Il avait choisi de siroter son café au lieu de se présenter à Top of The Pops pour y faire un clip d'une de leur chanson. En lip sync. Ce que Syd ne tenait pas à faire. Les gars l'avaient cherché partout. Ne le trouvaient pas. Pour sa 3e apparition à la télévision avec son band, il aurait toute la misère du monde à s'y trainer de force et à tenir son instrument. Voilà une danse auquel il ne voulait pas participer. Sur scène, il avait, en spectacle désaccordé sa guitare progressivement en jouant un morceau au point que ces cordes étaient devenues molles comme des spaghettis. Ça devenait frustrant pour les autres du band. On l'avait sorti de son propre band. Il ne veut pas jouer ? Alors qu'il aille ailleurs. Le reste de la tournée aux États-Unis avait été annulée. Il polluait l'ascension de la réussite du band. On voulait créer, c'était lui qui amenait les idées. Il ne le faisait plus. La dernière chose qu'il avait fait avec eux, c'était les faire rire.
Il était arrivé avec un morceau appelé "Have You Got It Yet ?" qu'il montrait aux autres en changeant la manière de la présenter, toutes les fois. Disant que "non, ce n'était pas ça" Jusqu'à ce qu'ils comprennent que le titre et l'exécution étaient liés et que c'était un gag à leurs dépens. Mais là plus personne ne riait. Il gâchait la sauce commune. Inconfortablement engourdi. Il fallait lui montrer la sortie.On allait faire une dernière photo. À 5, ce que Syd ne compris pas tout de suite. David ? mon ami de Cambridge ? Sur la photo ? ok. Rick Wright serait planté en plein milieu, lunettes d'aviateur sur les yeux, assis sur un vélo. "un bike", comme un dernier hommage au diamant fou.Si David Gilmour était du band depuis Noël 1967, Syd n'en serait sorti qu'en avril 1968. On lui ferait comprendre plus clairement. Il était trop égaré pour la lignée certaine qui les guidaient. Il a compris tout de suite. Si Syd ne voulait pas être là, pourquoi y être ? Mais si c'était fini pour lui Pink Floyd, ce n'était pas fini pour lui, le son dans sa tête. Il le pourchasserait toujours. Il a convaincu EMI de le reprendre dans leurs studios pour qu'il peigne les sons dans sa tête frisée. Une tête aux chansons éparpillées. Pas complètement ordonnées. Une impression de commencent de chansons et de fins improvisées.
Comme si il lui manquait 3-4 amis pour les compléter. Son album solo serait lancé en janvier 1970. Le psychédélisme fractionné serait impénétrable pour l'auditeur moyen mais ferait des fans chez un jeune David Bowie, Robyn Hitchcock ou encore chez Guided By Voices. Mais quand le produit est lancé, aidé de David Gilmour, Roger Waters, Jerry Shirley de Humble Pie et Kevyn Ayers de Soft Machine, on ne sera jamais certain si les gars ont laissé ça comme ça pour punir Syd ou simplement pour montrer à quel point il était devenu le moins professionnel de leur entourage.Un second album serait enregistré sporadiquement alors que Pink Floyd allait successivement enregistrer Ummagumma et Atom Heart Mother. Avec Syd, les espionnant, de temps à autres. à distance. Sans qu'eux ne s'en aperçoivent . On leur indique qu'il y était, mais il est comme il était sur scène. Fantôme.
