lundi 22 décembre 2025

Frank Capra

Né à Bisacquino, près de Palerme, en Sicile, il est le dernier enfant d'une famille de 7. Capra est un dérivé du mot bouc en italien, animal qui détient deux qualités qu'on pouvait attribuer à Francesco Rosario, émotif et têtu. En 1903, il n'a que 5 ans quand la famille émigre pour les États-Unis en 13 jours de bateau. Une des pires expériences de sa vie, jusqu'à sa mort.  Il détestera être considéré comme "immigrant". Il sera vite Frank. Son père cueille des fruits à Los Angeles, Frank vendra des journaux. Le fera enfant, pendant 10 ans. Quand il termine son école secondaire, ses parents veulent qu'il travaille, mais il choisit encore les études. Il joue du banjo dans les clubs de nuits, étudie la chimie et la technologie. De tous la famille, il sera l'unique diplômé. Pendant la Première Guerre Mondiale, déployé comme Second Lieutenant, mais contracte la grippe espagnole et est rapatrié aux États-Unis. Il erre dans la jeune vingtaine à San Francisco et en gagnant de l'argent à jouer au poker. Tourne quand même un documentaire de 32 minutes sur le passage d'un navire italien dans la Baie de San Françisco. Il déteste être identifié au ghetto duquel il est issu.

À coup de quelques mensonges baveux sur son expérience, il se déniche un emploi dans l'industrie du film, et scénarise pour Hal Roach ou Mack Sennett. Il sera engagé par la Columbia Pictures pour faire des films à petits budgets. Quand il entend le son sortir de la bouche d'Al Jolson, la magie le gagne. Son éducation d'ingénieur lui permet de comprendre les mécaniques et lui ouvrent des portes. Il tournera une douzaine de films muets avant de tourner son premier, semi-muet. Il s'associe au scénariste Robert Riskin assez souvent, devenant un tandem chéri d'Hollywood dans les années 30. 

Riskin, comme Capra, sont portés sur l'humain qui part de rien, le héros ordinaire qui se sort de tout. Le narratif inconscient du nouvel arrivant qui se débrouille honnêtement, parfois suite à des hasards comiques, avec une morale optimiste. La Grande Dépression sévit dans les années 30, et le film d'amour, d'indépendance et de classe sociale que sera It Happenned One Night, du tandem Capra/Riskin charmera tant qu'il gagnera 5 Oscars, les 5 plus importants, sera le premier film à le faire. Film, réalisation, scénario, acteur, actrice. Pendant presque 10 ans, il sera la coqueluche de son époque gagnant pas moins de 3 fois en 5 ans l'Oscar du meilleur réalisateur, en plus d'être nommé, au final 3 autres fois, entre 1933 et 1946. Et aussi d'animer lui-même, la 8e soirée des Oscars, en 1936. 

Son film de 1939 serait un peu l'histoire de notre Marwa Risqy d'ici. Un honnête et nouveau sénateur se bat contre le gouvernement, tricheur. Il ne gagnera pas l'Oscar du meilleur film car c'est l'année de Gone With The Wind et de The Wizard of Oz

Ce film de 1939 enracine toutefois le style Capra. 

Les années 30, c'est un peu ce qu'on revit, L'éveil de l'intolérance internationale, le racisme normalisé et élu au pouvoir, les envahissements de territoires injustes et l'économie qui s'effondre. Ça a mené à la Seconde Guerre Mondiale. Où l'acteur James Stewart, qui a travaillé avec Capra auparavant, est appelé au front. Parmi les chanceux qui en reviennent, Stewart sera très inquiété de savoir si il a encore sa place dans le monde du cinéma, en 1945. Il fera appel à son ami Frank, qui lui, après des années 30 tout à son avantage, commence à sentir qu'on le tasse à son retour de la guerre aussi. Même si il a tourné pour la Guerre, et gagné un Oscar pour le meilleur documentaire, en 1943, racontant la guerre. 

Riskin, pendant le même conflit mondial, a travaillé pour le bureau de la Guerre aussi, et s'est associé à Samuel Goldwyn, après 10 ans d'écriture avec et pour Capra. Leurs chemins se séparent. Frank a donc besoin d'un projet, et on lui propose It's a Wonderful Life, avec James Stewart, projet qui n'est d'abord pas du tout sa tasse de thé.  Le titre en est originalement The Greatest Gift et raconte l'histoire d'un homme sauvé du suicide et convaincu par un ange du cadeau de la vie. À la réécriture, on change le titre et l'ultime cadeau de la vie sera l'amitié. L'entourage aimant. Il y aura 9 paires de mains sur l'écriture du film, dont des scénaristes avec lesquels il a déjà tourné. Le film de Noël sera une catastrophe commerciale rapportant 50% de ce qu'il a coûté à tourner. Mais il sera tout de même nommé 5 fois aux Oscars l'année suivante. N'en gagnera pas. Capra pense avoir perdu la touche et bien qu'il tourne (5 fois) jusqu'en 1964, il s'investira beaucoup comme président de l'Académie of Motion Picture Arts and Sciences, travaillant pour la guilde des écrivains des États-Unis et sera Directeur en chef de la guilde des réalisateurs des États-Unis.

Il décède d'une crise cardiaque le 3 septembre 1991, à l'âge vénérable de 94 ans. 

Innocent messie inspiré de la chrétienneté italienne, il présentait l'avarice comme l'ennemi dans les années 30, avant qu'elle ne devienne valorisée dans les années 80, et revalorisée de nos jours. Salement.

Les frères Coen en seront de très publics fans. Robert Altman, Ron Howard, Masaki Kaboyashi, Akira Kurosawa, John Lasseter, David Lynch, John Millius, Martin Scorsese, Steven Spielberg, Oliver Stone et François Truffaut se réclameront tous du même humanisme qu'il leur aura enseigné.     

3 de ses films, dont It's a Wonderful Life, sont considérés souvent comme parmi les meilleurs jamais faits aux États-Unis. 7 de ceux-ci, son préservés dans le registre national des films de la Libraire du Congrès. Impopulaire à sa sortie, en 1946,  les droits de diffusion, pour It's a Wonderful Life, ne sont pas renouvelés en 1974, par négligence, et le film est alors constamment diffusé à la télévision, précisément pendant le mois de Noël. Et devient peu à peu, incontournable classique. 

Il serait tout à fait naturel que vous le voyez à la télé depuis quelques semaines. 

Et les 24-25 décembre assurément quelque part. 

Il était fier italien, mais encore plus fier Étatsunien, depuis 1920.

Peut-être moins, de nos jours. 

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