lundi 20 juin 2022

Lolologie & Humus

Lors de mes débuts, à l'école secondaire, 13, 14 ans, 1984-85, nous avions dans nos classes, pour seulement la deuxième année, des plus de 100 de l'histoire du collège, des filles parmi les élèves. 

Le réflexe parental de les y inscrire n'y était pas encore. Donc les deux trois filles, jamais plus que 4, dans les 5 classes, pour un total d'à peu près 12 sur 140-150 élèves, avaient beaucoup BEAUCOUP d'attention de la part des petits cons pleins de testostérone que nous étions. Et comme les filles, à cet âge, sont nettement plus développées physiquement que les garçons que nous étions, leur passage dans un corridor obligeait un genre de silence nerveux, ponctué par la perversité de nos regards qui n'auraient pas à dire la couleur des yeux de certaines filles. La testostérone nous faisant presque toujours hululer comme des singes, suite à leur passage, par la suite. On avait définitivement chacun, mentalement, nos palmarès personnels des plus belles jambes et des plus belles poitrines. 

La classe E, dans laquelle j'ai fait mes deux seules années dans cette école, semblait composée des pires Energumènes, les deux années. Ma présence et influence y étaient assurément pour quelque chose. La A semblait rassembler ceux qui auraient souvent cette note en classe. La B aussi, qui comprenait l'actuel chef de la section des sports de la Cyberpresse, Jean-François Bégin et Raymond Fillion de TVA. C était composée de gens assez ordinaires, mais comprenait Elsa, la fille qui faisait tourner absolument toutes les têtes dans l'école. La D était si plate qu'on pensait que si ils avaient hérité de la lettre D, c'était pour Dull (plate). Nous étions la E. Pour Excitante et Excitée. Extraordinaire surement aussi, Épatante. O.K. j'arrête, c'était plutôt pour Énervée. 

J'ai retrouvé la belle Hélène

Nous étions assez chanceux pour avoir 4 des 12 filles dans notre classe. Annie-Claude, qui était la seule "Qui n'avait pas de formes" et qui n'avait pas encore compris qu'elle pouvait faire quelque chose de ses cheveux. Sex appeal, -1000. Paule était rousse et j'ai poussé l'odieux, dès le premier cours à lui dire que c'était drôle parce que le prof lui avait parlé comme si c'était une fille, ce qu'elle avait ensuite confirmé, insultée, c'est dire la féminité qui se dégageait de celle-là. Hélène était très jolie pour nos jeunes yeux, parce qu'intelligente. Elle ne savait même pas qu'on la trouvait belle. Et les filles avaient le luxe de repousser les avances de tout le monde et de choisir qui elles voulaient dans leurs bulles. Ça devait être intimidant pour les pauvres filles tous ces babouins que nous étions. Ce n'est que 2 ans plus tard, quand je serai à une autre école (parce qu'expulsé de celle-ci) qu'Hélène un peu chaudasse me dirait "hey...t'es rendu pas mal cute, toi ".  La suite nous appartiens... 

Puis il y avait Krystelle Lara-Strippoli. Son seul nom était une mélodie exotique. Pourtant, à chaque prise des présences, elle insistait pour faire tomber le "Lara" qui, dans l'âge d'or de la business du divorce, voulait peut-être effacer un de ses parents. Comme son nom l'indique, elle était un joli croisement italien et libanais. Ce qui lui donnait un teint foncé avec des yeux noisettes foncées derrière d'intellectuelles lunettes. Elle avait de très jolis traits, était la plus intimidée timide des 4 et ne savait probablement pas encore tout le charme qu'elle dégageait sur nous. Elle était plus grande que tout le monde en classe (pour seulement 2 ans encore) et était archi développée de la poitrine. Comme nous étions toujours dans la même classe et que c'était les enseignants qui passaient de classe en classe, elle était en arrière, pouvant se vautrer dans sa discrétion, à souhait. 

Mais il y avait ce cours où c'était nous qui se déplaçaient. Et rusés, quelques uns d'entre nous, dont moi, s'étaient empressés, au premier cours d'aller se choisir les places du fond dans le cours d'écologie qui nous accueillait. Cette classe avait été rebaptisée lolologie car Krystelle avait hérité d'une place plus en avant et nous étions plusieurs larrons derrière, en angle à pouvoir tenter de démystifier du regard la tension de son t-shirt. Notre enseignant avait le même nom et prénom que le gardien des Bruins de Boston que Guy Lafleur avait humilié, en séries, en 1979. Il était donc presque naturel de s'amuser à ses dépens pendant le cours. Il avait souvent les bras exposés de ses chemises et montraient à nous, imberbes, une toison poilue époustouflante. Caucasien, ses bras étaient noirs de poils. Je ne connaitrai jamais ce "luxe", encore aujourd'hui, trop autochtone. En raison de cet intimidant poil, on l'avait surnommé, entre nous, Humus. Un mot qu'il venait tout juste de nous faire découvrir.

Nous n'étions pas encore bien braves dans nos débauches, l'année suivante allait faire exploser toutes les règles je vous en parlerai surement un jour. Mais dans un cours de lolologie précis, on avait été 5 à obtenir la toute première sortie de classe "de masse".  

Lemieux & Michaud, pour une raison que seuls eux connaissent avaient décidé de tromper l'ennui en chantant tout bas Dam dam di lam dalam dam dilam dalbapabalam  ce à quoi Lafleur avait ajouté un "Popoppopopop" une octave plus bas pendant qu'eux continuaient, une octave plus haut avec l'éloquent Dam dam di lam dadam dalididam talam pam pa palap Bedoum bedoum bedoum bedoum, toujours très basces trois derniers bedoums étaient un ajout de moi. L'apport de Lafleur était une occasion rare, il n'était pas du genre à faire "la foire". Mais quand Noël de Tilly, lui aussi, un élève plutôt sage, a joint le morceau, avec un jeu de clignement de doigts, j'ai ajouté à mon bedoum bedoum bedoum un second clignement de doigt accompagnant Noël de Tilly. On était inspiré.  Bientôt, on ne murmurait plus, mais on était soudainement une trame sonore distrayante pour trop de monde. Surtout à partir de la 6ème reprise du refrain. Humus nous as hurlé de cesser nos niaiseries. Ou bien merde. 

Et merde a suivi.

Après un temps, on avait eu une telle chimie naturelle, fallait refrapper un grand coup. Cette classe était toute en tapis brun. Ce qui ajoutait à l'aspect laineux des bras du prof. On-je ne sais plus qui- a commencé à se demander si ça faisait du bruit, d'échapper un gros livre sur le sol tapissé. Le livre d'écologie avait la taille d'un dictionnaire. Si on se demandait si un arbre tombe dans la forêt, est-ce que quelqu'un entend ?, on avait le droit de philosopher plus loin, jeunes génies en herbes que nous étions (et oui, j'en serai), pour penser à notre tour : si un gros livre pesant tombe sur un tapis, ça fait un bruit ?

On avait essayé les uns et les autres, sans coordination, mais ça faisait peu de son. On a alors choisi de cibler une heure précise où on ferait tomber nos 5 gros livres en même temps. Juste pour voir. Entendre, en fait. Quand on a fait tomber nos 5 gros livres à l'unisson, ça a effectivement fait un énorme bruit sourd qui a provoqué le silence de tout le monde. Et la stupeur du poilu qui nous enseignait. Et qui nous expulsait de sa classe tous les 5 en même temps. 

On était maintenant étiquetés "galériens". 

Sauf Lafleur et Noël de Tilly qui avaient pleuré leurs expulsions. Gagnant quelques sympathies des autorités scolaires. Comme les trois autres, dont moi, riaient, on était cuit pour deux ans. Nos noms circuleraient. 

Krystelle nous avait souri. On avait gagné ça. Krystelle avait souri grâce à nous. Je me souviens avoir cherché du regard Hélène et y avoir aussi trouvé un large sourire. La sortie avait été glorieuse.

Jamais dans l'année on a tenté de vraiment les approcher parce que les singes ne se mêlent pas aux volpinos et aux chatons. 

Mais les filles avait été amusées par nous dans un mini-film mémorable pour nos petites têtes aux peaux de fesses. Ti-culs de 13-14 ans qui pensaient déjà trop, aux jeux de fesses. Et qui déjà, faisaient n'importe quoi pour un regard de Femme.  

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