dimanche 17 juillet 2016

Blonde & Idiote Bassesse Inoubliable*************Clandestino de Manu Chao

Chaque mois, je vous propose un album tiré de ma collection que je trouve humblement, idéal pour l'oreille.

Le titre de la chronique mensuelle est inspirée de 4 albums qui font parti de mon ADN, par ordre de publication:

"Blonde on Blonde" de Bob Dylan
"Low" de David Bowie
"The Idiot" d'Iggy Pop
"The Unforgettable Fire" de U2

Des albums parfaits pour moi.

B.I.B.I. C'est justement moi, bibi.
C'est aussi la terminaison de Habibi qui veut dire "mon amour" en dialecte Iranien.

La musique est muse.

Musik is sex.

Je mords avec passion dans certaines musiques.

Je vous propose cette fois du très chaud.

CLANDESTINO de MANU CHAO

1998.

Je travaille au Centre-Ville de Montréal. Je ne le réalise alors pas pleinement, mais j'ai un job de rêve. Je commande, écoute, propose, des disques et des films pour la Bibliothèque Nationale qui se construit en face. J'ai un bureau au sous-sol du magasin centenaire qui m'engage et j'ai deux employés sous ma charge qui courent mes demandes sur le plancher.

Je reçois donc en avance à peu près tout. Clude, avec qui je bosse, est acheteur. Il passe devant moi et me lance l'album de Chao.

"Aimais-tu Mano Negra, Jones?"
"Ouais...pourquoi?"
"Chanteur" me dit-il. "et il baise Madonna"
"Tout le monde baise Madonna, c'est pas un critère..."
"Premier album solo, très bon, t'aimerais, ça s'écoute d'un seul trait"

C'était la magie du CD. Plus jamais besoin de tourner la face A. En effet, L'album commence et ne s'arrête que 46 minutes plus loin. On a entendu 16 morceaux (ou amorces) et on a sérieusement voyagé. Manu nous aura chanté en espagnol. en portugais du Brésil, en anglais et en français.

On a fait le tour de l'Amérique. principalement latine. Et dans les rues. On y entend tous les sons. On se sent tantôt dans la chaleur de la brousse, tantôt dans la hargne de la rue. Mais il fait chaud. On écoute le disque et il fait chaud.

Esta Calor, esta onda de calor.

Les premiers accords me font tout simplement un plaisir fou. C'est pour moi une forme d'ouverture de l'été. La chanson est chantée en espagnol et la rumeur voulait à l'époque qu'il ait beaucoup enregistré à Montréal, dans les rues et en studio. Ce que le "va chier" vers 1:10 semble confirmer, mais je ne peux trouver un endroit qui me confirme la montréalité de l'album.

Le second morceau est chanté en espagnol et en portugais du Brésil. Chao voulait signer son testament musical, Issu du rock de Mano Negra, il ne croyait pas être en mesure de plaire à un autre type de public. il plante une maquette principalement techno. Même si on lui dit que le techno se prête mal à ses rythmes. Toutefois, un bogue informatique supprime "par erreur" tous les passages techno. Manu s'aperçoit que ses rythmes sauvegardés peuvent effectivement se rendre intéressant à la guitare. Ce morceau en fait foi.

Les deux morceaux suivant se fondent l'un en l'autre et forment presqu'un seul beat. Chao chante en anglais sa désillusion du milieu de la musique, et vise principalement ceux de son entourage qui justement, ne croient pas en sa techno. Il existait une première incarnation de cette chanson avec Mano Negra. Plus sombre. Plus tribal.

La seconde partie est en français et sera son plus important single dans le monde francophone. Dommage que le refrain soit si négatif car j'aimais beaucoup le chanter et l'amoureuse ne savait jamais quoi en penser. L'harmonie est simple. reggae, avec une légère guitare maritime. Adorable morceau.

Mentira nous amène ailleurs. Reggae plus relax, chantée en espagnol, la pièce offre en fin de chanson un solo vocal intéressant d'un invité, A.Khelifa-Pascal. Une femme nous raconte plein de choses en fin de chanson. J'aurais aimé vous dire quoi. La rue s'impose en sons. Pas désagréable. On s'y sent.

Une radio, plus active encore sur l'album suivant, nous guide au morceau suivant. La batterie est absente de la plupart des morceaux et sur Lagrimas de Oro, les percussions s'assoient sur l'harmonie assez tard. Et accompagnent les trompettes merveilleusement.

J'ai toujours beaucoup aimé Mama Call qui garde quelques touches de doux techno qui voque une goutte ponctuelle, une timide guitare qui sonne comme une rivière et ces sons ambiants qui nous rapprochent du Brésil. (Endroit où je n'ai jamais été toutefois).

Luna Y Sol est un morceau assez près de ce qu'était Mano Negra. Moi je comprenais "arriva la Luna Montréal" mais on dit bien Arriba la luna ohea (Récupère la lune Ohéa là). Cette croyance erronée ajoutait au mythe qu'il avait enregistré à Montréal.

Manu Chao n'a jamais pensé que son album était terminé. Il pensait avoir une maquette, mais on a fini par le convaincre que tout ça était très bon, dépouillé comme Por El Suelo (esperando la ultima ola). (l'attente se termine ici, salut!). Cette ligne entre parenthèse est aussi le sous-titre de son album.

La réalisation de Renaud Letang, réalisateur aussi de Souchon, est marquée sur des morceaux planants comme Welcome to Tijuana où on mélange chant traditionnel, débauche, sons de jams nonchalant. cuivres mous, discours en espagnol, qui nous laisse croire qu'on est au coeur d'une rue de Sao Paulo. C'est un discours du sous-commandant Marcos, un militant altermondialiste mexicain, porte-parole de l'armée Zapatiste  fragmenté d'une chanson à l'autre.

Le morceau suivant reprend un passage de Luna Y Sol, très mollement.

Le morceau qui vient tout de suite est un de mes préférés, sinon mon préféré. La guitare y a un rythme très Mano Negra et c'est vrai que la joie peut aussi faire mal. De 3:15 jusqu'à la fin j'aime beaucoup.

On revient au français pour une autre pièce qui parle de la vie à deux de manière plus ou moins heureuse. Fataliste le Manu. Très Jean Leloup (quand celui-ci est inspiré- Il est d'ailleurs lui-même surement grand fan car il lui pique plus qu'un accord ou deux).

On tombe dans le poney reggae pour la pièce suivante. Chao est malheureusement perçu comme un fumeur de mari, ce qu'il ne cache pas, mais il traite d'immigration, un sujet atrocement actuel.

Le clavier à deux notes revient pour la pièce suivante. Sur l'album qui suivra (tout aussi excellent) Chao utilisera plus encore la répétition et le leitmotiv lyrique ou musical. On sent qu'il n'est jamais seul. Les sons sont riches. On voyage pour vrai. Et incontestablement, on est en été. Et il fait chaud, même la nuit. En fin de chanson, Chao chante comme un chat se plaint dans la nuit.

On clôture l'album dans la lenteur et le dépouillement. Je mets l'hyperlien juste ici, car vous le constaterez, cet album s'écoute en 45 minutes continues.

Des minutes chaudes, étrangères, agréables, et polyglottes.

On termine dans le vent.
De nuit surement.

Chaude, quand même.

Splendide.

Pour amateur de rythmes latin, de punk acoustique, de reggae, de techno subtil, de musique métissée, de revoluscion folk espagnole et de sueur estivale et caniculaire.

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