Puis, au milieu de l'année, Un groupe anciennement punk de Minneapolis devenait le centre d'attention avec un videoclip qui nous les présentait pour la première vraie fois, et qui posait la loupe sur les enfants fugueurs. Ce qui n'a pas été souvent compris comme il fallait.
Les créateurs de MTV aiment faire croire qu'ils ont aider à "sauver" près de deux douzaines de vies (21) avec le clip de Runaway Train, mais la vérité est légèrement différente. Les "sauvé(e)s ne demandaient pas nécessairement à se faire trouver. Ils/elles avaient des raisons de fuir du toxique. On a pas tous la chance de naitre au bon endroit, au bon moment. Quand Tony Kaye, aspirant réalisateur, supervedette du clip, avant de devenir persona non grata dans le monde du cinéma, est choisi pour investir les 100 000$ que la compagnie de disque investit dans le clip, il insiste sur le concept de fugue sans réel consentement. Il tournera un homme au cheveux blancs attirer un jeune garçon avec des bonbons. Un femme désespérée voler un bébé dans sa poussette. Il suggérera des dérives dans la prostitution pour certain(e)s. Il ajustera le nombre de 800 000 à 1 million d'enfants disparus aux États-Unis, en ouverture de clip. Il présentera 36 visages qui étaient la clientèle de ce genre de station musicale, et qui étaient "disparus".Le vidéo et la chanson suscitent un tel intérêt que des versions différentes, avec des disparu(e)s différent(e)s en Australie et en Angleterre seront aussi tournées. Le vidéo est un succès dès qu'une jeune fille de 16 ans se reconnait et entre en contact avec sa mère, en Arkansas. L'idée fonctionne à merveille.
Dave Pirner, chanteur/guitariste de Soul Asylum et auteur de la chanson, dit avoir été au plus bas de sa vie, son band ayant été largué par la compagnie de disque avant cette chanson, et craignant sérieusement perdre l'audition, après des années punk aux sons mal calibrés. Il passera très près de perdre l'ouïe, l'ultime insulte fatale pour un musicien. Il s'inspire de Woody Guthrie pour parler de train et parle d'évasion mentale. Il parle d'aliénation sociale mais pas complètement de fugue physique. Il se sent dans le pire du pire. Il ne sait pas qu'avant la fin de l'année, leur nouvelle étiquette leur fera faire plus d'un million de vente d'albums, qu'en 1994, la chanson gagne le Grammy de la meilleure chanson "rock", qu'encore aujourd'hui, c'est leur chanson la plus écoutée sur les sites de diffusion dépassant le 250 millions et plus de 200 millions aussi sur Youtube. En septembre 1993, la fille de Bill & Hillary Clinton, pour ses 13 ans, avait droit à un show privé du band car elle adorait le morceau.
MTV se targuait alors, encore de nos jours, d'avoir "sauvé" 21 vies.Oui et non.
Le journaliste Nick Keppler, cette année, a tenté de connaître les 21 personnes retrouvées. 4 sont mortes. Ce qui ferait qu'il n'en manquerait maintenant plus que 11. Ils/elles sont tous/toutes dans la quarantaine maintenant. Presque tous lui ont parlé. Et TOUS ont eu le temps de lui dire qu'ils/elles étaient déterminé(e)s à fuir la famille. Et qu'il/elle n'ont jamais été "sauvé(e)s" par le clip.
Leurs fugues étaient toutes de plein gré. Les disparu(e)s avaient choisis de l'être. Et n'étaient pas tous/toutes près/prêtes à être retrouvé(e)s. La panique publique masquait les compliquées vérités les forçant à se pousser.L'une d'elle avait même approché le guitariste Dan Murphy afin de lui demander "Why are you fuckers trying to ruin my life?".
Joyce Collier perd son père très jeune et doit alors s'occuper et élever son petit frère et sa petite soeur. Elle n'a jamais la chance d'être elle-même, une enfant. Sa mère a comme copain un consommateur de craque qui abuse sexuellement de Joyce. La mère de Joyce ne croira jamais ses propos. Elle est forcée de quitter la famille à 15 ans. Elle tombe enceinte presqu'aussitôt. Elle tente de rester discrète jusqu'à ses 18 ans. Nous sommes en 1992. Son visage passe à la télévision l'année suivante. Elle en est choquée. Sa mère veut le retrouver mais son abuseur de copain est toujours là. Ils ne pourront jamais se réconcilier, elle ne croira jamais sa version des faits. Elle aura 2 autres enfants. Rien qu'elle en voudra présenter à sa mère.Les enfants maintenant grands, elle est très heureuse d'enfin s'occuper d'elle-même.
Ginger Hudson est élevée par une mère monoparentale. Ginger est agoraphobe. Seul(e) à seul(e), aucun problème. En public, dans les foules, son cerveau se déséquilibre. Son frère et sa mère n'y comprenne rien. Ne font rien pour l'aider. Elle est forcée de fuir pour ne plus aller à l'école. Elle aura une fille, voudra se marier afin d'avoir sa carte verte le plus rapidement possible. Mais sa mère en a vent et fait tout annuler. Elle trouve un camionneur qui passe le 3/4 de son temps seul, dans son camion. Ils seront partenaires de vie. Elle vit avec lui. Dans son camion. Elle se construit une vie à l'abri des autres. Elle est heureuse avec lui jusqu'en 1999. Elle vit avec sa fille et le père de celle-ci, son ancien amoureux, et est médicamenté pour son anxiété. Mais devait fuir ceux qui ne l'aidaient en rien. Sa famille.Jessica Molnar est née Jessica Williams. Dit ne jamais avoir eu de père, mais une succession de beau-père. Elle fuit son foyer toxique à 16 ans. Change de nom afin de pouvoir travailler sans passé retraçable à sa mère. Elle tente d'entrer en contact avec elle avant la diffusion du video. Elle a terminé l'école. S'est mariée, a eu trois enfants, s'est divorcé, en a adopté deux autres. Travaille. Elle est heureuse. N'a jamais regretté sa fugue. Elle quittait des cycles de violence toxique.
Emily Pois ne comprenait pas pourquoi ses ami(e)s d'école la trouvait bizarre au Colorado. Elle ne se savait pas Asperger. Tout ce qu'elle savait était qu'on l'a choisissait pour la taquiner méchamment. Adolescente, elle trouve refuge dans l'univers punk, qui ont l'énergie qu'elle dégage. C'était plein de gens qui ne pensait pas entrer dans des moules nulle part. Elle pensait vivre avec eux. Elle avait 2 bons parents enseignants et deux frères et soeurs, mais n'arrivait pas à cadrer nulle part dans le monde ordinaire. Elle devait vivre l'extraordinaire.À 13 ans, elle a pris l'autobus pour quitter la région avec ses ami(e)s punk. Elle gardait contact avec ses parents pour leur dire qu'elle était en vie. À 15 ans, elle était à Minneapolis. Découvre le video de Soul Asylum. Se pointe à ses ami(e)s qui ne la reconnaissent pas et ne la croit pas. Elle n'insiste pas. La drogue s'installe dans son univers et les gestes cruels. Pendant trois ans, elle perd la tête. Redevient "disparue" en 2015. Elle est aujourd'hui stable, selon elle, a un bon job, et ne demande pas à être retrouvée. Pas plus qu'avant.
Heather Lee Yagle se souvient de son père qui l'arrachait à sa mère pour se pousser dans un culte avec elle, en Floride. Des agents du FBI la ramèneront à sa mère. Qui elle a refait sa vie avec un homme qui abusera sexuellement Heather dès ses 5 ans. Là aussi, sa mère ne croira jamais ses versions des faits. À 16 ans, elle rencontre un récent veuf de 25. Ils se consolent ensemble. Ils fuient ensemble en Virginie où les gens de 16 ans peuvent marier des adultes. Le propriétaire du condo où ils ont trouvé un arrangement pour payer en s'occupant des logements sur place, lui dit la reconnaître du clip de Soul Asylum. Elle a alors 20 ans. Elle est sous le choc d'apprendre que sa mère la recherche. Elle sera du Jerry Springer Show, qui n'était pas encore 100% grossier, pour rencontrer à nouveau sa mère. Ce serait la seule fois que ça arriverait. L'abuseur restant le choix de maman.Kristina Marie Benedetto meurt en 2019, noyée dans un spa, seule, suite à une crise d'épilepsie. Elle avait été sexuellement abusée par son beau-père.
Le spectre du kidnapping ou du rapt d'enfants est donc loin de ces cas. La vie des fugueuses et des fugueurs étaient très compliquée avant de prendre le train d'une certaine liberté. On fuyait des écarts sexuels, des cycles de violence, des jours d'école normaux pour tout le monde sauf pour soi, ce que personne ne comprend.On quittait des traumatismes nés, à la maison dont on se débarrassait.
Et à qui la télé, la radio, nous suggérait de tendre à nouveau la main.
La stabilité désormais trouvée ne se trouvait pas là. Ces jeunes fuyaient une toxicité, un étouffement.
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