Lancé 7 mois après le premier effort, encore produit par David Gilmour, mais aussi avec l'aide de Rick Wright, le second effort solo était légèrement plus cohésif. Ça lui a donné l'impression de se réinventer créativement. Il est retourné vivre chez ses parents, à Cambridge. Une sorte de cellule mentale qui garderait les distractions au loin. Mais aussi une désolante isolation. Une ostracisation. Il pourrait s'y concentrer su une seule chose, ce son qu'il pourchassait. Il jouerait dans un trip appelé Stars.En février 1972, alors que je nais, Stars annonce un spectacle à Cambridge. Le mot s'est vite passé que l'ancien Pink Floyd allait être sur scène pour la première fois en 4 ans. Le spectacle s'est vite complètement vendu. Syd s'était acheté une nouvelle paire de pantalons en velours. Mais dès qu'il a joué les premiers accords, le souvenir de la tournée aux États-Unis lui sont revenus. Le son, la soirée, ce n'était pas ce qu'il avait sous les yeux et dans les oreilles. Ce qu'il sentait partout autour, c'était la puanteur de l'argent. Il a oublié de chanter, le bassiste en a manqué ses entrées dans la première chanson, les doigts de Syd saignaient parce qu'il grattaient ses cordes trop fort. Il cherchait des yeux un coin de la scène tranquille où il pourrait s'y cacher et y soigner ses doigts.
Quelques jours plus tard, le magazine Melody Maker a publié une peu flatteuse critique. La rumeur se confirmait. L'artiste Syd Barrett n'avait plus rien. Il avait tout donné bien avant. Il y a trop longtemps. Ce qui le plaçait dans la catégorie des has-been. Et il ne trouvait jamais ce son de merde.
Ridiculisé, il n'avait plus envie de rien. Retournant dans le sous-sol de chez ses parents, il s'en prendrait au plafond en le frappant avec sa tête, à répétition. Ne tenant pas compte du sang qui lui coulait sur les tempes. Si il frappait assez fort, peut-être pouvait-il chasser ce son difforme dans sa tête ? Les ouvertures dans sa tête lui montreraient peut-être la couleur de ce son introuvable.
Quand Pink fait des millions avec The Dark Side of the Moon, Syd est sur cette partie sombre de la terre où plus rien ne lui fait rien. En juin 1975, David Gilmour et Roger Waters se chicanent encore. Gilmour veut plus de chaleur musicale, Roger propose plus brut. Rick Wright aura le dernier mot avec un peu d'aérien. La tension n'avait jamais été plus grande, on aurait dit que chacun voulait voir l'autre en feu pendant qu'on lui serrait la main.
On signerait un peu de nostalgie avec la chanson titre, directement adressé à leur ami du passé et les multiples variations des élans de Rick Wright sur lequel on mettrait les mots "Shine on you crazy diamond".
Et comme si on l'avait sommé de venir écouter un hommage qu'on lui rendait, un homme qu'on ne reconnait pas tout de suite parce que la tête rasée, en surpoids, même les sourcils rasés, avec une drôle de couverte comme linus dans Charlie Brown, un sac de plastique dans les mains et une brosse à dents dans la bouche traine en studio pendant le mix. On l'a tous vu, et on pense qu'il s'agit d'un égaré mental.Égaré. On ne se trompe pas beaucoup. Mais on ne se trompe pas sur le reste. L'homme s'assoit à côté d'eux. Roger est le premier à avoir les yeux pleins d'eau car il reconnait les yeux qui le regardent. L'homme se met debout saute pour montrer qu'il arrive à se brosser les dents sans utiliser ses mains. Encore, Syd veut faire rire. L'humour comme lien d'unité. Comme si on avait encore 9 ans.
Il fait aussi pleurer.
Syd demande si il peut accorder sa guitare. On s'excuse la guitare de David est toute enregistrée. On lui fait entendre. C'est à des milles de que Syd est capable de jouer. Si il le comprend, il ne le laisse pas savoir.
Syd est retourné vivre à Cambridge. Prends des photos de choses. Peint la même chose. Prend une photo de sa peinture. Détruit le tout. Répète la chose. Jusqu'en 2006 où il meurt à 64 ans du cancer du pancréas. Faisant encore pleurer David, Roger, Rick & Nick.
Syd aura été le diamant fou qui les as tant inspiré il y a 50 ans, cette année.
Souhaitant qu'il y soit encore. Dans un son partagé, et non isolé.
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