lundi 21 avril 2025

Train du Lendemain

C'était Noël à Bucarest. Le 21 décembre, en fait. Le dictateur de Roumanie Nicolae Caucescu faisait un discours en extérieur sans réaliser que ceux et celles à qui ils s'adressaient étaient en train de non pas célébrer ses propos, mais en train de rugir si fort qu'il allait être renversé par le peuple. Un coup de fusil dans la foule avait fait paniquer tout le monde qui soudainement avait cru en une attaque terroriste. Mais le vrai terroriste, c'était Caucescu qui, dans les années 80, avait copié les manières communistes de la Corée du Nord en enrichissant ses biens personnels tout en coupant les besoins essentiels au peuple qu'il gardait terrorisé par des (alors) rumeurs de disparitions ou de mort si dissidence, même soupçonnée.  Rumeurs confirmées faits quelques années plus tard. 

Le coup de fusil dans la foule, c'était son ministre de la défense qui s'était suicidé d'une balle dans la tête. Avant de le comprendre, l'armée avait eu le temps de penser que c'était Caucescu qui la faisait assassiner et elle se revirait contre lui. Le mouvement de révolte de la foule, c'était la tempête parfaite pour mettre fin au régime qui privait le peuple d'aliments, de chauffage et d'électricité face à eux qui vivaient dans des palais toujours plus luxueux depuis trop longtemps. 4 jours plus tard, le couple Caucescu était exécuté après un rapide tribunal de 55 minutes, identique aux tribunaux express que Caucescu faisait aux dissidents qu'il extreminait. Le 7 janvier suivant, on interdisait la peine de mort au pays maintenant libéré de sa tyrannie.

C'était formidable pour les Roumains. Dont le peuple s'était vraiment pris en main. 

Ça restait hanté pour nous ces images de Caucescu prendre conscience, en direct, que son discours change de ton. Quand il réalise que la foule ne l'acclame pas et que plutôt ça hurle contre lui, il improvise une augmentation de salaire pour tout le monde dès le 1er janvier 1990 pour faire reculer le tsunami de contestation. Mais renaissait une nation. Il était trop tard. 

Le regard de Caucescu prenant conscience de ce qui se passe, m'est toujours resté hanté en tête.

Comme les images d'Hilary Clinton , avec ses proches dans un avion, qui s'amusait à faire un vidéo "défi mannequin", une tendance de 2016, la veille de l'élection, pour faire voter le peuple, une élection dont les sondages la déclarait facile gagnante. L'issue, on le sait, serait contraire. C'est aussi hanté parce qu'on a jamais vu venir le train du lendemain. 

J'ai revisité mentalement ces deux moments de "renversement d'impression ", de complaisances fatales, la semaine dernière quand j'ai repensé au Premier Minus Québécois François Legault que j'avais vu assister au match de mercredi des Canadiens de Montréal au Centre Bell, à la télévision. C'était un grand soir, ce match. C'était celui qu'il fallait gagner absolument pour accéder aux séries éliminatoires qui ont débuté ce week-end dans la LNH. Quand je l'ai vu dans la foule j'ai pensé tout de suite que ça nous porterait malchance. J'ai spontanément dit "Ah non !". Mais Montréal a gagné. 

Dans son premier mandat comme Premier Ministre de la province, j'étais des 7 sur 10 qui n'avaient pas voté pour lui. Mais je ne peux pas dire que j'étais entièrement contre les idées et projets de son parti par la suite. Une pandémie dans les jambes, on s'en est quand même assez bien sorti.  Ne serais-ce que pour départager les idiots, des gens sains. 

Je suis quand même des 6 sur 10 qui n'ont pas davantage voté pour lui pour le second mandat. Qui est une catastrophe. Je ne me rappelle pas avoir été d'accord une seule fois avec ses décisions, souvent empreintes d'une condescendance boomer et teintée d'une certaine arrogance affairiste, depuis. Chaque mois m'amène un nouveau membre de son parti que je n'arrive pas à respecter. Fitzgibbons, Jolin-Barrette, Guilbault, Girard, Caire, sans parler de Kilmangedugâteau Duranceau. Prénom qui dit tout, déjà. Wach ! j'ai hâte à la débarque!

Elle est peut-être arrivée la semaine passée.

Ce gouvernement qui se présente comme un gouvernement d'hommes d'affaires et de comptables, a vu l'agence de notation financière Standard & Poor's décoter la cote de crédit du Québec, la faisant passer de AA- à A+. Ce que personne n'a vu venir.

Alors qu'on annonce des milliards pour un 3e lien pas encore finement pensé, mais qui aiderait à faire voter, qu'on projette des emprunts importants à placer en électricité et un autre emprunt de près de 70 milliards sur deux ans pour toute sortes de choses. N'entendiez vous pas la sirène du train, les comptables ?

Depuis, je ne cesse de revoir Legault, diverti par Youpi dans la foule, semblant au dessus de ses affaires. 

Qui allait dès le lendemain matin s'étouffer dans son café. 

Bouleversé. 

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