Lire c'est aspirer à comprendre l'univers de quelqu'un d'autre, s'est s'ouvrir les sens et sur des mondes, des milieux, des gens, des personnalités, des manières de penser, des entourages, c'est concurrencer sa propre manière de réfléchir. C'est apprendre et découvrir, voyager à peu de frais. C'est accepter de respirer sur le rythme de quelqu'un d'autre.
Et respirer, c'est vivre.RIEN NE S'OPPOSE À LA NUIT de Delphine De Vigan
La mère de l'auteure Française, Lucile, était une très belle femme. Du genre qu'on remarque tout de suite dans un groupe. Croisement de Françoise Hardy, Ann-Margret et Grace Kelly, elle a même quelque fois dû confesser NE PAS être Grace Kelly. La famille de Vigan comprend deux filles. Dont Delphine. Cette dernière revisite sa mère au sein de cette famille relativement unie. Mais fissurée aussi.
Faire partie de toute communauté, que ce soit l'intimité du mariage, une famille, un cercle restreint ou élargi d'ami(e)s, n'oblige pas toujours un partage des mêmes valeurs en tout temps. Mais c'est très souvent la base de ce qui soude les gens ensemble. Tout le monde a un jour connu des connexions solides altérées par des reconnaissance issues des autres. Des désenchantements autour d'une personne admirée. Tout en l'admirant toujours. Lucile est si belle, elle attire l'attention partout. Quand elle marche avec sa (toute aussi belle) adolescente Delphine, et que des travailleurs reluquent la belle qui passe, jamais il ne lui viendra à l'idée qu'ils reluquaient sa fille, un certain narcissisme lui fait prendre les compliments 100% pour elle alors que les yeux sont tous sur la plus jeune.
Ce moment, scinde l'admiration que pouvait avoir sa fille pour sa mère. Leurs voies deviennent parallèles et non interconnectés. Et ces liens naturels ? Doit-on aussi s'en méfier ? Quand Lucile commence à avoir de spectaculaires effondrements en raison d'une maladie mentale croissante, Delphine a toutes les raisons de craindre en être atteinte aussi. Son anorexie s'y annexera. Elle dira plus tard que veillir c'est appendre à perdre.
Mais dans ce livre, Delphine apprend à vivre dans l'espace qui se creuse entre elle, sa soeur, son père, sa mère. Les esclandres sont spectaculaires. Cette famille est unie et heureuse dans les premières pages, mais peu à peu, on passe aux failles. Aux tragédies internes. À l'abrupte distance. Un secret familial dévoilé a des sombres conséquences. On cède place à fondamentale solitude personnelle. Solitude inquiète.La maladie mentale est une planète encore difficile à explorer. À comprendre surtout. Je vous reparles de la maladie mentale en fin de semaine prochaine. Ici, dans ce 7e roman autobiographique mais aussi fictif, Delphine se sent obligée de renaitre comme auteure en s'affranchissant de sa mère, Lucile.
L. |
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D. |
Mais fascinant à lire. Et citer l'immortel Alain Bashung dans le titre, c'est me charmer en partant.
Le rôle d'un(e) artiste est de faire bouger les frontières mentales.
Delphine y est fine sur cette ligne.
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