dimanche 14 janvier 2024

Le Cinéma Du Look

De 1981 à 1994, un mouvement de cinéma Français a pris vie sur grand écran. Séduisant grand public mais pas toujours les critiques avant de s'éteindre tel un feu de Bengale. Ce court phénomène s'est appelé le cinéma du look.

Le court mouvement représentait seulement 10 films tournés par seulement 3 réalisateurs Français. 

Jean-Jacques Beineix, Leos Carax et Luc Besson. 

J'ai beaucoup aimé le premier, je possède son 3ème film. J'aime encore plus le second, j'ai ses 3 films compris dans le mouvement que je considères trilogie de la poésie urbaine. Le reste de ses films est dur à trouver sur notre continent. Luc Besson, je ne l'aime tout simplement pas. Ne l'ai jamais, jamais aimé. Le Grand Bleu m'avait surpris par moment, je ne crois pas avoir vu Subway au complet mais c'était probablement les deux seuls que j'aurais la curiosité de visiter/revisiter. J'ai vu Nikita, mais ça ne m'avait aucunement plu. Ce qui plait à Besson, ne me plait pas. Je n'aime pas ses choix. Il semble avoir la maturité d'un garçon de 16 ans. Le temps m'a un peu donné raison là-dessus, au moins 6 personnes l'ont accusé d'inconduites sexuelles, dont il a été innocenté, mais bon, la France défend aussi Depardieu, alors il ne faut pas 100% s'étonner. Besson je le méprise, pour être honnête.

C'est le critique de La Revue du Cinéma, Raphaël Bassan, qui a ainsi nommé ce mouvement regroupant ces 3 visionnaires cinématographiques. Il s'en moquait un peu en parlant de ses jeunes obsédés par le visuel (c'est du cinéma Ducon!) il parlait donc du cinéma du look. Parce que concentré sur le look. 

Les 10 films avaient en commun de jeter un regard critique sur la France de François Mitterand, en défranchisant la jeunesse française marginalisée, filmant ceux et celles qui tombaient en amour, les brisé(e)s comme les bien dans leur peau. Filmant aussi les relations toxiques tout en infusant plusieurs références populaires et une demi-tonne de trouvailles visuelles, que ce soit la cinématographie, le mouvement, la scénarisation, la caractérisation de personnages compliqués ou étranges, ou une utilisation de la musique qui allait rejoindre beaucoup la masse. La mise en scène était aussi originale et le regard, continuellement axé sur le style et l'aspect visuel de la présentation. Christophe Lambert les cheveux javelisés presque blancs un néon en main. Un chalet en feu sur une plage. Une course chorégraphie dans la nuit sur du Bowie

Le style offert avait davantage des parfums de nouvel Hollywood que de la Nouvelle Vague Française et c'est ce qui pouvait insulter quelques vieux critiques. Qui ne trouvait pas ça "Français".  Les couleurs étaient fortes, parfois impressionnistes, des éclats de lumière issus de drôles de lieux étaient aussi présentés. Beaucoup de points de vue personnels de certains personnages également. Les genres se croisaient souvent. Le thriller avec Beineix pour
Diva. L'érotisme pour 37 Degrés 2, Le Matin. La science-fiction pour Carax et Mauvais Sang. Les films d'actions (de là mon dédain aussi) chez Besson. 

Par l'esthétique de ce que Besson tournait, et les fusils qu'il incluait dans ses films, il n'est pas étonnant qu'il eût été le cinéaste des trois qui a vu les portes d'Hollywood s'ouvrir pour lui. Les États-Unis ont repris ses films et l'ont fait tourner là-bas. La romance est aussi élément clef des intrigues. Rien n'est simple dans les amours chez Leos Carax. Nikita fraye avec des instables en affaires, mais flanche pour un plus normal. Besson n'y comprend rien à l'amour. Beineix abuse du nu. L'amour, chez les trois, est toujours dans une forme d'impasse. 

Un autre ingrédient du cinéma du Look sont les actes de rebellions de la part de personnages en marge de la société. Vivant dans des appartements assez peu meublés, travaillant de petit boulots si ils travaillent tout court, vivant même carrément de manière souterraine. La transgression est partout. On embrasse le chaos. 

À partir de 1994, Beineix, après
un presque documentaire déguisé en fiction, devenait cinéaste de documentaires. Carax, le plus abstrait de trois, mais mon préféré, celui à qui j'aurais donné les clefs pour tourner la vie de David Bowie, a divisé tout le monde avec les inégaux Pola X et Holy Motors . Et Besson était recruté par les États-Unis. 

Quels étaient ces 10 films ?

De Beineix:

Diva. 1981. 

La Lune Dans le Canniveau. 1983. Un docker est obsédé par sa recherche de l'homme qui a violé sa soeur. Sa quête le place au coeur d'un triangle amoureux lui-même qui met sa vie en péril. On reproche au film une cinématographie trop léchée et un sens aigu de l'esthérique. Idiotie. C'est tout ce qu'on admire chez David Lynch. 


  37 Degrés 2, Le Matin. 1986. J'avais 14 ans. Adapté du roman de Philippe Dijan, l'histoire passionnelle de la liaison amoureuse entre un écrivain qui n'arrive pas à publier et une femme impulsive et instable (intense Béatrice Dalle), a vite fait écho dans le désordre que peut être nos vies sentimentales, adolescents. Gagnera l'Oscar du meilleur film étranger. Baiser de la mort de Beineix.

De Carax:

Boy Meets Girl. 1984.

Mauvais Sang. 1986.

Les Amants du Pont-Neuf. 1991.

De Besson:

Subway. 1985. Un homme se réfugie dans le métro parisien après avoir mis la main sur des documents compromettants. Il y découvre une population underground avec laquelle il tente de former un groupe et tisse des realtions avec la femme de sa victime.

Le Grand Bleu. 1988. Rivalités entre plongeurs, prétexte à tourner de somptueuses images sous marines. 

Nikita. 1990. Espionnage et action, une femme ayant tué un policier est recrutée par les autorités afin de faire des missions spéciales précises.

Léon. 1994. Un tueur à gage se lie d'amitié avec une voisine de 12 ans, à New York, devenue orpheline. 

Jean Reno y reprend le personnage aimé du "nettoyeur" du film Nikita. Tourné aux États-Unis.

Leur cinéma a ouvert les portes et les yeux à des cinéastes du futur.

Comme Jean-Pierre Jeunet, Gaspar Noé ou Xavier Gens

Bertrand Blier, avec son Merci, La Vie, était de cette sauce, mais Blier avait assurément influencé ces 3 là, d'emblée, d'abord. 

La flamme du cinéma du look s'éteignait il y a 30 ans, cette année. 

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