dimanche 1 mai 2022

Silences & Flûte-Trombone

J'étais sur la route, un lundi soir, à 21h38, une journée commencée très difficilement à 5h00 du matin, refaisant la même route que je fais 5 jours sur 7, dans cette même noirceur en voiture, et avec sensiblement le même absent trafic, direction bureau. 

Porké le bureau à cette heure, un lundi soir ?

"Ben non, ça ressemble beaucoup plus à de l'influenza, je n'ai pas de fièvre, je n'ai que des chats dans la gorge qui me forcent à tousser à l'occasion!". que j'avais dit, avalant un sinutab. 

"Test! Papa!"

TEST! m'ont ordonné mes deux enfants. Le grand parce qu'il craint pour ses sessions d'examens prochaines qu'il ne veut pas manquer, la petite parce qu'elle fête avec sa belle famille la réussite scolaire de son chum, à notre condo du nord, celui-ci tombe sur le marché du travail, dès la semaine prochaine, puisque 2 employeurs s'arrachent ses services. Différentes réalités que les nôtres, au même âge. Les deux insistaient pour que je m'auto-teste pour la Covid et j'ai fini par les écouter parce que les deux étudient/travaillent en santé et savent davantage de quoi ils jasent que Dr. Jones qui parle d'influenza. 


La vérité était aussi que me rentrer une tige dans le nez est une expérience extraordinairement difficile pour moi. Ça peut me prendre une bonne demi-heure à essayer d'en entrer une seule et je pleure toutes les larmes de mon corps pendant le 15 secondes. Une fois la torture passée, je suis aussitôt monté à l'étage, fuyant la cuisine parce que christ...fallait que je soigne la douleur du test. coliss juste cette image à gauche me fait mal à voir.

"Huntyyyyyyy..."  mélodiait l'amoureuse de la cuisine, douloureusement. 


Voilà...j'avais la Covid. C'est ce que le petit bâton disait. Moi qui avait voyagé au Honduras, qui m'était vanté, pas plus tard qu'il y a deux semaines que les 4 chez nous, malgré des vies actives, souvent au coeur des foyers de Covid, n'avions jamais eu la chose. Y en fallait un. Ce serait moi. Celui qui fait les épiceries qui ne se feraient pas. On a manqué de pain trois jours plus tard. N'en avait pas plus au 5ème.

Me rendant au bureau, lundi soir, chercher mon ordinateur portable afin de travailler de la maison, je m'était mis ma liste de lecture Offering de Ravi Shankar dans la voiture pour me relaxer. Oui, ça m'a rendu nerveux. D'abord pour mes enfants, qui étaient soudainement à risque. J'ai lavé avec des petites lingettes la poignée de leurs voitures que j'avais conduites pour les changements de pneus dans les derniers jours. Je veux rien saboter autour de moi. L'amoureuse tousse un peu aussi. Ça dérange. On s'isole. On se construit des murs. On porte des gants, on touche à tout, ganté ou avec une lingette. On se lave les mains ou se les Purel tout le temps. Oh merde! qu'est-ce que ça implique maintenant tout ça ?

Je ne sors plus (faux, j'ai pris des marches tous les soirs), je ne mange plus avec les autres, le lavage ne se fait plus puisque je suis seul en haut dans ma pièce et que c'était toujours moi le lead là-dessus. Ils pensent parfois que ça me plait. C'est faux aussi. Pas à 100% mais faux. Ce qui est vrai est que j'occupe ma maison comme je le ferais en tout temps. En condo. Dans une seule pièce. Où il n'y manque que la douche, mais qui est la pièce suivante. Et "ma prison" contient le rameur, les films, les livres, ouais...ça, c'est vrai que ça me plait comme cellule. Que je marche de longs en large quand ma montre me dit "levez-vous".  

Mais après 6 jours comme ça, les autres me manquent. Ravi me revenait en tête. 

On se parle par téléphone. Au travers des portes. Je parlais moins. Ce qui me faisait moins tousser. Je dois admettre que le silence forcé m'a fait du bien. Habitué au silence du matin et à celui que je meuble de ce qui joue dans mes air pods, parfois longtemps, au travail, j'ai gardé l'habitude de me lever à 5h, mon corps (ou le chat ou les deux) garde l'habitude d'exiger de me lever à 5h, et je n'ai plus les étourdissements du début de ma Covid. La lourdeur du matin du test, c'était aussi les vertiges. C'était la somme de toute sortes de choses qui m'ont forcé au test. 

Étrangement, passé cette journée de test, je n'ai jamais senti que j'étais vraiment malade. 

J'étais même détendu. Léger parce que je perdais du poids en mangeant moins et en ramant. J'écoutais du France Gall sans ironie. Avec envie de danser ou de jouer la guitare sur Musique.   

"What's you doin'? slave"

Le chat, inconscient de tout ce qui déroule dans nos inquiétudes continuait à se comporter comme si la terre et les gens qui la composent ne sont que pour ses envies. Dans le silence matinal, entre 5 et 8- 8h30 on entend parfois uniquement son mauvais miaulement exigeant de l'attention. Généralement répondu par moi, qui le nourrit, lui change son eau, lui mets son grelot, le sort, le rentre. 

Le silence habituel des premières heures de travail était le même, même une heure plus longue puisque je ne me rendais qu'à trois pieds du divan (où je suis forcé de dormir) et pouvais commencer à travailler dès 5h09. 


Dans le silence du samedi matin,  je n'avais pas de raison de me lever à 5h00 mais bon, c'est mon corps qui décide. J'ai eu, sans s'annoncer, un vent aux effets inattendu. Il y avait deux portes d'étanchéité entre la puce, l'amoureuse et moi. Et j'ai réussi, en raison d'un mauvais calcul gastrique qui a catapulter, que dis-je canonner, avec chaleur, un bruyant et fort sonore coup de flûte qui fausse, aussi cousine du trombone. Le plus vulgaire des pets qui a réveillé les deux têtes ensommeillées. C'est mon corps qui décide, j'ai dit.

Elles étaient frustrées. Je les comprends. On ne veut pas d'un klaxon au réveil. J'ai peu souffert pendant ma Covid. Ce n'était qu'achalant et légèrement contraignant.  

Je n'ai rien perdu de mon odorat. Ce matin là, je le savais pleinement. 

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