mardi 19 avril 2022

Donne, n'attend Rien et Ne Demande Pas, Jones

Je regardais le leader syndicaliste Louis Laberge chanter "un coup de matraque, ça frappe, ça frappe, un coup de matraque, ça frappe en tabarnak" amenant ensuite la foule à se joindre au chant "Deux coups de matraques, ça frappe, ça frappe, deux coups de matraques, ça frappe en tabarnak!" et ainsi de suite, en parallèle d'un discours de Michel Chartrand. 

C'était 1971. Y a plus de 50 ans. Chartrand jasait d'injustices chez les travailleurs. En Angleterre, à Winnipeg en passant par Rouyn ou Lennoxville. Comme il a fait toute sa vie. On le traiterait de "woke" de nos jours pour ses propos. Ce mot, qu'on voudrait tant péjoratif, qui a autant la portée du mot tapette pour parler d'un(e) homosexuel(e), dans les années 70 au Québec, que l'envie de clivage social avec le même niveau de morale sensationnellement douteuse. 

Je les trouvais inspirés. On a plus le même type d'inspiration de nos jours. On a des Le Pen, des Trump, des De Santis, des Duhaime, des Taylor-Greene, des Charest, des Putin. Oulàlà...qu'est-ce qu'on a de la bouette...

Je regardais une caméra plantée dans une cour d'école secondaire de jeunes de 14 ans. Les filles se poussaient pour jouer les reines de la mode devant la caméra. Instagram avant l'heure.  Novembre et décembre 1971. Tout le film. On gagnait 1,62$ de l'heure. À coller des meubles avec de la colle Contact, sans réaliser qu'on se droguait à en perdre la vue à respirer la dite colle. À en perdre la vue. À s'en ruiner la santé. Je me posais sincèrement la question, plus de 50 ans plus tard, ne nous ruinons pas tous, un peu trop, la santé au travail, nous aussi, encore de nos jours ? 
Pas tous, non. Mais moi, oui. Je le sais. Je le sens. De tout mon corps. Depuis plus de 5 ans. J'en donne nettement plus que j'en reçois. Partout. C'est aussi pour ça qu'un médecin de famille m'est maintenant nécessaire.

Plus jeune il y avait cette maxime au dessus de l'évier familial: L'amour pur n'attend rien, il donne et ne demande pas. Cette maxime est devenue l'ADN des 5 membres de ma famille. Feu mon père, extraordinairement généreux. Ma mère se sacrifiant presqu'à temps plein. Mes deux soeurs, enseignantes, la plus vieille la hanche fâcheuse, mais on ne le devinerait jamais, enseignante en éducation physique qui s'agite sans réserve, et la plus jeune, qui enseigne en parallèle de diriger la tournée et de faire la mise en scène d'une troupe de théâtre adolescente sur les grands thèmes de leur âge. Et moi qui s'active du lundi au vendredi entre 5h et 16h30, sous payé, et dont les tâches changent peu à peu. Franchement pas pour le mieux. Good guys always finish last, tout en traduisant en fin de journée et les week-ends. 

On donne. Sans vergogne. 

Personnellement, je dépense tant d'énergie la semaine, que quand le week-end se pointe, je n'ai envie que de m'écraser. Je me lève vers 6h, ce qui reste encore une heure plus tard que d'habitude, je lis, j'écris, je traduis, je me fais une liste de lecture, j'écoute un film ou quatre. J'ai pas envie d'autres choses. Le week-end dernier, malgré deux jours sur trois dans la famille, dans le 418, tous les 4, j'ai réussi à finir un livre, en commencer un autre, regarder deux films, me travailler 4 listes de lecture sur Spotify. Vendredi soir et le lundi pascal. Et en famille, avec nos deux kids se dirigeant dans le domaine de la santé, on a savouré l'excellente série The Surgeon's Cut sur Netflix.  Moments de parfaite grâce familiale.

La belle fatigue d'après-ski qui se dépose sur soi comme la rosée printanière rafraichissante. 

Tout était agréable des derniers jours. On devrait toujours n'avoir que 4 jours de travail par semaine. 

Puis, on a eu un courriel de notre comptable pour les impôts. 

Combien pensez vous que je recevrai d'un des deux paliers gouvernemental cette année ?
Le sous-payé de l'Est de Montréal qui offre 50 heures par semaine mais qui s'en fait payer 40?


4,12 $

4 Dollars et 12 sous.

Je me suis étouffé de rire avec mon verre d'eau.


J'ai demandé si je pouvais le refuser. 
Moi, le si riche, le si "gâté" par la vie que je ne recevrai que l'équivalent d'un sac de pommes à l'épicerie. 

L'insulte peut arriver de plusieurs manières. 
Parfois, elle se manifeste par ce qu'on donne à ceux qui ne font que donner. 
Sans jamais demander.
Ce qui devrait m'empêcher d'être insulté. 
Mais l'an dernier on me disait que j'étais trop riche, que je devais donc payer.
Cette année on m'envoie comme message que je serais tout juste équilibré.

Je suis pas insulté.
Mais je viens d'échapper mes deux bras. 

Aucun commentaire: