lundi 18 novembre 2013

Plus La Rose est Importante, Plus Les Épines Sont Pointues

C'était un jeudi soir d'hiver.
Le 17 janvier dernier à Moscou vers 23h30

Le directeur artistique et ancien danseur du prestigieux ballet de Bolshoï, Sergei Filin, était tout près de chez lui quand un assaillant masqué (Yuri Zarutski, un homme au chômage) crie son nom afin d'attirer son attention et lui asperge le visage d'un acide qui fera perdre à Filin l'usage d'un œil, pratiquement tout l'usage de l'autre aussi, et le défigure gravement.


Andrei Lipatov, un complice, attend dans une voiture qui fera fuir Zarutski ailleurs après l'agression.

Les pneus de la voiture de Filin étaient régulièrement crevés, il avait reçu des appels anonymes, menaçants et douteux, en plus de voir son compte Facebook se faire pirater.

Pavel Dimitrichenko, un danseur principal du Bolshoï theater confesse d'abord être complètement bouleversé par cette terrible attaque.

Puis, au mois de mars suivant, les masques tombent.

Zarutski parle et avoue que c'est Dimitrichenko qui a l'a engagé, avec Lipatov, afin d'arranger le portrait de Filin. Et ce sera mission accomplie. Pavel Dimitrichenko confesse aussi être derrière tout ça.

Sergei Filin est (était?) l'homme le plus influent du prestigieux ballet Russe. Il peut/pouvait en un seul choix de casting faire la carrière d'un(e) danseur/danceuse. En faisant le casting du Lac des Cygnes de , Filin n'engage pas l'amoureuse de Dimitrichenko là où ils l'auraient souhaité elle, Anzhelina Vorontsova, et lui. Soit dans le rôle de la princesse Odette, la reine des cygnes.

Anzhelina Vorontsova, jeune danseuse importante du Bolchoï, avait été jugée de manière absurde comme la ballerine lourde...à 109 livres...Dimitrichenko, déjà très déçu par l'équilibre des chèques de paie au Bolchoï Theater, est soupçonné d'avoir pêché par jalousie extrême. Les rivalités artistiques ne datent pas d'hier en territoire moscovite. Il était très courant, presque normal même, de se convoquer en duel à l'épée ou au sabre afin de régler des haines mutuelles entre artistes, directeurs artistique, enfin, entre égos gonflés.

Dimitrichenko a conféssé en mars avoir parlé de sa haine envers Filin à Zarutski et Lipatov mais pas de leur avoir demandé de s'occuper de lui.

De 1964 à 1995 Iouri Girgorovich a bâti la réputation du Bolchoï Theater qui n'avait que de plus grand compétiteur que le communisme. Quand vous étiez danseur au Bolchoï, vous aviez droit à à peu près tout les privilèges luxueux accordés aux plus importants dignitaires communistes. Les meilleurs salaires, les meilleurs appartements, les meilleurs conditions de voyages. Le traitement de V.I.P. absolu.
Toutefois, depuis quelques années, la résistance entre les partisans du ballet classique et ceux plus ouverts aux styles émergeants de danse, a créé des clans ne dansant pas le même pas.

Les coups salauds entre rivaux font légion en Russie. Le directeur pressenti tout juste avant Filin pour le poste de directeur artistique du Bolchoï, avait été forcé de démissionner quand on l'avait menacé de dévoiler des photos de lui dans des positions sexuelles compromettantes.

Dimitrichenko a plaidé que Filin organisait ses rôles au gré des aventures sexuelles qu'il avait avec les danseuses. Filin a rappliqué qu'au contraire, si on a opté pour l'acide, c'est que justement on ne trouvait rien à faire du chantage sur sa personne.

Quand le juge a demandé à Dimitrichenko si il était désolé de ce qui était arrivé à son directeur artistique et si il avait envie de s'excuser d'en être responsable, Dimitrichenko a répliqué "Pourquoi m'excuser?".

Ce qui l'a aussitôt envoyé derrière les barreaux jusqu'au début du procès pour cette agression dont Dimitrichenko serait le commanditaire. Les témoignages ont débuté au début de novembre.

Sergei Filin avait engagé un danseur étranger, l'Étatsunien David Hallberg, une première, ce qui avait provoqué beaucoup de vagues au sein du Bolchoï Theater. Filin avait alors dit "Je ne m'attends pas à être aimé, on aime rarement notre directeur artistique".

On pense qu'il n'aura jamais plus la vision pour pouvoir exercer son métier à nouveau. Il en était à sa 24ème opération au visage depuis janvier il y a 15 jours.

Pavel Dimitrichenko, peu importe l'issu du procès, est pour sa part, ruiné.

On ne sait pas trop pour Anzhelina Vorontsova.
Associée à tout ça de la pire des manière pour sa carrière.

Dimitrichenko et ses complices risquent 12 ans au cachot.
Et des sévices, tout soviétiques à l'interne, pour avoir osé coordonner une attaque contre une élite comme le directeur artistique du Bolchoï Ballet Theater.

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