lundi 23 mai 2011

Vivre avec Philip Roth

Phillip Roth est un très solide écrivain.

Il est de cette race de juif des États-Unis qui aspire à écrire l'ULTIME roman.
Mailer, Bellow, Kosinski, Auster, Chabon, Safran Foer, Mamet, Miller, Simon, Singer, Stein, West, ont tous aspiré à écrire "Le Grand Roman d'Amérique".

Roth y est presque parvenu avec American Pastoral.  Il a certes attiré l'attention très favorablement avec son premier effort Goodbye, Columbus en 1959. Un livre aussi drôle que mordant et auto-dérisoire. 10 ans plus tard il devient une superstar avec Portnoy's Complaint, un hilarant monologue psychanalytique où le personnage principal, excessivement autobiographique, ne mâche pas ses mots, frôlant souvent l'extrême vulgarité et étant démesurément sexuel. Ses livres ont remportés plus d'une vingtaine de prix littéraire. American Pastoral, le Pullitzer en 1997. Ses livres mettant en vedette son alter ego, Nathan Zuckerman, valent tous la peine d'être lus. Idéalement dans l'ordre. The Ghost Writer (1979), Zuckerman Unbound (1981), The Anatomy Lesson (1983), The Prague Orgy (1985), The Counterlife (1986), American Pastoral (1997), I Married a Communist (1998),  The Human Stain (2000) et Exit Ghost (2007). Le récit Patrimony(1991) , sur sa relation avec son père, est aussi excessivement touchant et drôle.

 Il est baveux, drôle, critique, irrévérencieux, lyrique et souvent tout simplement brillant.

Vivre avec ce Philip Roth là c'est très cool.
Mais le Philip Roth intime est d'une cruauté assez intense.

Parlez-en à Claire Bloom, actrice anglaise qui fût son épouse de 1990 à 1995.

Elle était une amie de Roth depuis 1975. Ils étaient même légèrement plus qu'"amis". Avant le mariage, Roth l'avait rejoint en Angleterre où Bloom y donnait des conférences sur les femmes dans les oeuvres de Shakespeare avec beaucoup de succès. Roth avait alors des problèmes aux artères et fût victime d'une opération ratée au genou. Il dormait mal et devenait erratique à cause de la drogue Halcion que ses traitements d'hopitaux exigaient. Écoeuré de Londres, il est revenu à New York afin d'y écrire son prochain roman.
Quand Bloom le rejoint après sa tournée, Roth l'a accueillie comme une étrangère et lui a remis le livre Deception qu'il venait de terminer. Agité et distant il voulait lui faire lire avant publication. De toute évidence, la famille dysfonctionnelle, voire grotesque, dont traite le livre était celle de Claire Bloom. La femme du personnage principal est une actrice du nom de "Claire" dont la principale qualité est d'être ennuyeuse. La réaction légitime de Bloom fût d'être insultée, bléssée, et a demandé que son nom soit au moins changé. Roth a tenté de l'acheter avec de très coûteux bijoux mais a finalement changé le nom du personnage.
En janvier 1990, Bloom demande quand même à Roth de l'épouser. En avril ils devenaient mari et femme ce qui représentait beaucoup pour Claire Bloom. Toutefois, dans l'excitation du moment, Bloom a signé une entente pré-nuptiale qu'elle n'avait pas lue rédigée par l'un des plus grands cyniques d'Amérique. Roth avait écrit qu'il pouvait divorcer en tout temps et ne devoir absolument rien à son épouse. L'avocat de Bloom dira plus tard qu'il s'agissait de l'entente pré-nuptiale la plus brutale qu'il eut lu dans sa vie.

Incapable de supporter la fille de Claire, Roth a souhaité que ses droits de visite se limitent à une semaine par année. Bloom n'en a jamais parlé à sa fille mais a flirté avec l'idée d'acheter un chalet en Italie comme "terrain neutre pour tout le monde". Roth a alors menacé de quitter l'union si l'achat avait lieu.

Quand Operation Shylock n'a pas reçu les éloges que Roth avait anticipé il est tombé en dépréssion et est entré en clinique de psychiatrie. Lors d'une visite de Bloom, il avait listé tous les irritants que celle-ci lui occasionnait. Comme regarder sa montre trop souvent, chanter tout bas pour soi-même et autres enfantillages du genre.

À son retour à l'appartement Roth la payait pour qu'elle y soit plus sporadiquement.

Roth, par un habile jeu de manipulation mentale a tenté à maintes reprises de faire faire ou de faire dire des choses à Bloom afin de l'incriminer et de lui donner des raisons de se divorcer. Ce qu'il demandera assez rapidement. Il enregistre ses conversatioins avec elle au téléphone. Il fait usafe de techniques de chantage en utilisant les amis de Bloom et avec la ferme intention de baiser hors du lit conjugal.

Contre l'avis de son avocat, Bloom, qui avait tout essayé afin de sauver leur mariage et qui ne voulait pas faire de vagues, a accepté la modique somme de 100 000$ pour que le divorce se finalise.

Ça ne s'arrêterait toutefois pas là. Roth lui demanderait de retourner absolument tout les cadeaux qu'il avait pu lui donner depuis qu'ils étaient mariés, exigeant un tarif de 150$ de l'heure pour toutes les lectures de scénarios qu'il avait fait pour elle en plus de lui demander la somme hallucinante de 62 (!?!) milliards de dollars pour ne pas avoir honoré des "ententes" pré-nuptiales.

Bien entendu Bloom ne pairea pas l'entièreté des montants exigés mais paiera quand même d'importantes sommes à Roth faute d'avoir lu intelligement l'entente pré-nuptiale qu'il avait rédigé.

Bloom a accepté des rôles ingrats dans des soaps Étatsuniens et dans Daylight avec Sylvester Stallone afin d'arrondir ses fins de mois, et être en mesure de payer ses anti-déprésseurs.

Il vient de rafler le Man Booker International Prize pour l'ensemble de son oeuvre.

Le choix ne fût pas unanime parmi les juges.

Roth, l'auteur, est un géant avec lequel il fait quelquefois bon vivre.
Roth, l'Homme, est une punaise.
Qu'il trinque seul au bar.

3 commentaires:

Saumane a dit...

Détails intéressants et peu connus sur les petits côtés d'un grand homme, systématiquement louangé dans les principaux sites accessibles sur Internet. On aurait besoin d'une biographie critique et détaillée de cet auteur.

Bucephale a dit...

On aimerait savoir d'où viennent ces informations et si elles sont crédibles.

Jones a dit...

The Guardian, 3 octobre 1998
The New York Times, 17 septembre, 1996
Scholarsanddrogues.com, 26 janvier, 2009
Entre autres sources...