d’organisation ici.
On l’a placé aux commandes d’employés. 400 au Québec près de 200 de plus au Canada. Des Américains des fois, pas souvent mais un bassin de plus de 6000 quand même.
Elle a bien tenté de faire croire qu’elle avait la situation bien en main mais elle ne trompait personne. Ça bougeait trop vite devant ses yeux et pas assez derrière. Elle n’inspirait pas les sourires et les bonheurs qu’un tel poste aurait du dégager. « cool ma commande est arrivée ! » étais la phrase que l’on entendais le plus souvent autour de ce bureau auparavant. Maintenant c’étais le corridor des soupirs. Elle avait ou bien choisit de ne pas les entendre, ou bien elle ne les voyait vraiment pas. Elle jouait la carte du « tout est cool ». Même quand il y avait 6 personnes en ligne à son bureau dont la grogne devenait de plus en plus sonore. Pour les garçons qu’elle trouvait de son goût elle réservait de plus long laïus. Elle n’étais quand même pas seulement la fille des commandes d’employés, elle étais aussi une jeune fille prête à aimer et à être désirée en retour. Et malgré ses efforts pour se lier d’amitié avec quelques collègues, elle dinait toujours seule dans la trop grande cafétéria avec sa trop grande sacoche. Le niveau de frustration des autres avait atteint sa popularité pendant les diners. Elle paraissait si petite seule à sa table. Elle s’était pourtant pratiquée à se la jouer « cool ». Tellement que quand le #1 de la compagnie, le top du top des patrons, le visage et le nom qui font le tour de la planète en voyageant avec le nom de la business ; quand celui-ci l’a appelée pour placer une commande elle lui a servi une conversation du type, « t’es mon pote, rigolons ensemble un peu la vie ne peut pas être si morne ». Elle est tombée sur le mauvais client. Elle s’est fait gronder pour son manque de professionnalisme.
Elle l’a pris en riant. Elle a même dû rire dans sa tête en se chantonnant une ritournelle. Une ritournelle d’un chansonnier tout ce qu’il y a plus de Québécois, et c’est avec l’accent d’ici (qu’elle avait toujours eu malgré son nom d’allophone de toute façon)qu’elle s’est probablement chanté pour elle-même « Faut quand même pas s’en faire un calever »
Un matin, voyant que les sourires ne flottais plus dans les rivières qui menaient à son bureau, voyant que le patron si gentil avec tout le monde étais plus tendu avec elle, sentant les eaux troubles, elle s’est pointé quand même au bureau.
C’étais peut-être le 50ème jour de pluie,
c’étais peut-être un mauvais café,
c’étais peut-être une xième courriel qui sentais l’exaspération,
c’étais peut-être dans son horoscope auquel elle croyait en secret.
C’étais peut-être tout ça.
Le fil s’est brisé derrière ses yeux.
Les yeux pers sont passés à la rétine vide.
Avec à peine un mois et demie d’activités dans sa nouvelle famille, elle s’est levée avant l’heure du diner, a enfilé sa grosse sacoche et a quitté la bâtisse.
Sans parler à personne.
Sans regarder personne pour être bien sur qu’on n’y lise pas la tristesse qui l’habitais.
On ne l’a plus revue dans nos bureaux.
Ses patrons ont bien tentés d’avoir des explications, ils ont bien tentés d’entre en contact avec elle.
Une semaine est passée puis une deuxième. Pas de courriel, pas de message, le silence.
On est ensuite passé en mode inquiétude.
Certains ont eu le culot de s’inquiéter de leurs commandes en premier et pendant plus longtemps.
Jusqu’à ce quelqu’un la voit au Casino.
C’est sa grosse sacoche qui l’a trahie aux machines à sous. Celui qui l’a vu n’a pas voulu aller lui parler.
Il n’étais pas certain de savoir prononcer son nom.
Personne n’aura eu le temps d’apprendre à prononcer son nom comme du monde.
Peu ont eu le temps d’en apprendre le sens.
En français ça se traduit apparemment par «oiseau libre ».
« C’est quoi ? Roumain ? Ça sonne Roumain en tout cas »
Non c’est Polonais. Son prénom la vieillit de 50 ans dans notre pays (qui-ne-veut-pas-en-devenir-un) mais dans le pays d’origine de ses parents c’est un prénom courant pour une jeune fille. Si ce n’était de son nom personne ne devinerait que ce n’est pas une petite Côté ou une Tremblay. Elle s’habille comme toute les filles dans la vingtaine. Elle porte les mêmes accessoires que les jeunes filles célibataires aiment porter pour attirer les regards jaloux ou désireux. Elle a la peau blanche au maquillage discret. Le gros accent Québécois avec ses « en t’sour » et ses « Pis check ça ! »
Toutefois elle a peu d’atout pour que le bel éphèbe lui renvoie le regard doux/fauve qu’elle lui destinait souvent. Elle est très courte sur pattes, a souvent une sacoche trop grosse qui tombe lourdement sur ses fesses un peu lourdes aussi. Le type de fesses auquel les pantalons trop serrés ne rendent pas justice. Mais comme c’est la mode… et comme la lourde sacoche tombe à peu près là, il était facile d’y poser les yeux même sans chercher à le faire nécessairement.
