lundi 12 mai 2025

Ailleurs

C'est tempête. L'été menace, les moteurs des voitures pimpées et des motos commencent à polluer les sens, au travail, les vagues sont intenses.

Nous sommes les rameurs de la cave d'un navire qui prend l'eau et dont on bouche les trous avec de la gomme. 

C'est l'image la plus juste que je puisse évoquer pour parler de notre situation au travail. C'est insupportable. Et bien souvent, inacceptable. Il faudra mutinerie et on s'en approche. Ça donne un drôle de climat. Au moment d'écrire ceci, nous avons plus de 1500 requêtes à valider dans nos systèmes, à 3. Donc quelques 500 chaque. Une journée intense frôle les 200. Et croyez-le ou non, on se fera taper dessus par les gens au dessus. Parce que nous ne sommes que rameurs dans la cambuse.

Avec les enfants, mes 2 soeurs, ma mère, ma belle-soeur, on s'envoie des "snaps" tous les jours avec l'application Snapchat. C'est simplement une photo, un film, parfois avec un filtre dans une série de filtre suggérés qui changent régulièrement, d'un moment de notre journée. En vieillissant, on est de plus en plus occupés et certains d'entre eux (les 2 soeurs, ma mère, la belle-soeur) sont à distance. Cette photo, qu'il faille livrer tous les quelques 24/36 heures, est souvent une idée de la journée de l'autre. Une croquée d'un moment du jour. Ça fait rire, souvent. Comme cette photo que j'ai envoyée par le passé. Bart n'écoutait pas, je lui ai coupé une oreille. Elle ne devait pas lui servir. 

Avec l'amoureuse, ça fait 1639 jours de suite qu'on s'envoie des snaps. Avec Monkee, notre fils, 1497. Punkee, notre fille,1396. Et avec ma soeur Janiper Juniper, 1401.

Ça nous amuse. Intrigue. Impressionne. Donne la couleur du moment pour la journée des autres ou la sienne. J'ai remarqué que plusieurs fois, la semaine dernière, j'ai choisi d'envoyer en snap, le fond d'écran qui se présente au bureau quand je ferme mes connexions d'employés. C'est souvent très très beau. Et suggère de l'apaisement et de l'évasion. De grandes étendues. Du voyage. 

Ailleurs.

Ça me parlait tellement que je l'ai pris en snap. Ce que je vous ai mis juste là, à gauche , c'est un de ces snaps.  J'ai besoin d'un ailleurs de ce qui m'étouffe. 

Et ce week-end...ce maudit week-end...celui de la fête des mères. Hosssssssssssssssssssssssssstie qu'il est compliqué pour moi. Et si inutilement. Y a une mère sous mon toit qui a envie de se faire gâter. Y a sa mère à elle, 273 kilomètres plus loin, y a la mienne, aussi dans le 418, y a mes deux soeurs, monoparentales, toujours dans le 418, toutes s'attendent à se faire fêter. `

Reste qui ?

Moi. J'en ai juste une mère. Ai été utilitaire pour en faire naître une autre. 

Je coordonne des affaires à distance tentant de réunir tout le monde. Je suis celui qui doit accepter un repas au resto à 10h le samedi matin, nous faisant nous lever à 6h de Montréal, "parce que les enfants de X" doivent partir vers midi. Et être ailleurs. Et c'est la fête des mères, et je voudrais être avec mes enfants...".

Bien entendu, de Montréal, l'amoureuse et moi, notre fille et son chum sommes arrivés les 4 premiers, et ceux qui devaient partir vers midi, les derniers (sur 11). C'est de la micro-agression me direz vous, et cette année aurait dû être plus facile car la mère de l'amoureuse est à l'étranger, ça faisait une mère de moins à harmoniser. Mais non. On s'est brutalement épuisés en faisant notre aller-retour samedi, et au moment d'écrire ceci, dimanche 11h08, alors que depuis une semaine je dis aux enfants (25 et 21 ans) de s'occuper de la fête des mères, le souper n'est pas encore clair. TOUTE la semaine je leur ai dit, n'attendez pas à la dernière minute pour arranger whatever. Pensez -vous que...? enfin...Punkee notre fille travaille jusqu'à 17h, je crois comprendre qu'une décision finale y sera prise vers cette heure. 

Vraiment...Encore cette année, la déception traine une ombre sur ce week-end. Il semble que personne ne soit jamais complètement satisfaites ce week-end là. C'est un week-end inutilement lourd. Quand arrive la fête des pères, j'implore la journée normale sans réels changements. Vous me le faites sentir tous les jours que je réussis avec vous. Même si j'étouffe ailleurs. Au travail, seulement. 

Mais il y aura du mouvement de ma maisonnée, dans les semaines à venir.

Aujourd'hui même, Monkee, notre 25 ans, quitte avec son amoureuse pour le Mexique. Une semaine. C'est con, son estomac, absent de nos frigos, 7 jours, c'est à la fois un soulagement de dépenses alimentaires, à la fois une gestion du frigo plus simple (il travaille de nuit, ses repas sont atemporels). Puis, le dernier week-end de mai, l'amoureuse, qui a eu 50 ans en pleine pandémie, n'a jamais pu faire son voyage entre amies qu'elles devaient faire à Singapour en 2020. Elles se reprennent donc au dernier week-end de mai jusqu'au 10 juin. Puis finalement, Punkee, qui fête ses 5 ans avec son amoureux, part aussi au Mexique, pour un premier voyage entre lovebirds. Première semaine de juin.  

Tout le monde part ailleurs chez moi, sauf moi. Qui le fait tous les jours en quelque sorte, en lisant écoutant de la musique, regardant un film.

Et cette fenêtre de la première semaine de juin, seul à la maison, avec un grand 25 ans qui dormira ses jours, me permettra d'explorer ces 3 territoires culturels sans porter préjudices à quiconque. 

Ce sera une inhalation d'équilibre mental et physique. 

Voilà d'ailleurs, mon proche ailleurs. 

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