jeudi 23 novembre 2023

Brian & Les Traitres

Comme bien des jeunes qui les découvraient autour de 1964 (époque que je n'ai jamais connue vivant) je suis fasciné par la trame narrative autour des Rolling Stones.

J'ai dû lire et relire presque 10 fois leur histoire jusqu'à nos jours. De plusieurs angles et par plusieurs auteurs. Je projettes même de travailler un blogue parallèle pour 2024 sur leur histoire, dans mes mots, sur 52 dimanches, comme je l'ai fait cette année avec David Bowie et Prince

Les Rolling Stones, dans la foulée de l'invasion musicale britannique que les Beatles avaient insufflé au monde entier, ont prouvé être l'exemple de la durée. Mais à leurs débuts, peu le savait, ni même le pensait. Quand c'était le band de Brian Jones. 

Gerry & The Pacemakers, Herman's Hermits et tous les bands de l'époque imitaient les Beatles par leur look propre, complet, veston cravate, chic. Mais pas les Stones. Ils étaient moins propres. Se présentaient comme les mauvais garçons du rock'n roll, là où les Beatles étaient les fils que toutes les mamans du monde voulaient. Très vite, on savait que si des règles allaient être brisées, ce seraient par eux. Leur look était plus baveux. Et celui qui détonnait le plus, c'était l'unique tête blonde, l'initiateur du band. Brian Jones (no relation to me).

Sur les photos du groupe, outre la blonde chevelure, il était le seul qui n'allait presque jamais sourire sur les photos. Sa face à elle seule résumait ce défi des autorités qui pouvait transformer une génération au complet en bouleverseur de société. Du fait, il était aussi alors, au début, celui qui recevait le plus de courrier de la part des fans, du band. Courier, dont il s'appliquait à répondre lettre par lettre, personnellement. Il dominait son band en attirant le plus de cris sur scène et était leader de ce band de faiseurs de reprises blues.      

Son leadership ne durera pas longtemps. Il fonde le band avec Ian Stewart en 1962, mais dès 1963, l'attention se tourne vers Mick Jagger et Keith Richards et Ian est simplement et outrageusement tabletté. Un nouveau documentaire, de l'excellent Nick Broomfield, se nomme bien (dans l'ordre) The Stones & Brian Jones. Dès 1963, leur gérant Andrew Loog Oldham, souhaitant du matériel original, enferme Jag & Keef dans la cuisine pour qu'ils écrivent des hits originaux. Ce qu'ils feront avec brio jusqu'à nos jours. Dans le film de Broomfield, un cruel clip nous montre un intervieweur demander à Jones comment se passait le processus de compositions de chansons, et Brian de se décomposer le visage et de pointer le doigt vers Mick & Keith, avec un évident chagrin. 

Le reste de l'histoire est une spirale vers les bas fonds mentaux, on le sait. Il sera misérable professionnellement et en privé, marginalisé par le band qu'il avait mis au monde, sa consommation de drogue le propulsant dans l'inutilité parasitaire entre 63 et 68. Mi 1969, il était limogé de son propre band et 3 semaines plus tard, trouvé mort dans sa piscine. 

Pourquoi reparler de cette histoire ? Parce que les Rolling Stones viennent de lancer leur 26ème album studio (en Amérique), le 20 octobre dernier, Mais aussi parce que Broomfield, adolescent, se rappelle avoir côtoyé et s'être entretenu quelques fois avec Jones. Et la thèse de Broomfield est que la chute de Jones est directement lié à ses parents et à son éducation.

J'ai un livre chez moi de Paul Trynka sur Jones qui confirme un peu cette théorie. 

Ses parents étaient bourgeois et conformistes. Jamais ils n'ont encouragé leurs fils dans sa passion pour la musique. N'ont jamais épousé le refrain de Zimmerman que les temps changeaient. They were-a-changin'. Ils voulaient que Brian réussisse à l'école point. Le film inclut de remarquables images d'archives de Jones en Grammary school. Ils lui souhaitaient un travail conventionnel et n'ont jamais pris au sérieux ses envies musicales. Silly distractions. Jamais ils n'ont assisté à leur fils sur scène. L'ont traité comme un échec. Même quand le band est devenu parmi les plus populaires au monde et que Brian devenait plus riche qu'eux. L'hostilité s'installait alors. Brian ne pouvait pas être plus seul au monde entre 1965 et 1969. Sa famille, Brian la trouvait chez ses copines amoureuses, lui qui sera père d'au moins 5 enfants sans jamais les élever. Ses pérégrinations amoureuses sont incontournables dans le film et dans sa vie. Il était une crapule amoureuse. Un monstre. Même si ses anciennes amoureuses sont constantes dans leur description du jeune Brian: "Il était un fameux amant, mais semblait terriblement perdu. désorienté". 

Brian sera doublement rééffacé quand la mannequin Allemando-Italienne Anita Pallenberg, son amoureuse, le quittera pour Keith, et ensuite couchera avec Mick, confirmant que tout ce que tu feras Brian, on te le volera. Tu seras toujours vampirisé.

Sans surprises, Broomfield n'obtiendra aucune entrevue de Mick ou Keith, mais Bill Wyman, le bassiste bouc émissaire de Jag & Keef (Keef surtout), livrerait de l'or dans ce film. Jones était important dans les premières années des Stones en jouant d'une tonne d'instruments exotiques, et étant très important sans jamais en être crédité sur Their Satanic Majesties Requests, un album qu'aucun des Stones, sauf Wyman, n'aimera après coup. 

Broomfield n'explore aucunement les théories sur sa mort. Dont celle qui voudrait qu'un employé travaillant sur sa maison l'aurait assassiné. Ce qui vaudrait peut-être un film à lui seul. Mais encore. Le film de Broomfield dresse un parallèle avec George Harrison dont le matériel n'était jamais accepté par les deux autres. Et qui, vers la fin du band, offrait le meilleur matériel des Beatles. 

Qu'aurait offert Jones dans les années 70, si il les avait connues ? 

Un Jones étonne toujours.  Mais ce Jones n'avaient que des traitres autour de lui. Dont lui-même envers lui-même. 

George Harrison avait un appui indéfectible d'une famille assez pauvre. `

Jones, rien, d'absolument tout le monde. Il est presque devenu ce rien. 

Aucun commentaire: