Au hockey, quand les arbitres n'appellent pas les pénalités sur des gestes illégaux, les esprits s'échauffent. Le tempérament des joueurs des deux clubs prend l'ascenseur de la frustration et c'est un ascenseur qui ne se freine pas si les arbitres continuent de ne rien appeler.
Les joueurs se font alors justice eux-mêmes. Et ça dégénère.
On a un peu vécu de cela cette semaine au Canada.
En Colombie-Britannique, les chefs héréditaires de la communauté autochtone Wet'suwet'en sont farouchement opposés au passage du gazoduc de Coastal Gaslink sur leur territoire. Il n'y a toutefois pas unité sur le sujet. Le conseil de bande de cette même communauté soutient le projet. On est en conflit depuis très longtemps avec la GRC, qui est aussi la police provinciale de la Colombie-Britannique. On les veut hors des sentiers. On veut tout le monde hors des sentiers.
Par soutien, des Mohawks de Belleville en Ontario ont investi les rails de train, les forçant à l'immobilisme. Lundi, d'autres militants de l'Ontario ont bloqué le pont des Milles-Îles reliant l'Ontario à New York pendant environ trois heures avant de retraiter à la maison. À Montréal, une chaîne humaine a relié des gens entre les rues Sherbrooke Ouest et de la rue McGill. On a surtout bloqué la ligne de train de Candiac toute la semaine. Et on a fait la même chose à St-Lambert, où là, il y a un peu plus de Cegepiens voulant avoir du fun. Forçant l'arrêt des transports par train. Cette fois, sur un territoire non autochtone. Ce qui choque un peu plus. Les gens vont travailler autrement ou ne travaillent pas. Les conteneurs végètent. Les pertes anticipées ont grandies de jours en jours. On parle de ruptures de stock potentielles en chlore, en propane et en ketchup.
(...) vous avez le droit de rire.
On parle aussi de lourdes pertes pour les compagnies. De l'ordre de 500 000$ allant jusqu'à quelques millions. C'est un dialogue sur la sempiternelle dualité: Ton argent contre ma dignité.
Notre Premier Minus Trudeau a eu une dure semaine. Il a été l'arbitre qui n'appelait rien. Mais il faut lui accorder que "les pénalités" n'étaient pas claires à appeler. Il a appelé à la patience alors que tout le monde appelait à de plus en plus d'urgence. Pas pour des raisons dignitaires ou nobles. Pour des raisons économiques. Hier il a demandé que les barricades tombent.
Les autochtones et leurs supporteurs ont été assez intelligent pour frapper là où ça fait mal. Saigner le portefeuille. Et soudain, on écoute.
Mais il est aussi là le problème. Depuis toujours. On leur dit "on vous écoutera", on le fait, mais ce n'est que fausse écoute. Tout est décidé d'avance. On suivra l'argent. Nos politiciens sont tous comme ça. Legault plus que quiconque. Vous avez remarqué qu'il était leader parmi les leaders pour tasser tout ce monde par la force? Il poussera là où il flaire l'eau verte, capitaine business.
Comme l'arbitre n'appelait rien, les gens ont voulu se faire justice eux-mêmes. Alors qu'à Edmonton, des gens allaient aussi obstruer des voies de transports, des contre-protestants civils ont pris les choses en main et ont démantelé les barricades qu'on mettait en place.
Peter MacKay, terrible candidat au poste de futur chef Conservateur a fait preuve d'un grand manque de jugement. Il a tweeté que "...ces gens avaient fait en quelques heures avec un camion plus pour notre économie que Trudeau en 4 ans". Ce qui est non seulement faux, mais rend hommage aux gens qui auraient l'initiative de vouloir s'en mêler. Irresponsable de sa part. Tweeter est magique pour les imbéciles.
Dans cette guerre de nerfs, les autochtones sont justifiés de vouloir être entendu. Ils ont des raisons ancestrales de ne plus vouloir être ignorés.
Les trains sont aussi justifiés d'être en marche. On ne peut pas critiquer les autochtones d'être divisés sur la nature du projet, nous le sommes tous aussi, propriétaires contre notre gré d'un pipeline. Nous le sommes sur plein de choses.
Le Canada est le contraire de ce que Trudeau a dit quand il a été réélu minoritaire comme leader au pays. Il est largement divisé. Vous trouverez autant de gens en faveur des militants autochtones qu'il y a en aura qui seront en faveur des travailleurs qui commencent à recevoir leurs mises à pied.
Avec des nuits de -20, il faut accorder aux manifestants une certaine détermination. Et ça fait 10 ans que la communauté Wet'suwet'en est en conflit sur le sujet en Colombie-Britannique. La patience a le droit d'avoir une date d'expiration. Surtout quand on promet, larmes à l'oeil, d'écouter les premières nations devant la caméra.
Il y a cette émission assez fascinante animée par Patrice Godin, appelée Les Survivalistes qui suit des gens animées par le sentiment de panique et l'extrême prudence. Des gens étranges qui se préparent à des films qui ne joueront peut-être que dans leurs têtes.
Vivant dans le peut-être.
Ces gens rient probablement en ce moment en se disant que eux, ils en ont du ketchup.
Et sont prêts pour le film qu'on regarde en ce moment.
Personne ne veut que ça dégénère.
Quand tout le monde se bat au hockey, on ne pense plus au hockey.
Les autochtones veulent qu'on pense à eux.
Les gens veulent travailler.
Les gouvernements veulent faire de l'argent.
Film à la fin inconnue mettant en vedette des castors, de l'eau verte et des bateaux qui passent dessus.
Ça peut tous co-exister
Et même être beau.
"La balle est dans le camp de la police" disait-on hier.
C'est le sous-titre de film le plus dérangeant qui soit.
Semblerait que St-Lambert aurait réussi à plier bagages.
Mea culpa, cops.
Mais rien n'est réglé.
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