mercredi 17 juin 2020

Blonde & Idiote Bassesse Inoubliable: Enter The Wu-Tang (36 Chambers) de Wu-Tang Clan

Chaque mois, vers le milieu, tout comme je le fais pour le cinoche (dans les 10 premiers jours) et tout comme je le fais pour la littérature (dans les 10 derniers) je vous parle de l'une de mes trois grandes passions: la musique!

Le titre de la chronique est inspiré de 4 albums que j'ai tant écouté dans ma vie qu'ils font parti de mon ADN. J'en connais toutes les paroles, toutes les notes, toutes les nuances, toute l'histoire.

Par ordre de création:
Blonde on Blonde de Bob Dylan
The Idiot d'Iggy Pop
Low de David Bowie
The Unforgettable Fire de U2

B.I.B.I. c'est moi. C'est aussi la terminaison du terme habibi qui, en dialecte irakien, veut dire je t'aime.

Musique, je t'aime.

ENTER THE WU-TANG (36 CHAMBERS) de WU-TANG CLAN

Je n'ai jamais été un fan de rap. Pas plus maintenant. Mais je sais reconnaître la création artistique. Le rap existait avant cet album de 1993. Il existe encore après. Mais cet album a marqué son temps. Il a donné le ton du genre. Il a donné le ton de la rue. Il a été le tonnerre de la rue. New Yorkaise surtout. Il a parlé à plus de 1 million 800 000 de gens prêts à les écouter sur 30 ans.

Robert Fitzgerald Diggs, sous le pseudonyme de RZA est le leader du groupe de 9. Il a produit tous les morceaux de l'album et la majorité de ce qui suivra du clan. Il a aussi produit pas mal des créations solos des membres. Il a composé de trames sonores pour plusieurs films avec Jarmush ou Tarantino, chez Pinkaew ou Ridley Scott. Il est aussi l'auteur de la trame sonore de la série animée Afro Samuraï. En 2012, il a co-scénarisé, réalisé et joué dans le film The Man With The Iron Fists.

Gary Grice, sous le pseudonyme de GZA, est le membre le plus âgé du groupe et est considéré comme l'âme du clan. Il avait 10 ans quand il a commencé à rapper dans les rues, et en a 23 quand le clan enregistre son premier effort collectif. Deux ans avant cet album, il avait lancé un album solo. Il est habile de la métaphore, des références aux films (risibles) de samouraïs, et on dit de son album solo, Liquid Sword que c'est le meilleur projet solo en marge du Wu-Tang Clan.

Russell Tyrone Jones, sous le pseudonyme de Ol' Dirty Bastard, est le plus excentrique et le plus erratique membre du clan. Il a souvent attiré l'attention pour les mauvaises raisons. Il est habile de la rime trichée, d'alitérations charmantes, d'inflexions vocales éraillées, et reste le style le plus désordonné du clan. Il sera, par le scandale, l'un des plus populaires du clan, participant à des collaborations avec des gros vendeurs de la pop comme Mariah Carey entre autres. Il est décédé en 2004 d'un accidentelle overdose de drogue.

Clifford Smith est Method Man. Il est aussi le plus jeune membre du clan, n'ayant que 17 ans quand on enregistre l'album. Il sera le premier à lancer des albums solo post Wu-Tang. Il a une intéressante carrière cinéma et télé, et a aussi tâté de la pop avec succès avec Mary J.Blige, entre autres. Il a collaboré à la télé comme sur disque avec Redman. Son amitié avec The Notorious B.I.G. aura été un tampon diplomatique important dans les accrocs sociaux entre Biggie, Raekwon & Ghostface. Ce qui n'a pas suffit à sauver le vie de Biggie.

Corey Woods est Reakwon. Surnommé "le chef" pour ses saveurs lyriques et son habileté à cuisiner de la cocaïne en crack rock. Ses paroles contiennent de multiples références à la consommation de drogue. Il utilise largement le slang newyorkais, ses textes sont livrés agressivement, et il est le plus ridicule sur ses visées de grandes richesses issues de la vente de drogue. Un contre exemple de société. On le dit à l'origine du genre Mafioso rap.

Dennis Cole est Ghostface Killah. Il est abstrait, énergique, émotif dans son style de rap. Il est celui qui a lancé le plus d'albums solo avec 12.

Jason Hunter est Insepctah Deck. Il utilise de compliquées métaphores, produit beaucoup pour les autres.

Lamont Jody Hawkins est U-God. Il a été moins exposé que les autres puisqu'il était incarcéré en prison pendant l'enregistrement de presque tout l'album. Il n'apparaît que sur deux morceaux brièvement mais garde un style de Blaxploitation rap avec sa voix très basse.

Elgin Turner est Masta Killa. L'unique membre n'étant pas un rappeur expérimenté lors du premier album. C'est GZA qui le prend largement sous son aile. Il est aussi peu présent sur l'album puisqu'aussi en prison trop longtemps pendant l'enregistrement.

Les Boyz ne sont pas des anges. Ensemble, ils ne veulent pas qu'on leur marche sur les pieds. Certains ont mis le pieds du côté illégal.

Parce que RZA n'avait pas en main (ni les moyens d'avoir) les meilleurs équipements de prise de son, de mixages et d'enregistrements, une couleur sale mais pas pauvre est donnée à l'album. Les batteries ont plus de base. Et sont plus lourdes que vives et propres. Les échantillons repris ailleurs ont un écho inquiétant, presque hanté. Les voix de chacun sont très distinctes. Tantôt agressives, tantôt granuleuses, elles sont en parfaite harmonie avec la production sans moyens, très représentative de ceux qui produisaient la chose à coup de "fuck" et de "motherfucker nigga".

On bizoune beaucoup autour du chiffre 9 avec cet album, composé de 9 membres. Selon les arts martiaux, l'être humain aurait 108 points vitaux (1+0+8=9). 36 de ses points seraient mortels. (3+6=9). 9 + 36 =45. 4+5=9. Le coeur contiendrait 4 points et comme ils sont 9 membres chantant du coeur, 4x9=36. De là les 36 chambres. Le nom du clan et le titre de l'album sont aussi une référence au film (dont certains passages sont intégrés au produit fini) Enter The Dragon.

L'univers de l'album est très rude, très dur, sombre, mais c'est exactement la réalité que nous exposaient les 9 boyz in da hood. C'était leur monde. C'était l'album qu'attendait bien des jeunes noirs des États-Unis. Un album de frères en survie.

Comme tous les noirs des États-Unis, encore aujourd'hui sont perpétuellement en survie.

Pour amateurs de rap, de rumble jumble drumbeats, de poésie de la rue, de hip hop, de rap battle, de chansons pass-the-mike, de hardcore music, de East Coast hip hop, de New York, de graffitis vocaux, de manifeste crus, d'histoire des États-Unis. 

L'album sera considéré comme l'un des plus influents de toute l'histoire du hip hop.


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