Elle avait quitté son ancienne grosse compagnie pour une plus petite Pour celle que son ancienne compagnie venait d’acheter. Une simplicité volontaire professionnelle pensait-t-elle. C’étais si désorganisé là-bas. Et elle ne s’y était pas fait beaucoup d’amis. Elle surestimait par beaucoup le niveau d’organisation ici.
On l’a placé aux commandes d’employés. 400 au Québec près de 200 de plus au Canada. Des Américains des fois, pas souvent mais un bassin de plus de 6000 quand même.
Elle a bien tenté de faire croire qu’elle avait la situation bien en main mais elle ne trompait personne. Ça bougeait trop vite devant ses yeux et pas assez derrière. Elle n’inspirait pas les sourires et les bonheurs qu’un tel poste aurait du dégager. « cool ma commande est arrivée ! » étais la phrase que l’on entendais le plus souvent autour de ce bureau auparavant. Maintenant c’étais le corridor des soupirs. Elle avait ou bien choisit de ne pas les entendre, ou bien elle ne les voyait vraiment pas. Elle jouait la carte du « tout est cool ». Même quand il y avait 6 personnes en ligne à son bureau dont la grogne devenait de plus en plus sonore. Pour les garçons qu’elle trouvait de son goût elle réservait de plus long laïus. Elle n’étais quand même pas seulement la fille des commandes d’employés, elle étais aussi une jeune fille prête à aimer et à être désirée en retour. Et malgré ses efforts pour se lier d’amitié avec quelques collègues, elle dinait toujours seule dans la trop grande cafétéria avec sa trop grande sacoche. Le niveau de frustration des autres avait atteint sa popularité pendant les diners. Elle paraissait si petite seule à sa table. Elle s’était pourtant pratiquée à se la jouer « cool ». Tellement que quand le #1 de la compagnie, le top du top des patrons, le visage et le nom qui font le tour de la planète en voyageant avec le nom de la business ; quand celui-ci l’a appelée pour placer une commande elle lui a servi une conversation du type, « t’es mon pote, rigolons ensemble un peu la vie ne peut pas être si morne ». Elle est tombée sur le mauvais client. Elle s’est fait gronder pour son manque de professionnalisme.
Elle l’a pris en riant. Elle a même dû rire dans sa tête en se chantonnant une ritournelle. Une ritournelle d’un chansonnier tout ce qu’il y a plus de Québécois, et c’est avec l’accent d’ici (qu’elle avait toujours eu malgré son nom d’allophone de toute façon)qu’elle s’est probablement chanté pour elle-même « Faut quand même pas s’en faire un calever »
Un matin, voyant que les sourires ne flottais plus dans les rivières qui menaient à son bureau, voyant que le patron si gentil avec tout le monde étais plus tendu avec elle, sentant les eaux troubles, elle s’est pointé quand même au bureau.
C’étais peut-être le 50ème jour de pluie,
c’étais peut-être un mauvais café,
c’étais peut-être une xième courriel qui sentais l’exaspération,
c’étais peut-être dans son horoscope auquel elle croyait en secret.
C’étais peut-être tout ça.
Le fil s’est brisé derrière ses yeux.
Les yeux pers sont passés à la rétine vide.
Avec à peine un mois et demie d’activités dans sa nouvelle famille, elle s’est levée avant l’heure du diner, a enfilé sa grosse sacoche et a quitté la bâtisse.
Sans parler à personne.
Sans regarder personne pour être bien sur qu’on n’y lise pas la tristesse qui l’habitais.
On ne l’a plus revue dans nos bureaux.
Ses patrons ont bien tentés d’avoir des explications, ils ont bien tentés d’entre en contact avec elle.
Une semaine est passée puis une deuxième. Pas de courriel, pas de message, le silence.
On est ensuite passé en mode inquiétude.
Certains ont eu le culot de s’inquiéter de leurs commandes en premier et pendant plus longtemps.
Jusqu’à ce quelqu’un la voit au Casino.
C’est sa grosse sacoche qui l’a trahie aux machines à sous. Celui qui l’a vu n’a pas voulu aller lui parler.
Il n’étais pas certain de savoir prononcer son nom.
Personne n’aura eu le temps d’apprendre à prononcer son nom comme du monde.
Peu ont eu le temps d’en apprendre le sens.
En français ça se traduit apparemment par «oiseau libre ».
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