Lire, c'est accepter d'entrer dans l'univers d'un(e) autre, c'est plonger dans les expériences d'autrui, c'est visiter des entourages, de situations, des évènements, des sentiments, qui nous étaient peut-être étranger. C'est apprendre à conjuguer sa pensée selon les mots et les parcours mentaux des autres, c'est s'ouvrir les sens, confronter ses idées, découvrir, c'est accepter de respirer sur le rythme de quelqu'un d'autre.
Et respirer, c'est vivre.RÙ de KIM THUY
Kim, née au Vietnam, fuit le pays en 1978, avec ses deux frères et sa famille, en tant que boat-people, dans la cale d'un bateau, clandestinement du gouvernement Vietnamien, mais avec la complicité de bien des gens, jusqu'en Malaisie, dans un camps de réfugié(e)s. Elle a 10 ans. Son père, philosophe, et son grand-père, préfêt scolaire, exploitent leurs contacts, et, toujours par voie maritime, on réussira à se rendre en Amérique, à Granby, au Québec, en 1979, y arrivant sans parler du tout la langue française.
La famille y apprendra peu à peu le français. Kim,, brillante étudiante, à coup sur coup des diplômes universitaires en traduction et en droit. Elle exerce, mais peu de temps. 4 ans dont trois, à Saïgon, Mais c'est pas une vie. Elle fait aussi de la couture et est intreprête. Elle est aussi exceptionnelle cuisinière, ce qui lui fait ouvrir un restaurant de 2002 à 2007, Le Ru de Nam, dans le magnifique quartier de la Petite Bourgogne. Elle y brille car elle a aussi une très rayonnante personnalité. En 2009, mon année horibilis, elle réussit à faire publier son premier "roman" qui est davantage un récit biographique, car elle y raconte la première partie de sa vie. Le départ familial du Vietnam et ce qu'ils ont vécu alors.Les parents de Kim lui disent, très jeune, qu'ils n'auront jamais l'argent pour le soutenir très longtemps, mais qu'en revanche ils seront extraordinairement riches en livraison de connaissances, en générosité, en encadrement et en amour pour leurs enfants. La meilleure éducation humainement possible, donc. Et ça parait au travers de chacune de ses lignes. Kim aime. Kim est gérnéreuse. Kim est honnête. Kim est pure. Avec une écnomie de mots, elle est encore généreuse. De jolies phrases courtes. Précises. Presque du Annie Ernaux.
Les miniatures vignettes impressionnistes naviguent entre le passé et le présent. Pour son travail, elle doit refouler pays qu'elle avati quitté, Revivre les oppressions d'alors, comme le révisonisme communiste. La mémoire lourde comme une ancre au fond de l'Océan Pacifique. Les fantômes de la guerre, les gens laissés derrière, la langue, la culture, l'identité natale qui se transforme, la tendresse et les cruautés qui se côtoient, la maternité américano-asiatique, tout ça est évoqué avec une certaine poésie. Et une tendresse absolue. En livre audio (mon expérience avec de livre) c'est Kim qui ne lit et c'est très sentie. Ce sujet, présenté fictivement, est très près de ses réalités à elle, ce n'est aucunement un secret. On comprend que leurs parents ont eu un passé privilégié mais la fragilité de la vie s'est aussi invitée. On comprend aussi qu'une large part de la vie peut se trouver dans les hasards et par simple chance.Ou son contraire. Si leur bateau atteint les rives des États-Unis au lieu de celles du Canada, ces gens ont ils la même vie ? Les mêmes chances ?
Kim promène quelques blessures avec gâce et dignité, mais offre aussi de beauc moments de bienveillance, de belle vulnérabilité et de réelle tendresse.
C'est un livre assez formidable sur ce que c'est d'être un(e) réfugié(e), mais surtout, sur ce qu'est un(e) réfugié(e) de l'intérieur. Être une feuille de thé absorbant l'arôme des pistilles dans la nuit.
Quand la feuille de thé préserve l'âme de celui ou celle qui sera fleur qui pousse.
À lire avec candeur.
Rù, en sanskrit peu vouloir dire son, bruit, alarme, hurler, pleurer, injurier, craindre, briser, éclater. C'est aussi un diminutif de ruc, qui en sanskrit, veut dire léger ou splendeur et qui est soubent utilisé en yoga.
Tout ça parfume ce délicieux livre de cette délicieuse cuisinière des sens.
De chez nous. Même si elle s'arrache d'ailleurs.
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