lundi 14 mars 2022

Chronologies & Capsules du Temps

Je vous ai parlé de ma surexcitation de l'arrivée imminente de pas moins de 12 petits livres de la collection 33 1/3 nous parlant de GRANDES passions autour d'un même disque. 

Ils sont maintenant tous arrivés et je viens de terminer l'un de ceux-ci. Que j'ai aussitôt regretté d'avoir commencé, une fois les 12 arrivés. 

Les livres choisis font référence à des albums de 1965, 1971, 1972, 1974, 1975, 1979, 1983, 1985, 1987, 1991, 1997 et 2002, respectivement. Surexcité que j'étais, j'ai reçu Unknown Pleasures de Chris Ott (et Joy Division) avant tous les autres. Pour une raison inconnue. Trop énervé, je l'ai aussitôt commencé. Pas qu'il était mauvais, au contraire, il m'a même fait naître une délicieuse liste de lecture de 3h, qui ne contient, étrangement, aucune chanson de Joy Division (que j'adore, du reste). 

Alors pourquoi le regret, Jones ?


Parce que ces bien pensés petits livres d'à peine 100quelques pages, nous plongent dans le monde de la création, mais aussi dans des époques, des capsules du temps, bien précises. Ce qui m'a donné l'envie ( trop tard passé la pulsion excitée de la réception d'Unknown Pleasures) de les lire en ordre chronologique de sorties d'albums. Le Joy Division a été lancé/pensé/travaillé/créé entre 1977 et 1979. Donc au beau milieu de la chronologie des livres que je recevais. Le contexte social de l'Angleterre de la deuxième moitié des années 70 était sensiblement le même que celui de Brian Eno ( le livre/album de 1975) et de celui de David Bowie (le livre/album de 1974). Ce n'était pas extrêmement grave, me direz vous. Pas plus que cette idée folle que j'ai d'en acheter un autre parce que les 12, + Low de Hugo Wilken/David Bowie qui fût le premier que j'ai acheté il y a longtemps, et Transformer de Ezra Furman/Lou Reed, que j'ai eu à Noël et lu en janvier dans le Sud, ça fait 14.

C'est laid 14. Me semble que 15, ça ferait un chiffre plus rond. Neil Young ? Velvet Underground ?

...20? Je pourrais me rendre à 20...

Je me sens comme une consommatrice de souliers qui en aurait déjà 200 paires. 


J'ai terminé le très bon livre de Chris Ott entre les murs de notre Condotel du Nord. Vers 6h30 le matin, samedi, pendant que la belle au bois dormait. Finir un bon livre (même un mauvais) demande souvent, ensuite, une période "D'encaissement". Comme à la sortie d'un film ou d'un spectacle, ou à la fin d'un bon repas. On mesure, peu à peu ce qui nous est entré dans le corps, dans le coeur, dans la tête, ce qui restera. On vient de s'asperger d'autrui et au final, on en sera un peu/pas du tout/totalement transformé. Dans notre valise mentale a été pondu quelques graines de semences. L'univers de Ian Curtis, son tragique destin, Manchester pauvre, le romantisme idéalisé anéanti, le son Joy Division que j'ai forcément revisité quelques fois en lisant (parce lire ce type de livres fait appel à de l'écoute occasionnelle afin de remarquer ce qu'on nous fait remarquer),  reste un peu sombre. Suivant la chronologie que je voulais faire, j'aurais dû faire suivre avec Bob Dylan/Mark Polizzotti et Highway 61 Revisited, le livre qui me parle de l'album de 1965. Et ensuite remonter les époques.


Mais je n'ai pas été en mesure de commencer tout de suite. J'étais mentalement au début des années 80. Moi qui venait tout juste de vous en parler de la fin. Et maintenant fallait que je replonge dans un contexte de 1964-1965. 

Je n'y étais pas complètement. Bain-vapeur, bain scandinave, musique sur Iphone diffusé sur diffuseur à musique ou Air Pods, cartes magnétiques pour ouvrir nos portes. J'ai attendu un peu. Épongeant le Joy Division récemment lu. Qui me ramenait déjà au début des années 80, moi, planté en plein 2022. Le bond me semblait long. 


Puis, seul dans un bain tourbillon avec la plus fine des neiges nous tombant sur la tête, j'ai vu ce baby-boomer me regarder (d'un autre bain bouillant) un peu trop longtemps. Jusqu'à ce qu'il finisse par s'approcher de moi et se pencher à ma hauteur pour me dire:

"Excuses-moi de te déranger, mais tu serais pas le fils de Bevan Jones, par hasard?" 

Je le suis, ce que je lui ai confirmé. Sans lui dire que ce dernier est décédé en 2009. 


"Ah Tabouère! tu lui ressembles tellement! ça ne pouvait pas être autrement! On s'est connu en 1965, à Victoriaville ! on avait pas 20 ans ni l'un, ni l'autre!!! Tu lui diras un beau bonjour de ma part !" Puis, il est reparti. 


Sans jamais se nommer. 

Pas grave, je n'ai plus de père pour lui en parler. Et si il n'est pas au courant de son décès depuis presque 13 ans, il ne pouvait pas être si intime de mon défunt père.

Formidable d'avoir un tel ego, pour qu'on puisse se penser connu comme Barabas dans la passion.

Mais j'ai voyagé un peu.

Il m'avait replongé presque 60 ans passées.

1965...J'ai commencé mon livre sur Highway 61 Revisited de Bob Dylan/Mark Polizzotti.  

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