Il avait tout gagné.
Il avait commencé sa carrière avec le Torpedo de Gorky, sa région natale. À 17 ans le gros défenseur soviétique ne brillait pas nécessairement offensivement mais défensivement, il était impeccable. À 21 ans, le Dynamo de Moscou le signe dans son équipe. Le Dynamo est le seul club à avoir participé à tous les championnats au plus haut niveau national. L'entraineur Arkady Tchernytchev, qui est aussi le joueur qui a marqué le tout premier but de l'histoire du club en 1946 sera entraineur du Dynamo pendant 28 ans. C'est lui qui engage Vassiliev.
On connait la rigidité soviétique de l'époque. Il y règne une atmosphère millitaire perpétuelle. Vassiliev a comme partenaire de duo Vitali Davydov, de dix ans son ainé. En URSS, on ne change pas les unités comme on change de paire de bas. Les trios sont toujours les mêmes. Les tandems, inséparables. C'est pour favoriser l'instinct, la chimie, la cohésion à trois, à deux. L'équipe.
Dès son année recrue avec Moscou, en 1970, Vassiliev aide son club a gagner la médaille d'or aux championnats mondiaux. Deux ans plus tard l'URSS rafle l'or aux jeux olympiques d'hiver de Sapporo au Japon (le Canada ne participe pas aux championnats internationaux de 1970 à 1976). L'équipe, en plus de Vassiliev, contient Valery Kharlamov, un centre reconnu comme le meilleur joueur de hockey au monde et Vladislav Tretiak, un jeune gardien de but reconnu comme le meilleur dans son rôle sur la planète. La même année, 1972, Vassiliev remporte aussi la médaille d'argent aux championnats du monde. De 1973 à 1975 l'URSS remporte la médaille d'or aux championnats du monde. L'équipe de Vassiliev gagne aussi l'or aux olympiques de 1976 à Innsbruck en Autriche. Toujours en 1976 son équipe remporte la médaille d'argent cédant l'or à la Tchécoslovaquie qui a une redoutable ligne de jeunes frères Stastny au sein du club. Cette médaille d'argent a une saveur particulière pour Vassiliev qui contribue offensivement comme il ne le fera jamais plus: 5 buts 2 mentions d'aides, 7 pts en 10 matchs.
Le bronze à la Coupe Canada de 1976, le bronze aussi aux championnats du monde de 1977, l'or en 1978 et 1979 aux championnats du monde, l'argent face à l'équipe cendrillon des États-Unis aux Jeux Olympiques de Lake Placid en 1980 (le Canada n'y est toujours pas), l'or en 1981 aux championnats du monde, à la Coupe Canada la même année et aux championnats du monde en 1982.
Il joue en URSS encore deux ans. Il en demande quand même beaucoup à son corps de 33 ans et en URSS de l'époque on le travaille énormément le corps. De 1984 à 1991, il jouera encore en Allemagne et en Hongrie. Il prend sa retraite à l'âge de 42 ans.
En 1998, il est intronisé au Temple de la renommée de la Fédération internationale de hockey sur glace.
Le brave #6 avait tout gagné mais en Amérique, on s'en rappelle surtout pour une défaite.
Comme vous le constatez, le Canada est passablement absent des confrontations internationales, donc absents des duels contre l'URSS. Alors en pleine guerre froide avec l'Amérique, dans les années 50, 60 et 70, l'URSS se vantait d'avoir sur son territoire le meilleur club de hockey au monde. Le Canada aussi. On commande donc une série de 8 duels entre les joueurs du pays de Pierre Eliott Trudeau et ceux du pays de Leonid Brezhnev (plus de détail sur le sujet et cette série le 28 septembre prochain) pour déterminer le vrai du faux.
Lors du spectaculaire match final, celui qui commet la bourde en perdant mollement la rondelle à quelques secondes de la fin dans sa zone et qui profitera victorieusement au Canada, le #6 ne rouge ici, c'est Valeri Vassilliev.
À cette époque, peut-être encore aujourd'hui, on ne badinait pas avec ceux qui faisaient mal paraître le pays. On ne donnait pas cher de la survie de Vassiliev. Sur toutes les photos, bien qu'il soit directement, il n'apparait nulle part. On voit les 4 autres russes, le gardien mais Vassiliev n'apparaît nulle part. Comme si le coupable avait été effacé par l'État.
Vassiliev a visiblement survécu aux foudres potentielles de son pays puisqu'il n'est mort que le 19 avril dernier. Il avait 62 ans.
(Les infos nous arrivent encore en retard de l'ancienne URSS)
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