Le 13 juillet dernier, 889 pages de conversations de la part du gouverneur de Puerto Rico Ricardo Rossello avec sa garde rapprochée ont été rendues publiques.
Ses propos lourdement sexistes, homophobes, mais surtout son souverain mépris envers les victimes des ouragans Irma & Maria de 2017, ont soulevé un tollé de colère dans la population Puertoricaine et ailleurs dans le monde.
L'évidence de la profonde corruption naturelle dans ses propos a mis le feu au poudre. Devant la pression populaire des gens descendant dans la rue, il a été forcé de quitter ses fonctions et de démissionner.
Ironiquement, ça c'est produit le même jour où Robert Mueller passait devant le Congrès des États-Unis, provoquant peut-être, pensait-on, potentiellement la démission du président des États-Unis, aussi.
Après tout, tout ce qui fût reproché à Rossello, Trump l'a facilement biffé dans ses listes "d'exploits" depuis longtemps. Ça prendra la forme un jour d'une encyclopédie de plus de 1000 pages pour répertorier les actes de corruption, les pots-de-vins, les mensonges, les obstructions de justice, les ingérences, le sexisme, le racisme, l'homophobie, le non respect des morts, les illégalités et toutes les contorsions de la justice que Donald Trump et son cercle d'initiés ont jusqu'à ce jour perpétré. Et continuent de faire.
Afin de comprendre pourquoi un homme a dû plier bagage et pas l'autre, il faut reculer dans le temps.
En 1898, peu de temps après que les États-Unis eût déclaré la guerre à l'Espagne sur le statut de Cuba, les bateaux de guerre des É-U ont vogué vers l'Est et pris possession de Puerto Rico. Pendant que des anti-impérialistes au Congrès empêchaient le président William McKinley de complètement annexer Cuba, Puerto Rico passait tout de suite de colonie espagnole à colonie entièrement Étatsunienne.
Quelques années plus tard, afin de stimuler les affaires sur l'île, on en a fait une île exempte de taxes pour y attirer les investisseurs.
En 2006, pas avant, grâce à un projet de loi pensé par Bill Clinton et son équipe 10 ans plus tôt, la plupart de ses exemptions de taxes avaient disparues. Les importantes compagnies qui s'y étaient installées ont alors commencer à quitter l'île. L'économie de Puerto Rico a plongé. En 2015. on annonçait qu'une dette de 124 milliards ne pourrait jamais être remboursée.
Au lieu de passer l'éponge sur la plus vieille colonie des États-Unis, Barrack Obama, un président pour qui les Portoricains ne peuvent pas voter ni pour ni contre, a mis sur pied le programme PROMESA garantissant l'absence de poursuites en échange d'un comité des États-Unis, formé pour restructurer toute l'économie sur place. On appelle ce comité La Junta.
Sous Trump, l'austérité Puertoricaine est devenue plus stricte. La crise devenant plus creuse. Les ouragans ont fait fuir davantage. Quelque 80% des Puerto Ricains rêvent de fuir les lieux.
Aux États-Unis, quand ça chauffe, ou n'importe quand, on se place au dessus des lois.
Sur l'île, on l'a vu, on ne peut plus se le permettre.
Mueller a refusé de poursuivre Trump malgré les nombreuses preuves d'infractions qu'il a sous la main car le président est en fonction et que le Congrès ne l'appuierait probablement pas dans ses démarches.
À Puerto Rico, on a pas attendu les décisions des enquêteurs, les gens sont allés dans la rue, ils ont bravé les gaz lacrymogènes, ils ont manifesté jour et nuit, ils ont fermé les principales routes, Rossello était visé de partout. Quand on a, très tard, entendu Rossello accepter de démissionner, la foule a tout de suite scandé que sa successeure, de la même équipe, devait aussi lever les pattes. Que ce n'était que les mêmes vieux bateaux avec un différent capitaine. Dans la même direction.
Une phase 2 de démission est toujours sur les rails à Puerto Rico.
Ce qui reste fascinant, c'est que c'est l'absolu manque de pouvoir politique, d'une colonie de seconde classe, la plus vieille des États-Unis, qui a fait avancer les choses à Puerto Rico .Le même jour où le puissant pouvoir politique des États-Unis freinait toute poursuites qui seront inévitablement légitimes au jour 1 de la fin de la présidence de Donald Trump.
Souffrir et mourir, ne pas avoir son mot à dire sur ton leader ultime, et voir ce leader aux cheveux oranges te tirer du papier de toilette auront allumé l'étincelle d'une île en mode jeune pousse.
Si ce n'est pas économiquement, où ils sont menottés par les États-Unis, ce sera au moins socialement.
Somos màs y no tenemos miedo lisait-on dans les rues qui se sont découvertes démocratiques.
Ça veut dire Nous sommes plus nombreux que vous. Nous n'avons pas peur.
C'est bouleversant de beauté.
Comme l'île de Puerto Rico que j'ai visitée trois fois.
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