Valérie voulait en finir avec Bruno depuis longtemps. Sans emploi depuis trop longtemps, il mangeait bruyamment à table, toujours des choses croquantes, faisant beaucoup de bruit, ou des pâtes, le faisant saper comme un animal. Il ne semblait pas s'en rendre compte et Valérie en restait outrée en tout temps. Elle n'avait jamais voulu de cette vie.
"Comment va la recherche d'emploi?"
"Oh! Ah pas si mal, tu sais que je gagne ma vie comme influenceur en ce moment, un peu..."
"Influen...mais tout le monde peut influencer tout le monde, ce n'est pas un métier, Bruno...tu ne reçois pas de sous..."
"Pas encore, mais bientôt, si je réussis à avoir suffisamment de "hits" sur ma chaîne youtube, J'aurai des offres..."
"Ta chaîne de Dongeons & Dragons qui compte 21 vues?"
"C'est un work-in-progress..."
Valérie, pour sa part, devait aller travailler, elle se libéra de cette atmosphère qu'elle sentait s'alourdir, et se rendit à son travail. Seule au bureau, en cette ère de confinement, elle avait la chance de ne pas avoir à porter de masque. Seulement quelques secondes pour se rendre d'un étage à l'autre en prenant l'ascenceur.
Bruno ne prenait même pas le temps de se culotter, maintenant. Il restait en sous-vêtements toute la journée. Valérie, en travaillant, se mit à entendre des cris de passions amoureuses.
"Il y a quelqu'un?" Non. Il n'y avait personne. Puis elle entendit encore plus clairement des miaulements amoureux. Elle mit fin à sa journée et se rendit plus tôt à la maison. N'ayant pas fait l'amour à Bruno depuis si longtemps, entendait-elle ses propres fantasmes? En plein coeur de cette pensée, elle arriva à la maison, surprenant Bruno en plein onanisme face à son ordinateur. C'était trop. Elle était si dégoûtée, si découragée, qu'elle se dirigea vers la cuisine sans trop vouloir accepter ce dont elle avait été témoin. Bruno la suivait derrière, s'excusant sans cesse de son indécence. l'agrippant par la taille, voulant peut-être se faire pardonner la bandaison bien entamée tout seul en la touchant à des endroits érotiquement stratégiques, ce qui irrita Valérie encore plus.
"Laisse-moi tranquille!" dit-elle en le repoussant si fort qu'il tomba sur la table en vitre du salon et s'éventra d'un large morceau de vitre lui transperçant le coeur. Valérie s'en horrifia. Bruno allait mourir sous ses yeux, comme ça? Encore bandé?"Je retire le morceau de vitre de ton corps!" dit Valérie paniquée, joignant la parole au geste, mais au même moment, dans la rue, un homme passa et remarqua Valérie, objet contendant ensanglanté en main au dessus du corps de Bruno. "Non" pensa-t-elle une première fois. Elle le repenserait assez souvent prochainement.
Sortant dans la rue rapidement, masquée cette fois, elle surprit l'homme en question voulant composer un numéro de téléphone d'urgence et avant qu'il ne puisse composer quoi que ce soit, elle lui planta le morceau de vitre au travers de la tête.C'était deux cadavres d'hommes qu'elle devait maintenant entrer dans des valises. Se rendant ensuite en voiture dans un champs perdu de St-Zénon, elle enterra les deux cadavres. Masquée, toujours. Une fois terminé, deux témoins au loin. Puis, 2 heures plus tard, deux nouvelles tombes aux côtés des deux premières.
Elle se couchera, cette nuit-là, dans un lit trop grand, légère et lourde à la fois.Deux jours plus loin, un joli jeune homme, de son âge, se présenta à sa porte comme détective. Un voisin avait disparu. Au-delà du cas sur lequel il devait travailler, il lui demanda si elle était interessée pour prendre un verre. Sur quoi ils se mirent d'accord.
Deux mois plus tard, ils étaient un couple aménagés ensemble, ailleurs. Mais Valérie héritait encore des tâches ménagères, du lavage, des lunchs pour 2 enfants qui n'étaient pas les siens. Et le trio devant elle, mangeait à table en faisant les clowns, en cochonnant absolument tout comme si ils avaient tous les trois 3 ans. Papa faisant des grimaces lui faisant perdre tout ce qu'il avait dans la bouche, faisant du coup, rire ses enfants de 6 et 7 ans. Salissant tant partout que Valérie ne savourait rien du moment, et ne voyait que fardeau par dessus fardeau. "Non" pensa-t-elle une dernière fois.
Trois nouvelles valises, deux petites, une grosse, peuplèrent sa banquette arrière, roulant vers St-Valère.
Une nouvelle vie se dessinait définitivement enfin pour elle.
"Oui" pouvait-elle enfin penser au quotidien.
Un destin de ville en ville, ou changerait constamment son identité, allait commencer.
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