Chaque mois, dans les 10 derniers jours, comme je le fais pour le cinéma (dans les 10 premiers) et tout comme je le fais pour la musique (vers le milieu) je vous parle de l'une de mes trois grandes passions: La Littérature.
Lire c'est s'ouvrir à un monde, un univers, une époque. C'est plonger dans la tête d'un autre. Confronter ses idées, ses croyances. C'est explorer, s'ouvrir sur le monde.
Je lis pratiquement tout le temps, ça fait partie de mon métier (de traducteur). Pour moi, c'est à peine travailler. C'est tout simplement respirer différemment. Et respirer, c'est vivre.
RABBIT, RUN de JOHN UPDIKE.
Harry "Rabbit" Angstrom est une ancienne gloire du basketball locale dans ses États-Unis drabes. Il a 26 ans. Il est marié et père d'un petit garçon de 2 ans. Il est vendeur sans envergure et la vie l'appelle ailleurs. Il quitte tout ce qu'il a, dont sa femme enceinte, se perd en voiture, revient, mais ne reviendra plus chez lui. Il visitera son ancien entraîneur de basket, figure paternelle dans sa vie, et fera la rencontre d'une jeune femme, prostituée à temps partiel. C'est avec elle qu'il commence une aventure et s'installe en appartement.
La pasteur local tente de la raisonner, mais rien n'y fait. Il tente un rapprochement avec la mère de ses enfants. Mais il n'arrive plus à décoder les signes que leur envoie les Femmes. Y est-il seulement sensible?
La mère de ses enfants se saoûle de désespoir causant un drame. La désorientation devient totale. Le livre se termine sur une apparence de renaissance, mais Angstrom reste incapable de commettre oû que ce soit.
Le livre est paru (et situé) en 1959-1960. À une époque de grands bouleversements sociaux aux États-Unis. Le surnom de Rabbit (lapin) est choisi afin d'évoquer tous ses Étatsuniens qui font des bébés comme des lapins sans y penser et sans considération, en grande quantité. Les lapins ne sont pas reconnus comme des bêtes trop intelligentes parmi les animaux et Harry en sera un bon écho.
Upidke avait rencontré, en 1959, de nombreux jeunes hommes égarés, refusant de s'engager en quoi que ce soit, des jeunes qui avaient été de superstars scolaires, mais qui se plantaient peu à peu en société adulte. Leur idée du bonheur étant de rester jeune. En 1959, un certain modernisme tardif prend fin et Updike en devient un peu l'héritier aux États-Unis. Ne serais-ce que dans la manière de présenter l'érotisme dans un roman. On y va pas par 4 chemins. Le livre et le personnage sont très sexuels. Les repères moraux sont toujours largement spirituels, mais on flaire la rupture. Le livre n'est ponctué de ruptures et de retrouvailles. Mais là où tout le monde marche, Rabbit Angstrom choisit de voler.
Le sexe, l'engagement, la religion et son pouvoir en 1960, la recherche d'identité, une certaine vision voilée des États-Unis, la fragilité de l'existence, tout ces thèmes sont présents dans ce livre qui est ce que j'appelle "une capture d'époque".
Updike était un maître portraitiste des citoyens Étatsuniens. Il prétendait avoir écrit son roman en réplique au On the Road de Jack Kerouac. En se disant: "voici ce qui arrive quand un homme de famille prend la route, tout le monde abandonné derrière en souffre".
Le nom de Angstrom a pris sa source des lectures de Kierkeegaard d'Updike, de la crainte suggérée en Rabbit (Angst). Un Angstrom, en physique, est une très courte distance. Une fraction de millimètre. Suggérant aussi moins la distance dans la "course" de Rabbit, et plutôt l'inertie. Le surplace toute sa vie.
Comme un homme voulant geler le temps entre 17 et 20 ans.
Premier de 5 livres faisant la circonférence autour de cet être très très facile, encore aujourd'hui, à trouver, ici et là, aux États-Unis.
Et ailleurs.
Ces gens qui veulent toujours être ailleurs.
Oubliant parfois d'être là où il faut.
Une erreur mâle (et femelle, mais surtout mâle) que nous commettons souvent trop souvent.
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