vendredi 29 juin 2018

Hey! Graffiteurs!

C'est un appel!

En 2015, peut-être avant, on annonçait, dans l'arrondissement de Montréal-Nord, le projet d'une murale, érigée dans le cadre des projets du centenaire de l'endroit. On échangeait avec des représentants de plusieurs organismes nord-montréalais et avec les citoyens afin de plaire à tous et de faire naître un projet vraiment communautaire. 

Très vite, un nom est trop souvent revenu: Fredy Vilanueva. La murale en serait une en honneur au petit gars tué par balle perdue en 2008. 

Hier, on a annoncé que le projet, en esquisse depuis 3 ans, a maintenant changé. On rénovera plutôt le parc Henri-Bourrassa. Et on crééra une onirique place de l'espoir. La mairesse était nerveuse à la radio pour en parler. Elle savait que ça ferait grincer des dents.

Murale aux chiottes.

Vous savez ce que ça veut dire, graffiteurs. 

Aux armes!

C'était la méthode bureaucratique, on passe par le comité de la mairesse, on étudie la chose, on marine la soupe.

Voilà! on a essayé par la voie traditionnelle. Il ne faut jamais trop compter sur nos élus.

La murale est aux chiottes.

C'est le signal de maintenant la faire de nuit. En une seule nuit. Bien coordonnée. Du Banksy sans Banksy. Je passe 4 jours sur 7 en face du parc où il a été tué. Deux fois par jour du lundi au jeudi.  Vers 5h45 le matin et en soirée, au retour. Entre 17h30 et 20h30. Presque chaque fois, je me joue la scène de sa mort. Une intervention sur son frère, la vraie crapule, celui qu'il faille surveiller. Une escalade verbale, une mêlée, un policier qui prend peur. Le coup qui part. Un corps d'ado qui tombe au sol. Le plus timide du lot. Le coup est parti du fusil du policier le plus emmerdeur du secteur. Tous les chauffeurs de taxi le connaissait. Ce policier était reconnu comme "baveux".  Fredy a reçu l'impact. Il avait l'âge de mon fils.

J'ai déjà la murale en tête. J’magine un mur d'édifice, de building, de blocs de logements, sur lequel, son visage trop connu, devrait apparaître. Cette route, sur Henri-Bourassa est pleine de logements terriblements laids. Sur lesquels le simple visage de Fredy Vilanueva rappellerait à la fois une triste erreur, mais aussi la fleur de l'âge. Quelque chose de beau. Fredy sera au moins mort beau.

Ça sent la bavure qu'on ne voulait pas exposer à vie, de la part de la municipalité. Peut-être même que le policier impuni y a mis du sien et n'a pas voulu y voir un rappel de ce qui restera pour lui aussi, un certain traumatisme.

Jean-Loup Lapointe change de poids si il circule à nouveau dans Montréal-Nord. Ce qu'il ne ferait plus jamais.
Si moi, nullement impliqué dans tous ça, me rappelle tout ça en ne faisant que circuler en voiture, intersection Pascal et Rolland, imaginez ce que se rappellent Jean-Loup Lapointe, Stéphanie Pilotte, Dany Villanueva, Jeffrey Sagor Metellus, Denis Meas, Yenwood Anthony Clavasquin, Jonathan Senatus, Martha Villanueva, Lilibeth Padilla Guerra, Gerardo Escobar, Samuel Medeiros et Mlle Cruz, tous présents ce triste 9 août 2008, tous témoins et/ou acteurs du grave incident.

Graffiteurs! Unissez vous! Montréal fait de splendides graffitis. Dessinez nous Fredy.

Dessinez nous un hommage à un dommage collatéral sociétaire.

Je ne sais plus qui disait "on reconnait la santé d'une ville à ses graffitis".

Prenez une nuit complète, car ça devra se faire vite (mais bien), un matin trop tôt, en silence, afin de communier avec son âme et dessinez nous Fredy Villanueva.

Parce que rien n'est plus vrai: Villanueva: nouvelle ville.

Montréal-Nord n'est plus tout à fait la même ville depuis l'été 2008.

J'aimerais tant avoir la surprise de découvrir une murale offrant un hommage à Fredy un matin vers 5h45.

Si on avait le culot de vouloir l'effacer, on remettrait la ville à feu et à sang. Et on confirmerait qu'on veut effacer ce nom de la région.

Il ne faut pas passer par la ville. Il faut passer par la nuit.
En toute liberté.

On vous as parlé hier, graffiteurs.
À vous de nous épater. Encore et toujours.

C'est une commande qu'on vous passait.

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