(note de l'auteur: Blogger est une pute les minuscules et les majuscules sont inutiles et n'ont rien à voir avec rien, impossible à corriger, je les encule, désolé pour la forme, c'est la leur pas la mienne)
(à H.K.)
La météo varie toujours. Elle change tous les jours et est perpétuellement imprécise, diffuse.
On parle souvent de prévisions, parce qu'on ne sait jamais.
Il existe un général consensus sur l'été.
Les gens aiment le soleil, la chaleur qu'ils appellent "le beau temps".
Lya aime la pluie. Elle la comprend.
La pluie est perçue comme une anomalie naturelle. Pas naturelle comme dans "normale", sinon ça ferait un total oxymore, mais naturelle comme dans tiré de l'univers de la nature.
Une anomalie météo tiens.!
Lya se savait elle-même anomalie.
Elle s'identifiait complètement à la pluie. Enfant, la pluie ne la freinait en rien. Rien ne la freinait en fait. Unique fille coincée entre trois frères, elle avait appris à se défendre et à faire sa place très jeune. Sans être un garçon manqué, elle ne laissait pas sa place. Elle était une enfant très animée, probablement la plus animée des 4 enfants de la famille, et ressemblant beaucoup à son père.
Quand celui-ci perdra peu à peu la raison avec le temps, c'est elle qui le prendra le plus durement. Ils étaient si pareil physiquement et mentalement qu'elle ne pouvait pas faire autrement que de voir son propre futur mental en lui. Cette animation qui la dynamisait enfant, devenait une béquille adulte. Lya exultait, explosait, riait, s'impliquait avec une vigueur remarquable dans tout ce qu'elle entreprenait, mais quand elle chutait de l'intérieur, l'intensité était la même. Et elle pouvait être violente. Profonde. Abyssale. Malgré le soleil du visage elle sentait la pluie, le tonnerre et l'orage d'en dedans.
Le mariage de son père et de sa mère en souffrirait et quand le dernier petit frère quitterait la maison, maman claquerait la porte elle aussi. Lya était adolescente.
L'école secondaire a été un éveil. Avant ce passage, elle n'avait aucun regard sur elle-même. Oui, elle était populaire, oui elle était bien entourée. oui on l'acceptait bien, mais quand le CEGEP s'est mis en branle, elle a perdu de vue tout le monde. Et soudainement, ce n'était pas anormal pour quiconque. On l'aime bien, Lya, mais à petite dose.
Comme un jour de pluie.
Étudiante en architecture comme son père (qui l'enseignait aussi), elle devait piocher fort pour obtenir non pas de bonnes notes, mais des excellentes notes. Sa vie sociale en a un peu souffert. Elle ne manquait jamais d'ami(e)s, mais l'idée d'avoir un petit copain? " Pas le temps! qui voudra de mon tempérament de toute manière? Je suis une bombe!" pensait-elle. Elle ne vivait que d'aventures. Courtes, momentanées et intenses. Ça lui a peut-être valu une certaine réputation, mais elle était encore peu capable de regard sur elle-même. Et quand elle le faisait, ça lui était égal ce que les gens pensaient.
Les jours de pluie, enfant, elle se tirait sous l'eau. Adulte, elle ralentissait. Elle ne se forçait même pas à le faire, tout naturellement elle se plantait près d'une fenêtre et regarder l'eau tomber. Toujours. Le plus longtemps possible. Comme si elle en comptait les gouttes. Ça l'amenait ailleurs. Elle communiait des yeux avec la pluie.
Son père a perdu la tête à 45 ans. On lui a détecté une maladie mentale. Il n'a rien fait de grave publiquement. Mais il ne serait plus jamais le même. Lya en pleurerait un bon coup. C'était pire que la mort, c'était le deuil de quelqu'un qui n'était plus complètement là, mais donc le corps restait autour. Pire, en faisant de la projection, c'était aussi le deuil potentiel de sa vie de mère, car elle se savait atteinte de la même tête. Et ne souhaitait pas faire vivre ces intempéries intérieures à un enfant un jour. Le problème c'est que Lya était très belle. Et que les avances venaient de partout depuis justement, le CEGEP. Jamais n'avait-elle connu de longue relations car très vite, elle avait peur d'être elle-même larguée. C'était presque tout le temps elle qui mettait fin à une relation.
Jusqu'à Kevin. Son contraire. Un homme posé, calme, terre à terre, aimable et aimé, incapable de colère. Infirmier. Kevin l'avait tout juste trouvée charmante. Il lui avait fait la promesse de toujours l'aimer si elle le voulait elle aussi. Bien entendu il avait vite compris le numéro et, comme dans tout, avait gardé la tête froide et savait qu'il pouvait vivre avec cette fille un peu trop animée, un peu trop inquiète, un peu trop...tout. Car il pouvait lui être un peu moins...tout.
Il serait son frein. Et elle l'aimerait justement pour ça. Pour être en mesure de lire la pluie comme elle la lisait dans la fenêtre.
Et de ne jamais en faire un plat.
La météo varie toujours. Elle change tous les jours et est perpétuellement imprécise. diffuse.
On parle souvent de prévisions, parce qu'on ne sait jamais.
Lya pleurait son père ce matin-là.
Son père vivant, mais mort aussi. En partie.
Et quand la pluie a roulé sur les joues de Lya, Kevin s'est contenté de l'enrouler dans ses bras avec la plus grande tendresse, Une tendresse qui faisait écho aux bras protecteurs de papa quand il la serrait dans ses bras, elle, plus jeune, pour la protéger du monde et l'aimer très fort. Quand il était là. Un endroit où il ne serait jamais plus.
Lya devait se rendre au foyer où on prenait soin de son père. Kevin serait là pour l'épauler.
Mais serait-il là quand ce serait elle qui serait un jour en foyer?
Et que penserait-il de ce qu'elle avait maintenant dans le ventre...?
Lya regardait la pluie. La comprenait. La trouvait belle.
Elle prendrait maintenant la peine de se regarder dans les flaques.
Car une tête à la météo diffuse poussait dans ventre.
Jamais elle n'avait eu plus peur. Elle voulait donc que Kevin ait peur avec elle. Ensemble.
Elle attendrait la fin de la pluie pour lui annoncer.
Parce que la pluie impose la paix sur les rues. Parce que la pluie avait toujours été son alliée.
Lya voulait parler de prévisions météo pour le moineau à venir.
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