Il n'existe pas.
Ou il est différent pour chacune.
Il est attirant pour l'être aimé. Et sublimant pour celle qui aime.
J'imagine le beau gosse aller jaser avec la belle, de tout de rien, l'écouter elle, sur ce qui lui fait du bien. Pas même l'idée de la coucher sur un divan et de jouer du robinet. Le simple plaisir d'être à deux par un printemps qui ressemble beaucoup à l'été. Elle lui donnerait deux baisers sur les mains quand elle le quitterait tous les jours. Il lui demanderait le genre de choses qu'on ne devrait pas demander. En tout cas pas à voix haute. Il existe une forme d'intimité, de rapprochements qu'on se doit de ne pas commenter sous peine de le diminuer, voire de le voir disparaître, changer. Il lui demanderait quand même. Parce que c'était un garçon et que les garçons sont bêtes. Ils sont aussi des bêtes.
"Qu'est-ce que ça veut dire? enfin pourquoi? pourquoi me donnes tu deux baisers sur les mains chaque fois qu'on se quitte?"
Elle sourirait. Replacerait une partie de ses cheveux derrière une oreille. Prendrait en se rapprochant une de ses mains à lui et la collerait d'abord sur sa poitrine, là où se trouverait son coeur à elle. Puis, elle la placerait sur l'une de ses épaules et finalement flâtant son menton pour terminer son parcours doucement sur sa joue. Elle pencherait sa tête sur le côté et la coucherait entre la main de l'être aimé et son épaule à elle. Elle fermerait les yeux deux secondes. Il grimacerait un peu, sans comprendre. Elle lui répondrait finalement:
"Je l'embrasse une première fois pour te laisser savoir comment j'aime la manière dont tu me touches, puis une seconde fois pour les protéger du mal et m'assurer qu'elles seront bonnes pour moi"
Et un cardinal sifflerait une chanson à ce moment-là.
Sur un banc plus loin, une autre amoureuse serait avec son beau. Ou enfin celui qui souhaitait entrer dans sa vie. Il serait nerveux. Elle lirait. Toujours. TOUJOURS. Roth, Gary, Modiano, Benaquista, Barrico. C'est d'abord par les livres qu'elle dévorerait qu'il serait séduit. Ce petit côté intellectuel lui allait si bien. Il la devinerait timide et angoisée. Sinon pourquoi se rongerait-elle les ongles? Pourquoi préfèrerait-elle toujours se plonger dans l'univers d'un livre au lieu de causer avec un collègue après diner? Chaque fois que leurs regards se seraient croisés, elle aurait paru nerveuse. Quand il lui aurait demandé si il pouvait prendre une marche ensemble sur l'heure du midi, elle aurait baissé les yeux, gênée et aurait poliment refusé. Intimidée. Il aurait tout de suite eu envie de vouloir la protéger de peu importe ce qui lui faisait peur.
Elle irait lire seule dans le parc. Il arriverait doucement par derrière et irait la rejoindre sur son banc. La forçant à sortir de son livre. Lui demandant si elle écoutait du jazz, du classique ou n'importe quoi. Les yeux dans les yeux, ils s'intéresseraient tous les deux. Au point d'en devenir amoureux.
Et un rossignol chanterait une mélodie pour rythmer l'instant.
Puis sur un banc plus loin il y aurait une dernière amoureuse. Elle aurait mis la belle robe blanche que sa grande soeur lui aurait donné et qui lui irait si bien. Qui la renderait si désirable. Elle le verrait bien qu'elle attirerait les regards, mais si au départ ça lui plairait car ça confirmait l'effet qu'elle voulait produire, ça la déprimerait un peu aussi. Ce n'est pas à tout le monde qu'elle voudrait plaire, ce serait à lui. Lui qui lui plairait tant mais qui ne serait pas toujours clair sur ses investissements...De plus, il serait en retard, ce qui le rendrait à la fois fatigant-viendra-t-il? me posera-t-il un lapin?-à la fois séduisant. Ce moment de tension rendrait son arrivée plus intense encore. Et effectivement quand il arriverait elle bondirait vers lui et lui prendrait la main, parfaitement heureuse et convaincue que cette main qu'elle prenait serait ferme et pleine de désir envers elle. Et vice-versa. Un désir qu'elle ne voulait en rien rationaliser risquant de perdre la chaleur passionnée du moment.
Des désirs heureux entre amoureux.
Et au loin on entendrait un moqueur geai bleu.
Parce que tout ça n'est pas sérieux.
Ce parc existe un peu.
Je le sais je pratique mon jogging dans ce décor chaque matin.
Entouré de poussettes, de mamans et de nouveaux nés.
Et pour qu'il y ait du bébé, il faut qu'il y ait eu parfum de désir, ne serait-ce qu'un moment.
Ombres amoureuses et partenaires passionnés.
C'est le premier jour de l'été dehors.
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