jeudi 2 mai 2024

Paul Auster (1947-2024)

Né à Newark, au New Jersey, en 1947, dans une famille d'origine juive, il graduera de Columbia University, diplôme en arts. 

Enfant, incapable d'avoir un crayon dans la foule face à son idole Willie Mays sur lequel il a envie d'écrire ce qu'il lui inspire, il traine un crayon avec lui un peu partout. Et l'utilise presque toujours. Dès ses 8 ans. À 23 ans, il choisit d'aller vivre à Paris où il y apprend davantage la langue française qu'il avait apprise aussi à l'Université, et où il traduira en français entre autre menus boulots. Il y vit avec l'auteure Lydia Davis. Retournant aux États-Unis en 1974, il réussit à faire publier de la poésie, des essais, des courtes nouvelles et adapte des écrits de Stéphane Mallarmé et Joseph Joubert. Lydia et lui convolent en justes noces, ont un fils, mais se séparent dès 1977. Il fera la rencontre de l'auteure Siri Hustvedt qu'il mariera aussi. Ils auront ensemble une fille. 

De nature solitaire, il écrit un récit mythique apellé
The Invention of Solitude, inspiré par le décès de son père. Qui fait écho à tous les solitaires de la terre. Qui sont très nombreux. Son premier récit est remarqué en 1982. On y apprend que son grand-père a été assassiné par son épouse qui a été acquittée plaidant la folie. Il se taille vite une niche distinctive dans le style qu'on appellera plus tard metafiction. L'auto-référentiel. Hasards & coïncidences se colmatent. Les sentiments de désastres imminents sont fréquents. L'obsession omniprésente chez ses personnages. Presque toujours des alter ego. (ne le sont-ils pas tous ?). Paul est tout ce qu'il y a de postmoderniste. Une trilogie New Yorkaise mettant en vedette, entre autre, Red, Mr.Green. Mr Blue, Mr.Black ou Mr.Brown sera un vrai grand succès existentiel entre 1985 et 1987. Cette trilogie accompagne largement mon adolescence où je suis seul, pourtant pratiquement toujours ensemble. L'identité étant au coeur de ses oeuvres. Plusieurs des personnages de ses livres seront de passage dans d'autres de ses histoires. Un de ses livres les réunis même presque tous. 

Il écrit de la dystopie épistolaire qui nous présente Anna Blume. Beau personnage désorientée presqu'aérienne. 

Moon Palace survole plusieurs générations et trace de multiples parallèles avec la vie d'Auster. The Music of Chance sera adapté en film. Dans l'excellent Leviathan, Iris Vegan, héroïne du premier roman de Siri Hustvedt, s'y trouve. Étrangement, il est plus populaire au Canada et en Europe qu'aux États-Unis. Il reçoit des prix en Espagne, reçoit le Prix Médicis Étranger en France pour Leviathan est fait commandeur de l'Ordre des Arts et Lettres. Il publie Mr Vertigo, Fantaisie criminelle absurde existentielle et traitant toujours de l'identité avant de signer et co-réaliser deux film New Yorkais indépendant avec Wayne Wang

Il s'amuse à raconter la perspective d'un chien qui peine à encaisser la mort prochaine de son maître, en 1999. Dans The Book of Illusions, dans les années 80, un enseignant universitaire, personnage de Moon Palace,  plonge dans la vie d'un acteur disparu dans les années 20. Le hasard est central dans Oracle Night, en 2003. Moteur de vie. Le formidable The Brooklyn Follies parle de survie sociale. Tous ses personnages se retrouvent dans Travels in The Scriptorium. Il renoue avec le dystopique avec Man in the Dark. Parle identité avec trois narrateurs dans Invisible. Dans Sunset Park il raconte un décrocheur qui cherche à reconnecter avec ce qu'il a un jour abandonné. 

Auster rappelle parfois Beckett, Poe, Hawthorne, Lacan, Thoreau. Après 7 ans sans publier, (Il l'avait fait une première fois sous le nom de Paul Benjamin, peut-être l'a-t-il encore fait sous d'autres noms?) , il écrit son plus long livre, 866 pages, où il raconte plusieurs versions d'une même vie dans 4 3 2 1. En avril 2022, le fils de Lydia Davis et Paul décède d'une surdose. Paul est légitimement dévasté. Il apprend l'automne dernier qu'il a le cancer du poumon. 

Il écrira presqu'une quinzaine de non fiction et 9 recueils de poésie. Signera 4 scénarios de films les dirige ou co-dirige tous. Traduira toute sa vie. Sera un héros dans notre confrérie de traducteurs/traductrices.

Le restera.

Merci Paul de t'être rendu au bout de toi-même.

À 77 ans, le 30 avril dernier, victime du cancer du poumon, il poussait don dernier souffle. 

Mais reste éternel pour nous tous. 

J'aurais posé une roche sur ta tombe. 

Paul avait la voix du sage marin qu'on ne lisait plus mais qu'on commençait à entendre dès la page 2. 

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