jeudi 9 mai 2019

Poésie du Nord

Notre rythme de vie ne fait aucun sens.

Mes journées commencent à 5h00 se terminent vers 19h. Je ne cesse jamais de brûler du pétrole tout en recyclant, travaillant des muscles que je ne me connaissais pas au travers du Québec, et ce, depuis deux semaines, 5 jours par semaine.

Ça me fait de fort jolies paies, mais ça me tue aussi. C'est pas une vie.

Ce qui me plaît toutefois, et c'est ma soeur J.J. qui me le faisait remarquer, c'est le zoo que je fréquente toutes les semaines.

On s'envoie des "snaps" (une photo de notre journée)tous les jours et depuis plus de 100 jours et ellle me faisait remarquer que je ne cessais d'envoyer, depuis peu, des animaux que je croise un peu partout. Ils sortent tous avec l'arrivée du printemps.

Un lièvre à McMasterville. Une marmotte à Anjou. Une mouffette à Contrecoeur. Un malard séduisant une canard à Pierrefonds. Plusieurs jeunes chevreuils, plusieurs fois à St-Calixte et même à Anjou, dans le boisé du golf, près de deux marmottes écoutant le trafic avec nervosité. Une famille de raton laveur à Vaudreuil Dorion.

J'ai vu tout ça mort aussi. Moins joli. Si j'ai immortalisé sur Snap chat l'animalerie qui m'entoure quand je pilote nos camions, je n'ai pas enregistré ailleurs que dans ma tête les cadavres de ces mêmes animaux. Ni ce corbeau qui grugeait le coeur d'un écureuil éventré au milieu de la route. Mon sang Atikamekw (et le combat des livres à la radio) m'a fait réserver un livre de Naomi Fontaine.

Voyez, ma routine du lundi au jeudi me paraît déjà beaucoup plus vivante à vous l'écrire.

Mais la vraie, la vraie poésie, elle me vient de la musique que j'écoute issue de mon téléphone dans ma dernière heure de route, celle où je retourne à l'entrepôt vider le camion.

Toute est dans toute disait Pichnoutte, poète du nord. 

Une photo de Sheila E., son visage d'aujourd'hui, envoyée dans mes courriels par un de mes amis l'an dernier, a été le déclic pour une (re)découverte de Prince et de son univers. Je suis devenu complètement fanatique de Prince. Spotify m'a confirmé en fin d'année que l'artiste que j'avais le plus écouté en 2018 avait été Prince. Un mort. Suivi de David Bowie, moins surprenant, mais tout aussi mort.
Je vous écrit ceci sur une liste de lecture de Prince.

En jubilant, chantant à tue-tête une de mes chansons préférées sur terre, The Whole of The Moon des Waterboys, au volant du camion, de retour du travail, je me rappelais que Mike Scott et Karl Wallinger avaient tous deux composé le morceau après avoir été ébloui par un show de...Prince. Tentant d'en reproduire la magie aux claviers. Wallinger a aussi rajouté, en fin de chanson, un clin d'oeil à... David Bowie! en imitant les vocalises que Bowie empruntaient vers la fin de Fame.

Toute est dans toute à dit Vladimir Pitchnoutte.
Poète Inut.

Je me rappelais aussi le video de The Whole of the Moon. Une chose toute simple. Une prestation du groupe. Dans les teintes de bleu. Une esthétique commune des années 80. Mes si aimées et vécues années 80. Karl, fier au piano. Chris excité derrière son drum. Mike avec sa touffe de cheveux me rappelant la triste mienne du début des années 80. L'insigne du marin sur la droite, qui parlait au marin en moi (J'étais prof de planche à voile et de catamaran dans un camps de vacances de 1986 à 1991). Mick au violon et Roddy à la trompette. Max Edie, dont j'étais (suis toujours) si amoureux. Si mélodique dans son chant, un oiseau dans un si joli vent. Sa tenue vestimentaire, si élégante qu'on se surprend à vouloir la vicier. Le sax d'Anto qui naît dans le lancement de la comète.

Pourquoi le saxophone n'est plus dans la musique pop?
Le saxophone pourrait s'intégrer au hip hop?
Devrait.
Si le hip hop veut être pris au sérieux, tous les instrument doivent avoir le droit d'y être intégré.

Ma vie refait du sens si j'y intègre l'art. Si j'écoute ma musique au retour du travail. Si je compose moi-même de retour à la maison. Si je relis Ducharme pour le plaisir, en attendant Fontaine. Si j'écoute un brin de film avant de me coucher. Si mes yeux plongent dans ceux de ma blonde, rient avec mon fils, ma fille ou cette même blonde. Si on fait du feu ensemble, juste à se regarder.

Si la route, je ne la vois plus.

Mon rythme de vie ne fait pas de sens.

Mais quand tout le monde n'en voit que le croissant,
moi je vois le trou dans la lune.

Et m'y glisse.

En bon garçon d'eau irlandais.

En Atikamekw aussi.

Tentant d'influencer les larges océans plein de larmes.

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