vendredi 14 avril 2017

Les Expos de Montréal

Le baseball était bien vivant à Montréal depuis 1897. Les Royaux sont achetés par les Dodgers de Brooklyn en 1939 et deviennent le club école de Triple-A de l'organisation. Ce sera avec eux que Jackie Robinson brillera en brisant les frontières raciales de l'époque.

En 1962, la Ligue Nationale de Baseball annonce un projet d'expansion, mais Montréal s'y prend trop tard. Ce ne sera que 5 ans plus tard. aidé par Walter O'Malley, propriétaires des Dodgers et qui connaissait donc très bien Montréal, que la Ligue acceptera leur candidature pour un club. Le tout premier club canadien de baseball majeur. Impossible de prendre le nom des Royals puisque Kansas City le possède déjà, on choisit donc Expos en l'honneur de l'Expo 1967, si populaire dans les mémoires collectives. C'est de plus, un nom facilement bilingue. On jouera au Parc Jarry temporairement, avec objectif de se relocaliser deux ans plus tard. Les Padres de San Diego sont aussi acceptés la même année, en 1969. Ça coûtera 10 millions aux deux organisations pour entrer dans la grande Ligue.

Le premier match est gagné 11-10 contre les Mets à New York. Le premier match à domicile aussi 8-7. vs les Cardinals de St-Louis, au parc Jarry. Ma grand-mère maternelle devient si amoureuse de Rusty Staub qu'elle se teindra en rousse pour le reste de sa vie. Staub sera le représentant des Expos au match des étoiles pour les trois premières saisons. Claude Raymond vient terminer sa carrière à Montréal à partir de 1972, et devient le premier joueur francophone du seul club canadien. Bill Stoneman est fascinant comme lanceur lançant deux matchs sans points ni coups sûrs entre 1969 et 1972.

Lors de leur 10 premières saisons, Montréal ne réussit pas à en obtenir une seule au-dessus de .500. Terminant continuellement 5ème ou 6ème de la division (de 6 équipes). Steve Rogers et un jeune Gary Carter se démarquent toutefois brillamment dans le club.

Les Expos ne devaient pas rester plus tard qu'en 1971 au Parc Jarry. Le club perd beaucoup de son public avec des saisons perdantes et l'endroit n'est pas complètement "professionnel" pour la grande ligue. En 1976, Charles Bronfman, propriétaire des Expos, menace de déménager et d'amener les Expos avec lui si le PQ prend le pouvoir. Il se guérit lui-même de sa sénilité quand le PQ prend le pouvoir, ce qui coïncide avec l'arrivée des Expos au Stade Olympique. 57 592 spectateurs honorent le premier match au Stade. Après une première mascotte catastrophique (et attaquée par un parent apeuré), on se tourne vers une mascotte créée par la même artiste qui avait créé la mascotte des Phillies, ancienne créatrice de Muppets. Dick Williams, ancien entraîneur des finalistes jeunes Red Sox de 1967 et qui avait aussi gagné deux séries mondiales à la barre des A's d'Oakland en 1972 et 1973 sera le premier entraîneur des Expos du Stade Olympique. Sous Williams, Montréal obtient sa première saison gagnante en 1979. Terminant deuxième, 2 matchs derrière les Pirates de Pittsburgh. Le public répond massivement et commence 5 ans de parfaite harmonie avec ses "zamours". 2 millions de spectateurs les accourt par année.

En 1980, Montréal gagne 4 matchs de moins que l'année précédente mais termine cruellement à un seul match du championnat, derrière Philadelphie (qui seront champions du monde au final).  Il faut attendre au tout dernier week-end d'activités pour connaître l'issue finale du championnat.
En 1981, Charlie Lea lance le 3ème match sans points ni coups sûrs de l'organisation contre San Francisco. Le club est excellent mais ne joue pas à la hauteur de ce qu'il devrait avec de jeunes Andre Dawson, Tim Raines, Bill Gullickson, et toujours Steve Rogers et Gary Carter au sommet de leur forme. Jim Fanning remplace Dick Williams en fin de saison et en raison de la grève qui sévira, il y aura exceptionnellement (alors) 4 clubs de la Ligue Nationale qui se qualifieront pour les séries.  Montréal termine premier dans la seconde moitié de saison et affrontera en séries les Phillies qui ont terminé premier dans la première moitié. Montréal les élimine dans les moments les plus excitants que j'ai vécu, enfant, à regarder ce club. M'est encore à l'esprit un Steve Rogers se tirant d'embarras dans un match à Philadelphie avec des coureurs aux extrémités et Mike Schmidt au bâton (à Philadelphie dans le match ultime).
Dans la seconde ronde, Montréal affrontera les Dodgers dans un 3 de 5. Montréal et L.A. se partagent un match chacun sur la côte Ouest. Les trois derniers matchs seront joués à Montréal. Les deux clubs se partagent encore un match, forçant la tenue d'un match décisif. C'est 1-1 en 9ème quand Jim Fanning choisit d'utiliser Steve Rogers, qui n'est pas un releveur, mais son meilleur lanceur, pour clôturer la manche. Après 2 retraits, le frappeur suppléant Rick Monday catapulte un lancer de Rogers de l'autre côté de la clôture et ça en sera fait des Expos. Ce sera leur seul flirt avec la Série Mondiale.

