Tu me demandes où je vais. Je vais très bien."
-D.B.
Mon fils sera au Maroc jusqu'au 20 juin prochain.
J'ai très mal dormi dans les nuits de mercredi à jeudi et de jeudi à vendredi. Me réveillant toutes les heures, sans réelles raisons. J'ai réalisé, sur la route, jeudi, que j'angoissais probablement à propos de Monkee.
Deux jeunes universitaires canadiennes étaient kidnappées le même jour, au Gana. Et l'ironie voulait que la radio nous inondent d'hommages à ces jeunes de 20 ans, au débarquement de Normandie qui ont donné leurs vies pour libérer la France des Nazis, il y a 75 ans.
Moi, mon 20 ans, il allait vagabonder au Maroc. Plus bohème qu'organisé.
Et reviendra vivant à 99, 9%. Il le faudra.
La semaine dernière, il partait avec ce même ami, avec lequel il voyage, pour une semaine en Gaspésie. Là, presque 100% bohème. Couchant dans la voiture. Dans une tente, sur le terrain d'une amie de fille qu'ils s'étaient fait là-bas. Couchant aussi dans un hôtel abandonné et condamné depuis 2011, où une autre de leur nouvelle amie de fille, les avait tous les deux invités. Glauque, hanté, assez amusant. Et débrouillard. Ils ont appris à ne pas trop dépenser. Et se sont fait de nouveaux amis pleins d'accents un peu partout.
Ils s'en feront d'autres là-bas aussi. Certain. Si ils ne sont pas kidnappés à leur tour pour leur blancheur occidentale.
Être parent, c'est un passeport pour l'inquiétude à vie.
J'ai texté à ma mère que mon grand coco quittait pour Morocco. Je lui ai aussi dit que ça me faisait mal dormir. Elle s'est moquée de moi. M'a rappelé que j'avais quitté avec deux buddys, pour la Californie, pendant 15 jours, en 1990. Donc, deux ans avant l'âge actuel de mon fils.
"Vous aviez été inquiets?" que je lui ai texté.
"Mais oui! On comptait les dodos pour votre retour!"
Il n'y avait pas les moyens de communications d'aujourd'hui à l'époque. Je ne me souviens pas d'avoir appelé mes parents alors. De là-bas. Pour donner des nouvelles. J'ai dû le faire, mais je ne m'en rappelle pas. Fallait trouver un téléphone public. Et appeler à frais virés. Nous étions invincibles. Il n'y avait rien à craindre. Nous avions 18 ans. Personne ne voulait de nous sur le marché du travail. Ma mère avait 42 ans. Mon père, 43. Mon fils, lui, est attendu chez les paramédics dès que ses études seront complétées. On est la génération "passons par dessus".
Nous étions invincibles et le monde (qui ne nous voulait pas dans leur jambes, pas plus aujourd'hui, demandez aux médecins de famille) nous appartenait. Hihi...Qu'est ce qu'on s'en faisait croire...Je serai toujours un brin cynique là-dessus.
Mon fils est dans cet état d'esprit. L'invincibilité. Il charme facilement les filles, il est en parfaite santé, son emploi de lifeguard l'attends au retour. Dans une nouvelle maison. Dont il aura tout le sous-sol. Ouais, si j'étais lui, je me sentirais face à un maudit bel été, moi aussi. Il aura 20 ans le soir le plus cool (selon lui) du Festival d'Été de Québec et lui et ses amis se promettent une soirée de fous.
Un mercredi en feu.
Quand on voyageait, plus jeune, fallait faire preuve de créativité pour se renseigner sur plein de choses. Pour donner de nos nouvelles. Pour se rejoindre d'un océan à l'autre. Fallait même acheter des fois, des timbres. Et s'assurer que notre film de caméra soit bien "enclenchée". En priant pour que la photo prise soit bonne au développement de la bobine.
Maintenant, les gens ont le monde dans la main. Dans leur téléphone. On est à un texto, un message sur messenger, de savoir ce que fait chose, en Islande, au Belize, Pékin ou Sidney.
On communiquait par messenger avec Monkee qui faisait un premier vol jusqu'à Bruxelles entre jeudi et vendredi, avant de repartir jusqu'à Casablanca.
On avait plus de ses nouvelles (sur messenger) depuis Bruxelles. Le lent moteur de l'inquiétude parentale commençait à ronronner en nous. Il devait atterrir vers 10h30 (heure de chez nous) et à midi, c'était toujours le silence radio.
Ce qui n'aidait pas c'est que la belle-mère et sont chum sont aussi en voyage, en Grèce, et nous donnaient de leurs nouvelles, Donc chaque "ding" de messenger, pour l'amoureuse et moi, était un potentiel "je suis arrivé" mais était toujours un "voici ce que nous avons fait aujourd'hui" ou " Wow! ça a l'air cool!" ou "amusez vous bien!" de quelqu'un d'autre.
À 12h17, il trouvait enfin du wi-fi pour nous dire que tout allait bien,
Tout ira bien.
Here's looking at you, kid.
On compte les dodos.
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