Chaque mois, vers le milieu, je vous parle d'un album qui m'a beaucoup plu, tiré de ma collection. Je le fais aussi pour le cinéma (dans les 10 premiers jours) et pour la littérature (dans les 10 derniers).
Le titre de la chronique est inspiré de 4 albums dont je connais le contenu note par note tellement je les ai écouté et qui font partie de mon ADN.
Par ordre de création:
Blonde On Blonde de Bob Dylan
The Idiot d'Iggy pop
Low de David Bowie
The Unforgettable Fire de U2.
B.I.B.I. c'est aussi moi. Tout comme c'est la terminaison de habibi, qui veut dire je t'aime en dialecte irakien.
Musique, je t'aime.
ON THE BEACH de Neil Young
1973.
Successivement, Dan Whitten, guitariste du Crazy Horse de Neil Young et Bruce Berry, roadie de l'équipe meurent coup sur coup d'overdoses d'héroïne. Ça bouleverse Neil au point qu'il enregistrera trois albums pour se débarrasser du cafard qui l'affecte. Il appellera sa trilogie The Ditch Trilogy (la trilogie de l'abîme).
Tonight's The Night est le premier (et le plus noir) des exorcismes sur ces deux morts à être enregistré. Mais sera le dernier à être lancé car la maison de disque le trouve justement trop sombre et absolument pas commercialisable. Time Fades Away est le premier lancé. Enregistré en tournée, Young n'en est pas satisfait (de la tournée) il choisit donc de retirer cet album assez vite puisqu'il y est associé.
Tonight's The Night restera sur les tablettes.
Neil compose et enregistre donc On The Beach, du 5 février au 7 avril 1974. Le disque sera public à la mi-juillet. Un album tout aussi sombre que les deux autres. Même parfois plus sombre sur certains morceaux. Mais son meilleur selon moi (avec Harvest).
Largement teinté des deux morts de ses proches associés. Mais planant aussi. Car Young et son équipe consomment une massive dose de "honey slides" une concoction de marijuana et de miel qui rappelle l'héroïne. Drôle de manière de se sortir du cafard héroïnal tout en s'en gardant le goût en bouche.
Mais fameux résultat.
Une seule chanson sera "radio-friendly" et c'est la toute première. Neil l'a écrite en réponse à la guerre de mots amicale avec les gars de Lynyrd Skynyrd (qui s'aimaient et se respectaient tous quand même), groupe qui avait composé un grand hit, en réponse aux frayeurs de Neil sur les gens du Sud. Mais surtout en réaction face aux fans du Sud qui lui en voulaient des les dépeindre non évolutifs. Neil chante aussi surtout aux dirigeants de la maison de disque qui tablettent son album précédent. Mais ne s'en fait plus. He walks on.
La seconde chanson avait aussi été lancée, en mars, sur l'album des Byrds. Young la jouait depuis 1971. C'est la seule non composée précisément pour cet album. Elle installe bien la fatalité (il pleuvra toujours, peu importe) du regard qui s'installera sur les morceaux suivants. La pluie ininterrompue (la peine perpétuelle) reviendra plus loin, en ambulance. Le multi instrumentiste de The Band, Levon Helm, est ici à la batterie.
Neil a fait la rencontre de Charles Manson, alors aspirant musicien californien, avant qu'il ne fasse commettre ses horribles crimes. La troisième chanson parle de Manson. David Crosby y joue de la guitare mais n'aimait pas le morceau. Disant à Young de ne pas chanter sur quelque chose de laid du genre. Rusty Kershaw y joue du violon. Excellent blues. Rick Danko, guitariste de The Band, y joue la basse.
L'avant dernière chanson de la Face A était aussi le second extrait envoyé aux radios. Carrie Snodgress, actrice et conjointe de Young, inspiration de Harvest et de A Man Needs a Maid, a, sans le vouloir fourni la mélodie qu'elle chantait dans la maison et que Neil a retravaillé au banjo pour en faire une chanson complète. Ben Keith, qui y joue aussi du dobro, y place aussi sa voix.
La chanson qui clôture la Face A parle du rôle des magnats du pétrole, détruisant la planète. George Whitsell y joue de la guitare. Ce qui fût une surprise quand Neil l'a invité à le faire. Young lui avait volé sa section rythmique (bassiste/batterie) dans les Rockets , avant de les transformer en Crazy Horse. Comme Whitsell a reçu l'invitation le premier avril, jour du poisson d'avril, il n'y a pas cru tout de suite. Les chansons de vampires me plaisent toujours. Identification oblige.
La chanson titre est formidable. Neil devait trouver aussi puisque il a donné à l'album son titre. La chanson est un commentaire sur la célébrité, ses hauts et ses bas, et réunit justement des gens qui ont marqué sa carrière jusqu'en 1974: Ben Keith des Stray Gator, qui y joue du tam tam, Ralph Molina, de Crazy Horse, à la batterie, et Graham Nash, de Crosby, Stills & Nash, au piano électrique. À 6:59 c'est la seconde plus longue de l'album. Injouable à la radio. Trop planante de toute manière.
L'avant dernière chanson est un regard doux amer sur la célébrité, encore, mais vise surtout sa conjointe, duquel il se séparera dans un an. La face B est nettement plus tranquille que la Face A. Beaucoup plus aérienne. Ironiquement, il ne savait pas encore qu'elle le trompait (il le faisait aussi), mais le sentait. Et l'anticipe dans ce morceau. Carrie Snodgress a vu sa carrière péricliter suite à l'arrivée de Young dans sa vie. Dans le toxique, cette relation est triste à mourir.
L'album se termine sur la plus longue des chansons du disque. Mais aussi l'une des plus belles. Young la compose en écoutant Bert Jansch, lui volant même quelques accords. Young y critique Nixon et l'état de Crosby, Stills, Nash & Young. "You're just pissing in the wind" est une phrase qu'a lancé le gérant de Young sur l'inactivité de CSNY. Young fait aussi référence au Riverboat, un café de Toronto (Yorkville) où y grouillait toute une communauté folk, Gordon Lightfoot, Joni Mitchell, Bruce Cockburn, Simon & Garfunkel, Arlo Guthrie (et Neil). Dans les années 70, la scène changeait mais le café tiendrait encore la route jusqu'à ce que le disco et le punk le force à le fermeture en 1978.
Pour amateur de rock, country, guitare, mélancolie, de blues, d'ambiant, de CSNY, Gram Parsons, Jackson Browne, de bruits d'Amérique, de musique sous influence de nuages dorés.
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