L'amoureuse me trouve sniffeux comme les 'ti-vieux.
C'est sur, c'est une maladie de banlieue, être sniffeux.
C'est ben certain, dans nos rues, il ne se passe rien. Alors quand on y voit des gens circuler, je regarde. Ça fait parti des articles conflictuels entre la belle et moi. We agree to disagree sur les rideaux et les stores. Elle les veut pour pouvoir être à l'abri des regards et moi je ne les aimes pas parce que je ne peux pas voir dehors.
Et là quand je regarde ce couple de déshérités qui fouille nos vidanges chaque vendredi je me moque un peu de ce qu'ils y pigent mais quand je vois leurs têtes regarder longuement vers notre porte de garage fermée, je me demande toujours un peu si ils n'auraient pas envie qu'on l'oublie ouverte cette porte de garage. Et ces deux chiens au bout de cette laisse, ces chiens sur lesquels ils ne veillent plus quand ils, les deux maîtres, ont la tête dans nos vidanges, c'est sur mon terrain qu'ils défèquent. J'ai quand même le droit de savoir dans quel coin sera le caca mou parce que ces ânes ne le ramasseront pas toujours.
On a des nouveaux voisins dans l'autre moitié du jumelé depuis la mi-avril. Un jeune couple entre 25 et 35 ans. Pas d'enfant mais planifient bien d'en tricoter de l'autre côté de nos murs. Ils ont acheté du vieux veuf de 77 ans qui y logeait et ont aussi choisi de tout jeter à terre, les murs, les armoires; d'arracher les planchers d'en sabler de nouveaux, de poser de la céramique, non pas avant d'en enlever de détapisser certains murs aussi, de faire des trous avec des drills, de taper sur des clous. Bref, ils sont gentils et tout mais font un tapage assez infernal. Par défaut, moi qui suis habitué de traduire tranquille dans la cuisine ou dans la verrière, j'ai maitenant l'habitude de fermer portes et fenêtres et d'avoir le ipod vissé au tympan depuis quelques temps. Je sniffe aussi. Qu'est ce qu'ils gossent en ce moment en arrière? il va arracher tout le panneau de treillis de son côté? mais on va alors les voir se faire griller autour de leur piscine? et vice-versa?. Et faudra bien à un moment donné que je leur parle diplomatiquement de cet abri tempo illégal dont la neige tombe toujours sur nos voitures, nous empêchant d'y entrer parfois. Le voisin n'a plus 77 ans maintenant, il est jeune et pourrait la ramasser sans se tuer à l'ouvrage.
Mais là, ce jour-là, c'était l'autre voisin que j'entendais piocher de l'autre côté. Le voisin qui fait des phrases sans verbe et qui me croit gay car j'écoute du Bowie, ne m'intéresse pas aux voitures et encore moins aux travaux manuels. Je lui dirais bien que si j'étais gay, au contraire je serais le plus manuel des hommes mais ce serait donner de l'importance à son questionnement inutile.
Notre terrain est quelques 5 pieds plus haut que le sien, ce qui fait qu'avec les années, la clôture qui retient notre terrain ne le retenait plus avec autant de vigueur et menaçait de tomber carrément chez lui. À grands frais, on a fait creuser un peu chez lui et fait poser des tendeurs en forme de "L" dans le sol qui retiennent le mur de soutènnement de s'effondrer. Depuis trois ans, il n'a pas bougé grâce à ces tiges collés sur notre mur et dont la barre du "L" est enfoncée six pieds sous terre. Toutefois je remarque que depuis trois ans, son gazon, là où sont les tiges sous terre, n'a pas complètement repris, si bien que si on ne remarque pas les tiges le long de la clôture, on remarque en revanche très bien 7 lignes de gazon clairsemé d'à peu près 2 pieds et demie.
Bien que cet olibrius pourrait très facilement resemer et faire pousser du nouveau gazon, je m'attends toujours à ce qu'il m'en parle. Mais comme il fait des phrases sans verbes, il ne pourrait en rien me commander de réparer ou de faire quoi que ce soit.
J'étais près du BBQ, là où, entre le voisin et chez nous, il y a de massifs cèdres touffus de plus de 20 pieds qui offrent une certaine intimité . Je l'entendais piocher sur quelque chose en métal et me demandait What's he buildin' in there? J'avais même poussé l'audace jusqu'à plisser les yeux et tenter de voir ce qu'il fabriquait aux travers des cèdres. Comme un enfant espion tentant de voir les cuisses des jolies passantes. Ça avait très peu à voir avec la paranoia et tout à voir avec la curiosité d'un cuisinier qui s'ennuyait autour de son BBQ. Sans m'en rendre compte j'avais la tête très basse dans les cèdres et, plus je vieillis, plus je réalise qu'il faudrait que je portes mes lunettes plus souvent; je ne voyais rien. Je l'entendais toutefois marmonner un air poche de Charlebois, ce qui voulait dire qu'il avait lui-même probablement un Ipod en tête et n'avait donc, aucunement conscience de ma présence de l'autre côté des cèdres à tenter de scruter ses faits et gestes.
C'est à ce moment, que le jet de son boyau d'arrosage, qu'il aspergeait d'abord sur une pièce de métal non identifiée, a passé tout droit pour se frayer un chemin entre les cèdres et m'est entré en pleine bouille, la gueule ouverte aussitôt remplie, m'étouffant même, tout en me faisant tomber un genou au sol et rouler dans les copeaux de bois.
J'ai été forcé de reprendre mon souffle et allongé sur le sol, ai poussé un long rot que certains oiseaux ont pris comme un appel en saison de rut car ils ont plongé dans ma direction avant de reprendre leur vol.
J'ai eu aussi deux mouvements de gorge comme si j'allais vomir (sans y parvenir). Le voisin de l'autre côté n'a eu connaissance de rien.
Il marmonnait maintenant Concepcion.
Ça m'apprendra à sniffer.
J'ai pas de carrière de badaud qui m'attends
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