dimanche 11 août 2013

1975: Six Princes de la Pellicule

Françis avait fondé avec son ami George en 1969 une compagnie de film. Françis avait alors 30 ans, George, 5 de moins. Plus expérimenté, Françis produirait, organiserait, tandis que George réaliserait.

Mais l'entreprise est si peu profitable que Françis doit renflouer les coffres en acceptant des contrats de scénariste ou de réalisation. Il est aussitôt Oscarisé autant pour les écrits que pour les tours de manivelle derrière la caméra. Le gigantesque succès de cette superproduction ramène Françis à l'indépendance et ressuscite ses rêves de conquête d'Hollywood. George est aussi inspiré et veut faire un film sur le Vietnam. Il pense à adapter Heart of Darkness de Joseph Conrad.
Françis est si bien coté qu'il a carte blanche pour une suite à son grand film puis se mérite le droit d'en tourner un autre tout à fait personnel dans l'esprit des récents scandale d'écoute du Watergate et qu'il a scénarisé lui-même. Ses deux films se voient nommés dans la catégorie du meilleur film aux Oscars en 1975, ce qui fait de Françis le premier cinéaste et l'un des deux seuls (avec Steven Sod., 26 ans plus tard) à avoir réalisé deux films concourant dans cette catégorie la même année. Il gagnera la précieuse statuette.

Françis s'attaquera donc alors à Heart of Darkness qui, à l'origine, doit avoir comme réalisateur son ami George. Mais en 1975, George a la tête ailleurs, les deux se brouillent. George travaille beaucoup son projet d'Opéra Spatial, pas complètement étranger au Vietnam avec ses petits rebelles sous équipés contre le géant et tout puissant chef impérial.

En 1975, Françis entrera dans une production démentielle au cœur de la jungle des Philippines, engloutissant plus de 30 millions de dollars d'un budget initialement fixé à 16, s'étalant sur 18 mois de tournage et nécessitant l'impression de plusieurs dizaines de kilomètres de pellicule.
Le dictateur Marcos accordera son soutien à la production, prêtant ses hélicoptères et ses avions de chasse destinés à la traque des rebelles. Les appareils seront visibles dans la célèbre séquence du bombardement d'un village sur l'air de la Chevauchée des Walkyries de l'opéra Die Walküre de Wagner. À la base, le rôle de Willard est attribué à Harvey Keitel avec lequel Françis commence le tournage. Mais suite à plusieurs différends, Keitel est remercié au profit de Martin Sheen. Les catastrophes s'enchaînent sur le plateau : un typhon ravage le décor, Sheen est victime d'une crise cardiaque et Marlon Brando, qui avait promis de perdre du poids, débarque sur le tournage obèse, sous la dépendance de stupéfiants et en ayant à peine lu le script. La star ignore totalement son texte.
Effrayé à l'idée de devoir interrompre son travail, Françis dissimule l'état de santé de Sheen aux producteurs. Il fait aussi venir le frère de Sheen des États-Unis durant sa convalescence afin d'en faire une doublure pour des plans de dos. Il décide aussi de filmer Brando dans la pénombre et en fait un personnage à la limite du visible. À la fin de l'année 1976, Françis fera un premier retour aux États-Unis avec des centaines d'heures d'images qui s'avèreront être totalement inutilisables. Mais 4 ans plus tard, le produit fini sera grandiose. Françis ne se relévera jamais complètement de ce difficile acouchement.

George pour sa part travaille depuis 1971 à son script spatial qui conjugue quête initiatique, mondes merveilleux, mythologie et combats spatiaux. Les producteurs croient peu à ce film pour enfant et l'époque ne se prête pas du tout aux films de science-fiction, mais comme George vient de faire faire beaucoup de sous au studio avec une réalisation sentie et appréciée, on le laisse filer avec son rêve. Au lieu de renégocier son salaire à la hausse pour la réalisation du film spatial, il a l'éclair de génie de plutôt se prévaloir des droits et des recettes exclusives de potentielles suites au film ainsi que de tous les droits de commercialisation des produits dérivés de son film. Les producteurs sont morts de rire, la dernière fois que des produits dérivés ont été mis sur le marché, c'était 8 ans avant pour Doctor Doolittle et ce fût un gouffre financier. Pas de problème, George, Deal with it! D'autant plus que des suites ne sont pas forcément des succès garanties non plus. Malgré Françis.


George réussira le plus gros coup de sa carrière.