L'année suivante, Montréal accueille le match des étoiles du baseball, Carter, Dawson, Raines, Rodgers et Al Oliver y participeront. Montréal l'ignore alors, mais il s'agit du dernier grand moment de communion parfaite de baseball entre la ville et le sport. Montréal termine 3ème en 1982. Bill Virdon devient coach en 1983. Le club ne se distingue pas mieux. Malgré l'arrivée de la légende Pete Rose dans le club. Dès 1984, les gens ne vont plus voir les Expos au Stade. La chute est de 31%. Les salaires explosent au même moment dans le baseball. Gary Carter ne fait plus l'unanimité dans le vestiaire et il est échangé aux Mets en retour de Hubie Brooks, Mike Fitzgerald, Hermann Wenningham et Floyd Youmans. Carter ira gagner le championnat du monde avec les Mets en 1986.

L'argent tuera les Expos.

Buck Rodgers est le nouvel entraîneur des Zamours.
Andre Dawson quitte pour les Cubs où il gagnera le titre de joueur le plus utile à la Ligue.  Entre 1986 et 1991, Montréal est inégal et ne gagne que 4 matchs de plus qu'il n'en perd. Même si Tim Raines n'a jamais été meilleur, gagnant même un championnat des frappeurs. Les agents libres ne veulent pas venir jouer à Montréal. Le public n'est plus du tout au rendez-vous, malgré de superbes saisons comme en 1987. En 1989, on tente le tout pour le tout en allant chercher l'as lanceur Mark Langston à Seattle en retour du jeune Randy Johnson, qui passera à l'histoire avec les Mariners, sera récipiendaire du Cy Young, remis au meilleur lanceur de la Ligue, 5 fois,  et sera champion du monde en 2001 avec les Diamondbacks. Les Expos seront premier pendant 41 jours avant de faire patate et terminer 4ème. Bronfman se décourage et veut vendre le club. Les Expos sont le club ferme des champions ailleurs.

Buck Rodgers est remplacé par Tom Runnels qui s'aliène tout le monde en se présentant au camp d'entraînement en costume de général d'armée. Dennis Martinez devient le 13ème lanceur de l'histoire du baseball majeur à lancer un match parfait, contre les Dodgers, et Ron Hassey l'unique receveur à avoir été en poste pour 2 de ces rares matchs (l'autre étant pour le match parfait de Len Barker quand les 2 joueurs étaient des Indians de Cleveland). Pour le dernier mois de la saison, les Expos sont sans domicile fixe puisque le Stade Olympique se décompose et n'est plus jugé sécuritaire. Ça ne fait plus sérieux. Montréal termine 6ème de sa division et le taux de fréquentation au Stade est le plus bas jamais enregistré.

Pourtant, les débuts de Larry Walker (un rare joueur canadien), Delino DeShields, Marquis Grissom, Rondell White sont prometteurs. Felipe Alou, sage membre de l'organisation des Expos depuis longtemps, (si longtemps qu'il habite Laval), est promu gérant du club. On avait acquis des Pirates, son fils Moises, de Pittsburgh via un échange. Alou, père fera des miracles. Ses joueurs aussi.

Montréal termine 2ème à 9 matchs des Pirates en 1992. Puis deuxième encore, à trois matchs des Phillies l'année suivante. Pedro Martinez est maintenant aussi de l'alignement. Obtenu contre DeShields.

En 1994, les Expos sont la MEILLEURE ÉQUIPE DE TOUT LE BASEBALL MAJEUR. Les deux ligues confondues.

C'est aussi l'année du coït interrompu, les joueurs feront la grève, interrompant la saison avec deux mois à jouer, tuant le baseball à Montréal pour toujours.

Montréal survivra bien encore dix ans, mais dans l'absolu burlesque. Les proprios disent "Venez nous voir, on sera plus riche et on vous paiera des vedettes!", le public dit "Amenez nous des vedettes et on ira". Les deux arguments se tiennent. Mais un sport d'équipe si lent qui se vide tout le temps de son talent, faute d'argent. dans un Stade parfaitement vide, dans une ville qui a l'une des équipes les plus excitante, dont le sport d'équipe est le plus rapide au monde...Montréal n'est pas baseball toute la durée d'un été. C'est trop demander.
Les Expos joueront des matchs "locaux" en Amérique du Sud et auront comme proprio la Ligue elle-même lors de sa dernière année de vie.

Une honte.

La grève de 1994 ne passera jamais dans ma gorge. C'était l'année de la conquête. L'avarice assassinant le rêve.

Presque tout l'alignement de 1994 ira gagner ailleurs: Marquis Grissom, John Wetteland, Pedro Martinez, Rondell White, Moises Alou, Larry Walker, cette magique édition de 1994, fera sensation sous d'autres couleurs par la suite. Confirmant la perfection de ce club de 1994.

On parle beaucoup du retour des Expos ces temps-ci.
C'est un beau film terminé.

Dites vous qu'on a pas plus d'argent qu'en 1994.

Et qu'on voudra vous refiler la facture c'est certain.

Les multimilionnaires ne paient pas.
Ils délèguent la chose.

Le modèle d'affaires du baseball majeur n'est pas pour nous.
Ne tombons pas dans le piège.

Les Expos jouaient leur tout premier match au parc Jarry aujourd'hui, il y a 48 ans.

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