lundi 30 mars 2020

À La Recherche Du Temps Perdu******************Infinite Jest de David Foster Wallace

Chaque mois, dans les dix derniers jours, tout comme je le fais pour le cinéma (dans les 10 premiers) et tout comme je le fais pour la musique (vers le milieu) je vous parle de l'une de mes trois grandes passions: La littérature.

Lire c'est un peu beaucoup déjà mon travail de traducteur. Je le fais sans arrêt sans toujours m'en rendre compte. Sans avoir toujours l'impression de travailler aussi. Lire, c'est mon troisième poumon.

C'est s'ouvrir à de nouveaux horizons, explorer de nouveaux mondes, de nouvelles époques, de nouvelles moeurs, de nouveaux univers. C'est apprendre. Sur soi et sur le monde. C'est se confronter à de nouvelles visions. C'est en valider d'autres. C'est mettre certains acquis en danger.

De nos jours, lire, c'est presque subversif et courageux. Et en ces temps de confinement, ça devrait être obligatoire. Deux conférences de presse, une marche, un livre, un film. Horaire du jour.

Lire, c'est réapprendre à respirer, et respirer, c'est vivre.

INFINITE JEST de DAVID FOSTER WALLACE

Vivre oui, mais voici le livre d'un mort. Volontaire.

Wallace était boulimique. Entre 1986 et 1989, il avait entre 24 et 27 ans, il commence à écrire sa brique. Vers 1991-1992, il s'y met davantage. Plusieurs de ses intrigues seront d'ailleurs publiées dans le Harvard Review, le Grand Street, le Conjunctions, le Review of Contemporary Fiction, le Harper's MagazineThe Iowa Review, The New Yorker et le Los Angeles Times Magazine.  Le livre sera mis sur le marché en 1996.

Son titre de travail sera A Failed Entertainment, mais au final, il choisira chez Shakespeare un passage de Hamlet: "Alas, poor Yorick! I knew him, Horatio: a fellow of infinite jest, of most excellent fancy: he hath bome me on his back a thousand times, and now, how abhorred  in my imagination it is!" pour en retenir deux mots, et titrer son livre de 577 608 mots, celui-là.

Et des millions de notes de bas de page.

Dans un futur proche, les États-Unis, le Canada et le Mexique sont devenus un superÉtat connu sous le nom de Organization of North American Nations (O,N.A.N). Une allusion...à l'onanisme (la masturbation).

Chaque année est commanditée au meilleur des prix offerts par le privé si bien que nous passerons par les années Whopper, Tucks Medicated Pads, Trial Size Dove Bar, Perdue Wonderchicken, Whsiper Quiet Maytag Dishwasher, Yushity 2007 Mimetic Resolution Carthridge View Motherboard Easy to Install upgrade  for Internatron/Interlace, l'année du produit laitier des American Heartyland, de la Depend Adult Undergarment, l'année Glad.

Pas trop étourdis?

4 trames narratives sont travaillées en parallèle:

-Un groupe de Québécois radicaux, inspirés des Félquistes, appelés erronément les Assassins des Fauteuils Rollents (sic) planifient une violente attaque géopolitique et s'opposent à l'autorité des représentants des États-Unis. Cette seule intrigue, aux fautes de français (volontaires dit-on) dans la lecture anglaise, vaut le livre.
-Des résidents de Boston atteignent les bas-fond dans leur consommation de drogue et d'alcool et participent aux programmes de narcotiques anonymes et d'alcooliques anonymes.
-On suit une famille, les Incandenza, étudiant et apprenant le tennis.
-On développe sur cette même famille, se concentrant sur le plus jeune, Hal.

Toutes les intrigues sont liées par le film Infinite Jest, tourné par un des personnages.

Le livre est postmoderne. Les notes de bas de pages sont innombrables. On a aussi dit du livre qu'il était métamoderne et hystériquement réaliste. Il est totalement en communion avec son auteur et avec notre époque actuelle:en excès.

C'est le contraire d'un livre de Marguerite Duras. La lecture peut être épuisante.

Mais le livre reste intéressant par son survol des médias, sa critique, sa linguistique, ses études de films, ses vues sur le sport, sur son survol des dépendances, ses propos sur la science, sur l'identité nationale. Wallace est drôle, tout en explorant profondément la mélancolie qui le soustraira à notre monde.

Le livre est inspiré en partie d'Hamlet, de L'Odyssée, des Frères Karamazov et des Monthy Python.

C'est un roman encyclopédique, mais fascinant.

Traitant de dépendance aux drogues, à l'alcool, au sexe, à la célébrité, qui parle aussi de réclusion, de résilience, de mort, de deuil familial, de relations familiales, de santé mentale.

David Foster Wallace se pend, à 46 ans, le 12 septembre 2008, sa tête surpeuplée et devenue ingérable.

Mais rien à craindre, le livre fait rire. Et fait du bien.

Un journal britannique propose même un intelligent guide du lecteur, pré-lecture. 

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