Lire, pour moi, c'est le prolongement de ma journée de travail. Je lis tout le temps. C'est comme marcher pour moi, naturel et largement indolore.
Lire c'est accepter de plonger dans la tête d'un(e) autre. C'est découvrir des univers, des mondes, c'est voyager à très peu de frais. C'est s'ouvrir les sens, confronter ses idées, apprendre à respirer sur le ryhtme d'un(e) autre.Et respirer, c'est vivre
SI PAR UNE NUIT D'HIVER UN VOYAGEUR d'ITALO CALVINO
Italo Calvino était un écrivain, essayiste et journaliste italien dont les oeuvres comprennent la trilogie de "Nos Ancêtres" (Le Vicomte Pourfendu, Le Baron Perché & Le Chevalier Inexistant), parus entre 1952 et 1959, Cosmicomics, une série de 12 nouvelles tournant autour de faits scientifiques d'alors, lancée en 1965, Invisible Cities, paru en 1972, qui fait le portrait de 55 villes qui seraient inexistantes dont Marco Polo aurait fait la description au grand empereur Kublai Khan, dont il était ambassadeur et Si Par Une Nuit D'Hiver Un Voyageur, paru en 1979.
Il a été communiste, encouragé par son ami Cesare Pavese, mais aussi parce qu'il est né à Cuba et que son père, qui y travaillait, l'a exposé à l'idéologie très jeune. Il s'en est détaché et a ensuite décrié le modèle de pensée. Comme Alberto Moravia ou Umberto Eco, il est reconnu comme un immense écrivain italien. Il a aussi extraordinairement vendu en Australie et aux États-Unis. En 1985, au moment de sa mort, à 61 ans, d'une hémorragie cérébrale, il était l'écrivain contemporain italien le plus traduit dans le monde.
Si Par Une Nuit D'Hiver Un Voyageur est un exercice style. Une merveille d'ingénuité. Un texte expérimental qui réinvente le concept de la narration. Quand rien ne semble arrêté mais et que rien ne semble avoir explosé. Le roman de Calvino est une forme de comédie où deux protagoniste, un lecteur et une lectrice, de Si Par Une Nuit D'Hiver Un Voyageur, finissent par se marier, ayant presque terminé de lire le livre que vous tenez entre les mains. C'est aussi une tragédie, une réflexion sur la complexité d'écrire et la nature foncièrement solitaire de lire un livre.
Le Lecteur achète un livre de bon goût, selon lui, qui débute par une exhortation: "Relaxe, Concentres-toi. Débarrasses-toi de toutes autres pensées. Laissez le monde autour de toi s'éteindre et disparaître." Après une trentaine de pages, le Lecteur s'appercoit que sa copie de livre est probablement corrompue. Et ne fait que répéter la première section sous des formes et des présentations différentes. Il retourne chez le libraire qui lui a vendu et découvre que ce livre d'Italo Calvino, n'est pas d'Italo Calvino, mais de l'auteur polonais Bazakbal. Forcé de choisir qui il veut lire, il choisira le Polonais. Ce que fera aussi la Lectrice, que nous découvrons. Mais le scénario se répètera.Meta: Création suggérant être parfaitement consciente d'elle-même, et qui manifeste quelques références explicites dans cette direction. Création auto-référencielle.
Ce livre est tout à fait meta.
Calvino expose une dizaine de pastiches, habilement, utilise des histoires de menaces, d'espions, de mystères, de prémonitions, d'explorations, et nous montre comment et pourquoi nous choisissons de lire, de trouver des sens aux écrits, et comment on y trouve nos repères, ou pas. Pendant que le Lecteur et la Lectrice essaient de se joindre et de se lire, l'un et l'autre, le livre éblouit, donne le vertige, est trempe dans le romantisme.
Ce qui rend la lecture et faire l'amour se ressembler est la manière dont les deux redéfinissent le temps et l'espace, les sens, et font voyager, sans même nous faire se déplacer.
Le chanteur irlandais Chris DeBurgh s'en inspirera pour le meilleur album de sa carrière.Seulement 260 pages.
Pas une brique.
Mais capable de casser quelques vitres de la librairie conventionnelle quand même.
Italo Calvino aurait eu 100 ans, en octobre, cette année.
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