mercredi 1 avril 2020

Mon Vin Zimmerman

Bob Dylan.

Non il n'est pas mort. Pour certains, il est mort vers 1977. Quand il a fait un virage chrétien dans sa vie privée transposée dans sa musique, devenue moins inspirante. Il a, occasionnellement, retrouvé une touche intéressante passé 1977, il s'est même mérité un Oscar et un beaucoup moins probable Prix Nobel de Littérature pour ses écrits mis en musique. Si improbable qu'il n'a pas tout de suite réclamé son prix, se sachant imposteur.

Les honneurs, ça se discute. Bob a choisi de le taire celui-ci.

Reste que le Zimmerman, il est immense. Quand il mourra, ce seront deux textes que je vous offrirai en sa mémoire. Déjà écrits. Un pour Robert Zimmerman, son nom réel, l'autre pour Bob Dylan, son pseudonyme artistique. Deux textes mêmes si l'homme a au moins 6 vies. Todd Haynes l'avait compris.

Jeudi dernier, peu après minuit, l'heure des vampires, il a pondu un petit morceau et a peuplé le net d'un nouvel effort musical. Pas un album. Mais presque "une Face A" entière. Une chanson de presque 17 minutes , sa première création original disponibilisée depuis 8 ans. Et définitivement son plus long. Le nomade sédentaire chanteur a lancé le morceau sur le net en disant:
"Salutations à mes fans et ceux qui me suivent et je vous envoie toute la gratitude possible pour votre loyauté au travers des années. Voici un morceau enregistré il y a longtemps qui pourrait vous intéresser. Restez en santé, soyez prudents, restez éveillés, et que Dieu soit avec vous."

Il croit toujours en Dieu, le Bobby D.

La ballade "parlée" Murder Most Foul nous parle de l'assassinat du président John Fitzgerald Kennedy avec uniquement du piano, une batterie brossée au fouet, quelques violons. Dylan nous parle de ce jour sombre de Dallas quand l'âme d'une nation a été aspirée par la fatalité.

En cette ère très certainement confuse dans le monde, une ère qu'on dira aussi une sombre époque pour toute sortes de raisons, très certainement, la pièce de Zimmerman semble à nouveau marquer le temps d'une couleur empreinte de tristesse. Réfléchissant sur l'époque et le maintenant, on y parle de mort et d'émoi national.

On y parle quasiment, encore, de maintenant.

Bob a toujours trouvé le moyen de nous parler de maintenant. En nous parlant d'hier.

Vers la fin de la chanson, on ne parle plus du deuil de JFK, mais on semble glisser facilement dans le deuil de la culture d'une nation. Il référence Patsy Cline, les Beatles, Guitar Slim, Bud Powell, Stevie Nicks, Thelonious Monk, The Who, Etta James, Jelly Roll Morton, John Lee Hooker, Stan Getz, Nat King Cole, Charlie Parker, Queen, The Eagles.

La toute dernière ligne branche le titre en parlant de jouer "un meurtre horrible".

La chanson a été bien accueillie un peu partout, faisant même se questionner plusieurs sur l'utilisation du "they" quand Dylan dit que "They killed Kennedy".  Une référence directe aux multiples théories voulant que Lee Harvey Oswald eût été seul à tirer ce 22 novembre 1963. (il ne l'était pas).

Le dernier effort sur disque de production originale de Bob  Dylan a déjà 8 ans. Il a depuis lancé plusieurs albums rendant hommage à des standards de musique qu'il aime beaucoup, réadapté à sa guitare et à son band. Il a aussi animé un balado. Gagné le Nobel de littérature, prix qu'il a finalement accepté, mais qu'il a longuement différé. Et surement jamais complètement compris.

La chanson lancée dans la nuit de mercredi à jeudi dernier ne semble par liée à un nouvel album.

Mais on attend plus un nouvel album de Zimmerman.
Plusieurs attendent même sa mort.
Pour faire revivre son oeuvre passée.

Bob sera immortel.

D'autres comme moi, savoure le Dylan nouveau comme on savoure un bon verre de vin bien vieilli.
Quand tous les astres s'alignent pour que le moment soit parfait.

Vendredi, 18h36, tout l'était.
Parfait.

Aucun commentaire: