Mais tous dans la cuisine. Et c'est surtout moi qui travaillait à cette époque. J'étais le plus âgé à 16 ans.
Il y avait dans cette cuisine Bruno Nigaud qui était aussi cuisinier. Je n'ai jamais vraiment su si il était débile léger ou attardé mental. Il était l'un des deux. Quand il parlait, réfléchissait, il en avait beaucoup de critères.
C'est dire si c'était inconfortable de jaser avec lui. Un jour, je bossais du côté de la vaisselle, sur le site, et Bruno me présentait la jeune fille qui me regardait travailler depuis un bout de temps.
"C'est pas plate de regarder un gars laver de la vaisselle en suant comme un cochon?".
"C'est pas toi qui avait servi le souper tantôt?"
"Oui, avec Bruno, on était supposé être 4 mais on a tout fait à deux et Bruno me laisse finir la vaisselle tout seul, semble-t-il"
"Bruno, c'est mon cousin".
"Oh, je suis désolé pour toi..."
"Ça veut dire que t'endure ses propos depuis beaucoup plus longtemps que moi".
Elle a encore ri. Bruno, qui restait pas loin, s'est défendu, mais il a eu l'air encore plus débile.
Le lendemain, Bruno me confessait que sa cousine me trouvait franchement de son goût. Comme j'étais encore fort occupé quand il m'a dit ça, et que les deux, la jeune fille et Bruno, avaient tous deux un côté franchement vulgaire, j'ai aussi été vulgaire.
"Alors dis-lui de se présenter en bikini ici la prochaine fois si elle est sérieuse" j'ai platement dit. Ne pensant tellement pas un mot de ce que je disais que j'ai fait un vrai saut quand elle s'est présentée en cuisine, en bikini, dès le lendemain. On avait encore beaucoup beaucoup de travail à faire en vaisselle, après avoir servi le souper, et comme j'étais le plus jeune, ma soeur 13 mois plus jeune encore, nous étions les deux à torcher la vaisselle et ne fournissions pas. Il y avait le repas des jeunes. Déjà servi, mais il y avait aussi le repas des groupes d'adultes. Le camp avait aussi des groupes d'adultes. Moins nombreux, qui mangeaient plus tard, mais il fallait faire quelques miracles avec la vaisselle entre les deux services, pendant que le méchoui grillait pour les grands sur la terrasse.
Ma soeur et moi on travaillait fort. Et Miss Bikini restait tout près. Nous regardant bosser. Je l'ai presqu'entendue roucouler. On a joué des yeux l'un envers l'autre. Puis, le grand frère a dit à sa plus jeune soeur: "Bon! je te laisse un peu avec la vaisselle, je vais aller chercher du bois pour le méchoui, ils en ont besoin" (c'était faux).
Bien entendu, Miss B. m'a accompagné dans la shed à bois. Un abri assez discret pour qu'on se rende au "premier but" ensemble.
"Ça te va?" que je lui avais demandé, tellement ingénu. "Oui, mais ne tremble pas".
On s'est facilement rendu au "deuxième but", puis elle n'avait plus de bikini. Troisiême but. Et moi j'étais aussi tout en peau. On se pratiquait à faire des petits bébés. Coup de circuit! Dans la shed à bois. C'était merveilleux. Jusqu'à ce que j'entende ma soeur J.J. venir "à ma rescousse" pour réclamer de l'aide avec la vaisselle, trouvant que je prenais trop de temps avec le bois.
Elle m'a coincé les pantalons baissés. En l'autre. Elle a vite changé de direction comme si elle ne m'avait jamais vu.
On a fait comme si rien ne s'était passé.
Ça devait être 1990. Ou 1991. On travaillait toujours au camps de vacances. Mais on était au moins deux à conduire, maintenant. J.J. et moi. Nos parents collaient au chalet. La plus jeune soeur aussi. Mais J.J. et moi faisions régulièrement des allers-retours Lac St-Joseph/Sillery. Une conduite de 30-40 minutes. On sortait avec des amis en ville et on couchait parfois à la maison de Sillery, alors déserte, ou on revenait le soir même au chalet. Ma plus jeune soeur, Greenjelly avait maintenant 15-16 ans, J.J., 17-18, et moi 18 ou 19. Mes deux soeurs étaient maintenant promues respectivement comme animatrice de groupes de jeunes (J.J.) et cuisinière/plongeuse (Greenjelly). J'étais moi-même prof de voile et planche à voile et locateur/conseiller des dits produits marins au centre nautique lié au camps de vacances, mais ouvert au grand public moyennant quelques frais.
J.J. et moi avions des vies très actives. Et on ne se consultais pas vraiment sur qui faisait quoi, quand. Un soir, j'avais fêté longtemps avec des amis, en ville, et avait choisi de dormir à Sillery, près de la ville, calculant que mon 5 heures de sommeil serait suffisant pour mon travail du lendemain. Quand toutes les embarcations étaient larguées à l'eau, ça devenait facile au centre nautique. On surveillait de loin, en circulation par petit bateau-moteur ou on prenait ça relax. Le lendemain, ça allait être le cas. Vers 9h AM, toutes nos embarcations seraient parties.
Mais ce soir-là, mon sommeil n'a pas eu le temps de commencer que j'entendais J.J. entrer dans la nuit et son amoureux, ricanant comme deux ivrognes. J'étais couché au sous-sol, dans le noir. Sur un divan. Pas question de défaire un lit qu'il faudra refaire pour 5 heures de sommeil.
Ma soeur et son amoureux ont aussi choisi de venir "dormir" au sous-sol. Dans la pièce principale. Sous la table de ping-pong installée. Sans réaliser que je tentais de dormir dans la pièce d'à côté, sans porte, sur un divan. À quelques 10 pieds.
J'ai bruyamment raclé de la gorge pour faire sentir ma présence. Mais, probablement trop gris, ils n'ont rien entendu. Monsieur a commencé à caresser madame avec un doigté regrettable pour mes oreilles. J'ai fait plus de bruit pour faire comprendre que j'étais là, et entendais tout.
Puis, quand les gémissements m'ont été trop insupportables. Je me suis levé et j'ai ouvert la lumière. Je n'ai jamais vu le visage de l'amoureux qui, anéanti par la honte avait arrêté ses mouvements la main entre les jambes de ma soeur, J.J. Il avait le visage étouffé de face dans un oreiller.
J'ai vite détourné le regard, ne voulant rien vraiment enregistrer de ce que je faisais en ce moment et ai simplement dit:
"La maison a 18 pièces, j'ai choisi de dormir ici en bas avant vous, pour y dormir mes 5 heures, je dors à 10 pieds de vous, please!". J'ai refermé la lumière. Ils étaient encore sous la table de ping pong 5 heures plus tard quand je suis parti travailler au lac.
On s'en est jamais parlé, ma soeur et moi.
On a fait comme si rien ne s'était passé.
On doit être une famille alourdie par les tabous.
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