Sillery, Québec, 1985.
J'ai 12 ans jusqu'en début février, 13 les 11 mois suivants.
Mes soeurs Janiper Juniper et Greenjelly ont respectivement 11 ans jusqu'en mars et 12 le restant de l'année et 9 ans jusqu'en novembre, 10, le mois suivant.
Nous habitons le 902 Chemin St-Louis. Nous sommes la maison en haut de la pente douce de Roger Lemelin. Près de la Rue des Braves. La maison fait complètement le coin de la rue Belvédère et du Chemin St-Louis. Là exactement où le Chemin St-Louis se termine et Grande-Allée débute. Coin de rue si actif du secteur que quand mes parents achètent la maison, j'ai alors 2 ans, J.J., 1, ma mère insiste pour que mon père pose une clôture ou fasse pousser une haie car nous glisser dans le trafic, en jouant dehors sur le terrain, serait trop facile. On en fera le ménage tous les samedis matins de cette haie, quand on sera en âge d'aider Dad. Âge qui arrive très très vite. Notre maison fait tant le coin de rue que nous avons deux adresses. Notre porte principale est sur Belvédère, au 1200, Belvédère. Nous sommes à la frontière de Sillery et Québec. Cette frontière contourne notre maison ce qui fait qu'à l'Est et au Sud c'est Québec. Des deux côtés des deux rues. Mais à l'Ouest et au Nord, on loge Sillery. Nos deux adresses sont bien Silleroises. Ça nous donnera une étiquette de snob pas mal toute notre vie. Jamais ça ne nous affectera. Trop snob probablement. Non, sans rire, ce n'est pas une étiquette qui nous a vraiment collé . Si on vous dit toute votre vie que vous êtes colérique et que vous ne l'êtes pas, ça ne peut pas vraiment vous affecter. Vous ne l'entendez plus et c'est de l'eau sur le dos d'un canard. Vous laissez le préjugé s'aplatir au sol.
Le 1200 de notre adresse, on le laisse au logement que nous avons, un 1 1/2, split-level, qui accueillera, au début, la mère de ma mère, Atikamekw. On y parvient en entrant par la même porte que nous utilisons, montant trois marches jusqu'à la porte de la cuisine, mais tournant à droite pour monter quelques 7-8 autres marches menant au 1/2, split-level, situé au dessus du garage. À la mort du seul grand-parent dont je me rappelle un tout petit peu, ce seront des locataires qui y logeront. Parmi eux, Jean Beaudry, animateur de la radio du FM 93, station radio située au pied de la pente douce. Beaudry anime la plage horaire de 9h00 à 10h00, peut-être 11. Je ne sais trop. Il est affable. Tranquille. Discret. J'avoue ne pas écouter vraiment son segment.
À cet âge, j'ai un ami, dont le père achète absolument toutes les nouveautés musicales chaque mardi. Il a une grande pièce comprenant des centaines et des centaines de 33 tours en vinyl. Pop, rock. Peut-être jazz aussi, mais comme je ne m'y intéresse pas alors, je ne remarque pas les noms du jazz. Je passerai des dizaines et des dizaines de samedi (après avoir fait le corvées du samedi matin) à lui emprunter absolument tout ce qui pique ma curiosité. Et à enregistrer sur cassette, ce qui me plait. Vous connaissez ma curiosité, je peux alors parfois faire 3 voyages dans la même journée chez lui. Emprunt, écoute, enregistrement, remise, réemprunt, ainsi de suite.
Ce papa a fait une large partie de mon éducation musicale.
Pour mes 8 ans, mes parents m'avaient acheté un petit radio-cassette qui se trouvait à être le plus cadeau de ma vie. J'y écoutais la radio, j'y jouais mes cassettes, on s'y enregistrait (une chanson, composition personnelle mémorable, avec mes soeurs "Cheveux en l'air", un classique) , j'y enregistrait la musique qui me plaisait à la radio, je la collais même sur la télé quand l'industrie naissante du vidéoclip commençait à nous offrir du clip. Mes chansons commençaient toujours avec deux doigts s'enfonçant dans les boutons pour enregistrer, souvent avec empressement, donc avec un bruit d'effondrement de tambours. Parfois j'avais la voix d'un membre de ma famille qui passait trop près de la télé et ne savait pas que j'enregistrais. Toujours, j'avais le début d'une animation télé/radio ou la fin de celle-ci en amorce de chanson. Le son devait être minable. Mais je n'en demandais pas plus. Ma "muze" avait une saveur. Encore aujourd'hui, quand j'entends Private Dancer, j'entends aussi à la fin "après la paus...SCHROUMPHFFF!" qui était de ma cassette. Parce que pour arrêter l'enregistrement, un même empressement sur les boutons provoquait le même son.
Quand mes soeurs jouaient dans le sous-sol, lieu qui était mon royaume plus souvent qu'autrement, j'avais l'habitude de me placer, deux étages plus haut, dans les escaliers tapissés pour y brancher ma radio-cassette, assis dans les marches. Une prise de courant m'y était presqu'exclusive. Je l'ai rendue, très utile. J'y écoutais la radio, compilait à la main les noms de groupes et d'artistes que je découvrais, me faisait des dossiers alphabétiques des artistes, ne pouvait pas creuser l'internet, alors inexistant, pour en savoir davantage sur Adam Ant ou The Police. Fallait que je traverse la rue, à Québec, et emprunte à Mr. Murray.
Je passerai de dizaines d'heures sur cette radio*.
Le FM 93, la radio #1 à Québec à cette époque, publiait un calendrier de l'année avec pour chaque mois, une photo en spectacle d'un artiste étant passé par le Colisée de Québec, l'année précédente. Je ne sais pas si ils le faisaient chaque année, mais en 1985, le calendrier montrait 12 artistes ou bands passés sur scène, au colisée, en 1984. Je ne sais pas si on en trouverait 12 passés au centre Vidéotron en un an, maintenant.
April Wine, The Police, David Bowie, Iron Maiden, Twisted Sisters, Pat Benatar, Rush,Van Halen.
Je ne sais trop quel mois avait Van Halen mais la photo était bonne. On y voyait très bien Eddie et David Lee Roth qui s'amusaient ferme sur scène.
J'ai pensé à cette photo et à tout ça avec une certaine nostalgie, la semaine dernière, quand Eddie Van Halen est décédé du cancer, à 65 ans.
*La chanson de l'année 1985, selon le FM 93: Careless Whisper de Wham!
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