dimanche 26 janvier 2025

Conseils de Junkie à junkie

(À mon oncle Skipper Jones dont c'est l'anniversaire aujourd'hui)

1992.

Al Jourgensen & Paul Barker était fiers de leur album de metal industriel. Après tout, ils venaient de signer un classique du genre. C'était leur 5e album. La compagnie de disque croyait tant en eux que c'était pas moins d'un million de dollars et demi qu'ils leur avait donné simplement pour le composer et l'enregistrer. Donc que l'album vende bien ou non, Paul & Al avaient 1,5 millions à se partager avant même de le lancer. (Il vendra très très bien).

Et ils avaient largement investi tout ça, puisque le sexe et le rock'n roll étaient déjà répondus, dans la drogue. 

Beaucoup beaucoup de drogues.

Ministry avait pensé tourner un clip pour leur morceau Just One Fix avec des références très claires à William S. Burroughs mais s'étaient confessé dans un magazine qu'ils tardaient à le faire car ils auraient des tonnes de droits probables à payer à l'auteur et n'arrivaient pas à le rejoindre. Ceci avait soulevé l'ire du gérant de Burroughs, James Grauerholz, qui lui, était entré en contact avec eux pour leur dire que OUI, Burroughs serait très certainement intéressé par tout ça.  

Grauerholz les as alors invité à Lawrence, au Kansas, afin de rencontrer "Bill" et de faire quelque chose avec lui. L'équipe de tournage et les membres du band sont arrivés à l'heure et au jour entendu chez Burroughs, mais pas Jourgensen. 

Qui est arrivé 3 jours en retard. Trois. C'est l'été 1992. Personne n'a de téléphones cellulaires pour se rejoindre. Que s'est il passé ?

Jourgensen devait d'abord terminer un remix pour l'album à venir qui avait pris du retard à se compléter. Mais aussi, le vol qu'il devait prendre par avion l'avait plongé dans une telle crise de panique, drogué superstitieux, il ne voulait plus prendre l'avion ce jour-là. Il avait donc convenu de conduire en voiture, avec un ami, de Chicago au Kansas, une route de près de 9h. 

Mais junkie jusqu'au bout de la narine, on réalise qu'on aura pas assez de drogues pour la route de 9h, et que de surcroit, Burroughs voudrait surement un petit cadeau du genre, lui aussi. On a donc dévié de la trajectoire et magasiné dans un ghetto afin de trouver de la dope. Dans la recherche, ça c'est ébruité que deux "pas propres" se cherchaient de la drogue et les policiers les ont suivis et pourchassés. Ils se sont expliqués ave eux, ont joué les innocents, ont été relâchés. Ils ont rappliqué chez Burroughs, bredouilles. 

La première chose que Bill leur a dit est "Are you holding?". Pas même bonjour, marabout, il a tout de suite demandé "Avez vous de la cam?". Comme ils ne répondaient pas, et n'avaient pas de drogues, Burroughs a ajouté "Je sais flairer un junkie quand j'en croise un". Ils ont fini par dire qu'ils en avaient tout juste assez afin de ne pas "tomber malades". Bill leur a fermé la porte au nez. Ils sont alors repartis, ont trouvé 60 kilomètres plus loin un jeune qui leur a vendu pour 800$ d'héroïne. Sont retournés chez Burroughs. 

"Oh! it's you again!"

Burroughs sait pourtant qu'il doit tourner un vidéo avec ses zigotos. Mais cette fois, c'est différent, ils ont ce qu'il faut. Il les fait tout de suite passer au salon. Il était passé de maussade à plus jovial car son gérant l'empêchait de prendre de la drogue. Il était même sur la méthadone pour "s'en sortir". Il détestait la cocaïne et ne jurait que par l'héroïne. Il avait sorti sa ceinture en cuir cloutée des années 50 et jubilait comme un enfant. Il avait tout ce rituel qui le rendait heureux. Très vieille école. Ils se fixe tous, encaissent et planent, à moitié réveillés, ne se sont rien vraiment dit encore. 

Mais une fois ranimé, Jourgensen tombe sur une lettre de la Maison Blanche. Jourgensen le souligne à Burroughs qui lui dit "Et alors ? c'est de la cochonnerie" Jourgensen lui a demandé si il allait quand même l'ouvrir, ce à quoi Burroughs a dit non. Al a demandé si il pouvait lui, l'ouvrir, Bill a dit "Si tu y tiens". La lettre en était une du président Bill Clinton qui invitait Burroughs à venir faire une prestation de spoken word. Burroughs ne savait même pas qui était Bill Clinton. Ce qui les avaient beaucoup amusés. (il ne la lira pas, n'ira pas) On a appelé le reste de l'équipe à l'hôtel et on a tourné ce qu'on voulait tourner.

Bill a ensuite présenté son jardin où il s'est plaint que ses pétunias étaient constamment détruits par les ratons-laveurs. 

Il n'arrivait pas à les tuer, n'ayant plus droit aux armes à feu autres qu'une carabine à plombs, depuis qu'il avait tué sa partenaire en 1951. Jourgensen, lui a alors suggéré de les piéger avec du compost enduit de méthadone. Qui ralentirait leurs sens comme l'héroïne le faisait avec eux. 

Ça a fonctionné. Les ratons étaient ralentis et Burroughs avait tout le temps du monde pour les achever. Le vieil homme grincheux avec lequel ils avaient eu à faire toute la journée était désormais le plus souriant, il avait tué deux ratons, le jour même. 

Al Jourgensen était désormais sur la très courte liste des amis de William S. Burroughs pour sa suggestion adéquate. 

Jusqu'à sa mort, Burroughs allait appeler chaque semaine, Jourgensen pour jaser. 

Principalement pour lui dire que prendre la coke était idiot. Qui veut prendre quelques chose qui te fait tiquer toute la nuit ? dira-t-il alors.

Voulant à son tour lui donner un peu de "sagesse", Burroughs l'appelait principalement pour lui dire "Reste avec l'héroïne, kid. Beaucoup mieux pour toi

Conseil de grand-père Junkie.

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