mardi 10 mars 2015

Parler à une Chaise Vide

Pendant la semaine de relâche, la belle et moi, sans enfants un soir, sommes allés voir le dernier film de Clint Eatswood.

Vous vous rappelez du pauvre Clint et de sa pauvre discussion avec une chaise vide à la convention des Républicains en 2012? Gauche et pathétique.
Il faisait alors affreusement ses 82 ans.

Il en a aujourd'hui, 84. 85, fin mai. Et sa réalisation d'American Sniper n'a rien à envier au talent de jeunes boucs de 29 ans. Le vieux Clint a fait du sacré bon boulot. Sans trop en révéler, la dernière scène en sol ennemi est assez ahurissante et on s'y croit sur place. Dans le chaos d'une tempête de sable et prisonnier d'une sale guerre. 

Toutes les guerres sont sales. Le cinéma nous les rends de plus en plus réelles. mais même les scènes dites "vraies" ne seront jamais aussi horrifiantes que celles qui vivent ceux qui s'y trouvent en guerre.
Les films de guerres sont les nouveaux western au cinéma hollywoodien et il n'est pas étonnant de voir Eastwood y baigner comme un dauphin dans l'eau.

Mon attention a surtout été portée pendant le film, justement, sur ceux qui vivent ces guerres. Pas sur le tireur lui-même qui m'intéressait assez peu. Il faisait son travail, et bien en plus.  Non, ce qui a gobé presque toute mon attention c'est tout le mal que ce tireur d'élite des États-Unis propageait autour de lui. Ce même tireur que l'on qualifie de "légende" et de "héros" pendant plus de deux heures.

Pas un mal totalement volontaire. En fait oui, volontaire, mais pas complètement conscient. 

J'ai pensé à la femme du tireur d'élite presque tout le film. NOoooooon pas comme ça...bande de pervers...J'ai pensé à ces femmes qui souffrent par choix. Mais un choix pas complètement rationnel. Par choix amoureux d'abord. On sait qu'il est difficile de demander à un coeur de raisonner. En amour, on  ferait tout pour l'être désiré. Les femmes sont meilleures que nous là-dessus. Cette pauvre femme, je me suis surpris à vouloir tout le film qu'elle le quitte. ce soldat "légende". À un moment, elle le menace que si il repart pour un troisième séjour en sol hostile, elle n'y sera plus. Plan suivant: il y retourne. C'était presque traité comme un élément de comédie, plutôt machiste même. C'est elle qui vit l'angoisse de se savoir veuve avant l'heure. Qui pleure à chaque conversation au téléphone. Qui s'inquiète pour un premier bébé, puis pour un second. Enfants qu'elle élève toute seule de toute façon. Monsieur est occupé à "être un héros".

L'angoisse laissée derrière n'est rien par rapport à l'angoisse sur le terrain me direz vous et vous aurez raison. Mais ELLE PEUT ÊTRE ÉVITÉE. Et c'est là que Clint a besoin de tout son petit change pour me convaincre que ce tireur est un "héros".

Non. Je ne m'assois pas dans ce siège de spectateur.
Si c'est ça que veut me dire Clint, la chaise est encore vide.

Ce type de héros c'est une construction de l'esprit. Pour faire oublier qu'on sacrifie une belle jeunesse en sol hostile. Pour se faire croire que la guerre n'est pas tout le temps sale. Elle EST tout le temps sale. Au cinéma elle est de plus en plus vraie, cette guerre. Mais jamais autant que les cauchemars que ces soldats ramènent avec eux. Le cauchemar des dernières scènes du film nous le rappelle.

Rien n'est "beau" dans ce film. Je n'ai pas vu de "héros". J'ai besoin d'être convaincu que ce type est un héros. Il ne fait pas que vivre un calever, il gangrène toute la vie de sa famille. Son travail est de briser des vies. Au sens propre comme figuré.  Je ne l'ai pas haï, non pas du tout, il faut de la chair à canon pour aller au front. Mais en faire une "légende"...Je n'ai pas passé près de verser une larme quand le malheur frappe. CE SONT DES SOLDATS. Mourir trop tôt et brutalement fait parti des conditions de travail. Un sacré sale travail. Une merde de travail. Je peine à vénérer la merde. Désolé.

Clint n'avait pas besoin de me convaincre que la guerre ne fait que des perdants.
Il prêchait au converti.

En somme, il parlait encore à une chaise vide.

Mais comme mon attention était surtout ailleurs. sur la femme de la légende et leurs enfants, Clint a tout de même réussi à me parler. C'était peut-être même son but.Sienna Miller pleure plus d'une fois au téléphone. Clint a peut-être même réussi à parler un une demie tonne de jeunes femmes prêtes à tomber en amour avec un soldat.

Peut-être qu'il faudrait pas, serait alors son message.

C'est celui que j'ai retenu.

À ma fille je dirais "Ne tombe pas en amour avec un soldat"
et à mon fils je dirais "Ne sois jamais soldat"

Et comme toute les guerres du monde entier.

La portée de mes propos ne seraient aucunement garantie.

Clinton Jr Eastwood est un fier républicain. Ça m'étonnerait qu'il ait surtout voulu souligner les dommages collatéraux de l'implication militaire Étatstunienne.

Mais il l'a aussi un peu fait dans son dernier film.
L'histoire de son soldat l'obligeait.

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