Le casting de son film se fait en 1975 en parrallèle avec celui du film d'un ami, Brian. Celui-ci vient de connaitre un gros succès avec un film éclaté. Brian est maintenant propriétaire des droits d'adaptation du premier roman d'un auteur de 26 ans, Stephen. Il considérera Carrie Fisher pour le rôle tître et Sissy, la femme de son directeur artistique, auditionne aussi pour le rôle de Princesse Léa pour George. La plupart des comédiens sous la tutelle de Brian seront aussi considérés par George pour son film spatial. Le blond garçon dans Carrie a failli être Annikkin Starkiller/Luke Skywalker.
Brian prend plusieurs libertés avec l'histoire originale et engage finalement la femme de son directeur artistique dans le rôle principal alors qu'il avait arrêté son choix sur quelqu'un d'autre déjà. Le film sera un grand succès, portera une attention sur un jeune auteur de roman d'horreur jusqu'alors inconnu et deviendra aussi un des films favoris à regarder les week-ends d'Halloween. 
Brian invitera aussi un ami, Steven, sur son plateau sous prétexte qu'il y a beaucoup de jolies filles. Justement, Steven se magasine une amoureuse. Après avoir demandé à presque tout le monde, c'est Amy Irving qui prend son cœur. Laissons Steven et Amy avoir un enfant, nous y reviendrons à lui.

Brian présente un ami écrivain, Paul, à son ami réalisateur Marty. Paul a un scénario semi-autobiographique à lui présenter. Paul a écrit son histoire en cinq jours à Los Angeles où il avait été rejeté par sa copine. Pendant des semaines, couchant dans sa voiture, il a fréquenté des cinémas pornos et développé une obsession morbide pour les armes à feu. Robert Mulligan devait tourner le film avec Jeff Bridges dans le rôle titre mais Paul tient à ce que ce soit Marty qui en soit le réalisateur. Et Bobby D dans le rôle de Travis.
Agée de tout juste 12 ans, la jeune Jodie doit être remplacée par sa soeur de 21 ans pour des scènes jugées trop inconvenantes pour son âge.

Ce chef d'oeuvre sur la solitude et l'abîme de la dérive mentale dans une ville à la violence sourde deviendra un classique de la culture étatsunienne. Il fut très critiqué pour sa violence. Pourtant, seuls 4 personnages seront tués. L'action délocalisée de Los Angeles à New York est aussi, de jour, le siège du tournage d'un autre pote qui partage la même directrice de casting, Juliet Taylor.

Cet ami s'appelle Woody.

Celui-là donne moins dans la violence que dans la comédie. Sur les écrans de 1975 est déjà son film probablement le plus drôle. Il n'a fait que de l'humour jusqu'à maintenant ce qui travesti une nature beaucoup plus profonde chez l'auteur grands amateurs de Fellini, Godard et Bergman. En 1975, l'humoriste qui fait toujours des monologues sur scène, écrira et tournera l'histoire de sa relation amoureuse avec l'actrice et partenaire Diane. Et il le racontera d'un manière hilarante et triste à la fois. D'une manière si fantastique qu'il raflera 4 statuettes aux Oscars au printemps suivant, soit celles du meilleur film, de la meilleure réalisation, du meilleur scénario original et de la meilleure actrice dans un premier rôle.

Le film qui aura failli s'appeller It Had to Be Jew, Rollercoaster Named Desire, Me & My Goy, Anxiety et Alvy & Me aura comme titre final le nom de la femme désirée par le personnage de Woody, qui est en fait le vrai nom de famille de l'actrice qui joue le personnage ainsi que le prénom que sa mère lui donnait, enfant.

Woody, Marty & Françis se réuniraient des années plus tard pour un témoignage d'amour à New York.

Le plus jeune de ces princes était assurément le plus éloigné de Woody, qui lui était de toute façon le plus âgé. Mais là où Steven et Woody se rejoignaient était dans la gourmandise du cinéma. Il le dévorait et le connaissait sur le bout de leurs doigts. Mais une teinte d'enfant bléssé de l'absence paternelle existe chez Steven. Il écoutera toute sa vie l'enfant en lui afin de nourrir son inspiration pour ses tournages.

Au printemps 1975, Steven avait lancé un film de requin qui avait fait sensation. Son comédien principal, Richard, lui avait été suggéré par George qui venait de travailler avec en 1973. Richard avait d'abord refusé puis, après avoir vu sa propre performance sur grand écran dans The Apprenticeship Of Duddy Kravitz, convaincu qu'il avait été si mauvais qu'il ne retravaillerait plus jamais, s'était ravisé pour accepter le rôle que voulait lui confier Steven dans son film de requin.

Le film de Steven allait être le plus payant de toute l'histoire du cinéma effrayant les nageurs du monde entier en ne montrant jamais, ou presque, le dit requin.

Son film garderait ce titre pendant 23 mois.
Le temps que George nous présente sa guerre spatiale, ses acteurs inconnus, ce drôle de chien sur deux pattes et ses deux robots.

Quand George avait présenté en avant-première son film dans les étoiles à ses amis (tous sauf Woody, plus sauvage que les autres de toute façon) Ils avaient presque tous condamné ses choix. Françis lui avait reproché de commencer son film avec un prologue à lire interminable et compliqué. Marty & Brian avaient souligné qu'on ne présente pas un personnage aussi important que celui de Darth Vader en le cadrant comme il le faisait de si loin.

Seul Steven allait dire : "Les enfants vont tripper!"

Oui.

Grâce à ses 6 princes d'Hollywood, nous allions voir le monde différemment.

Grâce à cette année pleine d'élan, 1975 et ses coeurs de grands enfants plein de talents, on se coucherait la nuit avec déjà la tête pleine de rêves.

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